Les Français jettent en moyenne 1,3 million de tonnes de denrées alimentaires par an, soit 20 kilos en moyenne par personne, dont 7 kilos d’aliments périmés et 13 kilos de restes.
"On vit des restes de la consommation à outrance de (notre société)". Depuis deux ans, Jeremy Seifert nourrit toute sa famille en faisant les poubelles des supermarchés de Los Angeles, à la recherche d'aliments comestibles mis au rebut. Son histoire, dépeinte dans le documentaire Dive !, était diffusé hier en prime time sur LCP/Public Sénat.
Cinq trois minutes qui vous coupent littéralement l'appétit. Non pas tant parce qu'on voit des "déchétariens" "plonger" (dive) dans les containers cafis de nourriture encore consommable, mais parce que notre responsabilité est mise en cause sans détour.
Le poids de 260 pyramides de Kheops
Il suffit juste de taper "FAO gaspillage alimentaire" sur Google, et de jeter un coup d'œil à la synthèse du rapport de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture) The Food Wastage Footprint – Impacts on Natural Ressources.
À l'échelle de la planète, le gaspillage alimentaire, c'est 1,3 milliard de tonnes à l'année. Soit, du point de vue strictement fiduciaire, 750 millions de dollars jetés à la poubelle tous les ans. La production de nourriture non mangée occupe 30 % des terres cultivables mondiales.
"Nous ne pouvons tout simplement pas permettre qu'un tiers de toute la nourriture que nous produisons soit gaspillée ou perdue à cause de pratiques inadéquates lorsque 870 millions d'êtres humains sont affamés chaque jour" s'est récemment insurgé José Graziano da Silva, le directeur général de la FAO.
Les pâtes oui, les légumes aussi
Ce vendredi et ce samedi, c'est le traditionnel week-end de la collecte des Banques alimentaires. Dans le Rhône, sur ces deux jours seulement, l'an passé, 340 tonnes de denrées alimentaires ont ainsi été récupérées. L'équivalent de près de 700 000 repas distribués... Cette collecte de novembre représente 8 % de la collecte annuelle.
Sur ces 340 tonnes, 25 le sont sous forme de pâtes. "On ne demande donc jamais de pâtes, explique Maurice Lony, directeur fédéral du réseau des Banques alimentaires. On demande des boîtes de conserve, des petits pots pour bébé, des légumes, de l'huile, des soupes en brique, etc."
Ce week-end-là, pas moins de 350 personnes travaillent à Lyon pour la collecte de la Banque Alimentaire. Ce qui fait dire à Jeremy Seifert , le "plongeur" de poubelles de Los Angeles que "sans bénévoles, rien ne serait redistribué". Au-delà du simple don de nourriture, les Banques alimentaires créent du lien pour les plus démunis afin de les maintenir dans un tissu social. "Sans ce lien, notre action n'aurait pas de sens", renchérit Maurice Lony. Les dons non plus.
Cantines : à Lyon, 1/3 des repas est jeté tous les jours
La collecte de novembre vient couronner le travail des bénévoles qui récupèrent toute l'année dans le département auprès des grandes et moyennes surfaces (28 %), de l'industrie agroalimentaire (26 %), des plateformes logistiques (19 %), des aides européennes et françaises (18 %), des autres Banques alimentaires (1 %) et de la collecte dans les... établissements scolaires (8 %). À Lyon, 2,7 tonnes d'aliments sont jetés quotidiennement dans les cantines de la ville, soit 125 grammes par enfant. Pas énorme ? Rapporté à l'année, cela représente 360 tonnes...
Plus globalement, les Français jettent en moyenne 1,3 million de tonnes de denrées alimentaires par an, soit 20 kilos en moyenne par personne, dont 7 kilos d’aliments périmés et 13 kilos de restes.
Système alimentaire défaillant ? Sans aucun doute. Les dons deviennent dès lors en quelque sorte une variable d'ajustement.
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Lire aussi : l’entretien de Lyon Capitale avec Jean Ziegler, premier rapporteur spécial de l’histoire des Nations unies pour le droit à l’alimentation (2000-2008) et actuel vice-président du comité consultatif du Conseil des droits de l’homme de l’Onu.