L’assassinat le 18 septembre de Patrice Madelaine à Ajaccio pourrait être mis en relation avec celui de deux autres promoteurs sur la plaine orientale. Preuve une nouvelle fois que l’immobilier est au cœur des convoitises.
Un homme qui enfourche un scooter, sort d’une visite de chantier dans le quartier d’Aspretto à Ajaccio, puis des détonations de fusil à pompe… Le scénario qui a coûté la vie le 18 septembre à Patrice Madelaine ressemble à tous les règlements de comptes qui endeuillent depuis des mois l’Ile de Beauté.
Un homme “arrivé”
Des “contrats” qui frappent des membres du grand banditisme, mais pas seulement. Notables, hommes d’affaires, la liste de ces cadavres exquis chers à Francesco Rosi continue de s’allonger. Car le promoteur Patrice Madelaine était un homme, comme on dit, “arrivé”. Installé en Corse depuis 2005, ce professionnel en provenance du continent avait installé pas moins de six sociétés à Santa Maria Poggio sur la côte orientale. C’est là qu’il a bâti le complexe touristique Melody en association avec un autre entrepreneur, très proche des nationalises, Charles Paoli. Ce dernier était abattu le 28 juin 2011 et son assassinat “vengé” par l’exécution quelques mois plus tard d’un certain Christian Leoni. L’élimination de ce proche de l’équipe dite de La Brise de Mer était revendiquée par un communiqué des clandestins du FLNC.
Depuis, une autre relation de travail de Madelaine, le Portugais Victor Ribeiro, fut aussi criblée de balles, au volant de sa voiture, à la sortie d’un déjeuner dans le secteur. C’était le 20 novembre 2012.
Guerre d’Ajaccio ou guerre de la plaine orientale ?
Les enquêteurs de la DRPJ cherchent à élucider le mystère. Certes, la victime finalisait la construction d’une résidence de grand standing dans la cité impériale, ce qui peut laisser à penser que cette affaire ne serait pas étrangère aux spectaculaires éliminations de notables de ces dernier mois : l’avocat Antoine Sollacaro, le président de la chambre de commerce Jacques Nacer, le président du parc naturel régional Jean-Luc Chiappini… Ne manque en effet à la liste qu’un promoteur.
Mais la piste de la plaine orientale objet de sauvages rivalités et d’exécutions à répétition demeure a priori la plus crédible.
Bucchini à Valls : “Il faut arrêter de dire des bêtises”
Derrière tout cela, c’est bien la délicate question de la spéculation immobilière et des projets qu’elle engendre dans l’île qui interpelle. Pour le président de l’assemblée de Corse Dominique Bucchini, c’est d’ailleurs la principale motivation de cette vague mortifère qui déferle sur la Corse. Il répond ainsi à Manuel Valls, qui a dénoncé la violence culturelle qui mine selon lui l’île : “Il faut arrêter de dire des bêtises. Il y a cent personnes qui polluent la Corse et qui ne se tuent que pour des histoires de fric.”
Pour le président de l’assemblée, les remèdes sont institutionnels. Il affirme que l’adoption prochaine d’un Padduc (plan de développement durable de la Corse) va délimiter les périmètres de constructibilité, notamment sur les zones côtières. Elle devrait calmer les esprits. “Il faut que les Corses comprennent que l’on est dans un État de droit”, insiste Dominique Bucchini, qui a tout de même du pain sur la planche.