Services à la personne, une chercheuse veut tout bouleverser

Pour protéger les salariés, faut-il supprimer le statut de particulier employeur dans le secteur des services à la personne ? C’est en tout cas l’idée défendue par une chercheuse lyonnaise en droit social. Dans une thèse soutenue fin octobre, Alison Dahan propose de tout bouleverser.

Le secteur des services à la personne est devenu un joyeux patchwork, où se retrouvent aussi bien femmes de ménage que masseurs à domicile. En 2013, le secteur a pesé plus de 17 milliards d'euros et devrait continuer de progresser, notamment à cause du vieillissement de la population. Mi-novembre, le Centre d'information et de documentation jeunesse a publié une synthèse sur les métiers "qui ne connaissent pas la crise", mettant en avant le fort potentiel des services à la personne.

Parallèlement, dans un contexte où les particuliers peuvent devenir facilement des employeurs grâce à des dispositifs comme le chèque Emploi Service universel, les règles en matière de droit sont parfois peu respectées.

Supprimer le statut de particulier employeur ?

Alison Dahan, chercheuse en droit social à l'université Lyon III, a soutenu une thèse sur ces services à la personne fin octobre 2014, obtenant à cette occasion les félicitations du jury pour son travail. Son bilan sans concession dresse le portrait d'un secteur aux contours juridiques flous et "trop largement délimités".

Selon elle, temps partiel et précarité des salariés règnent, notamment quand ils sont employés par des particuliers. Dans ses travaux, la chercheuse préconise tout simplement de supprimer le statut de particulier employeur, pour laisser le champ libre aux seules structures personnes morales (entreprises, associations...). Ces dernières seraient plus respectueuses du droit du travail dans le meilleur des cas, plus simples à assigner aux prudhommes lorsqu'il y a un conflit à régler. Alison Dahan précise : "Il faut protéger tous les salariés du secteur de la même manière et les règles de droit dérogatoires applicables aux salariés des particuliers employeurs ne le permettent pas aujourd'hui."

S’inspirer du modèle suédois

La proposition se veut volontairement radicale, pour rappeler que les règles de droit dans ce secteur restent méconnues du grand public. La chercheuse insiste sur la nécessité de rendre le statut des particuliers employeurs moins attractif, notamment en le décourageant via une réforme concernant les aides fiscales. Une réforme devrait permettre également une baisse significative du travail dissimulé qui caractérise le secteur.

Actuellement, les particuliers peuvent bénéficier d'un remboursement sur leurs impôts ou d'un crédit correspondant environ à 50 % de leurs dépenses. Ils doivent cependant avancer les sommes sur un an avant de jouir de cet avantage.

D'autres pays ont choisi d'inverser les choses. Selon la chercheuse, la solution pourrait bien venir de Suède, où ce sont les entreprises prestataires de services qui prennent à leur charge les 50 % et se font rembourser auprès de l'administration fiscale par la suite. Les ménages payent donc le prix réduit de moitié dès le départ, sans devoir faire la moindre démarche ni avancer des sommes.

Alison Dahan avance des arguments de choix : "Avec le modèle suédois, le statut de particulier employeur deviendrait moins attractif et les ménages gagneraient du pouvoir d'achat, faisant reculer en même temps le travail dissimulé."

Le secteur devrait continuer sa progression. Cependant, s'ils ne sont pas mieux encadrés, les services à la personne pourraient bien devenir une bombe à retardement sociale.

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