Présenté à la Maison de la danse dans le cadre de ses “Portraits de femmes”, Le Miroir de Jade a une forme surprenante. Il ne s’agit ni d’un spectacle de danse ni d’un spectacle de théâtre. Pourtant, ce sont les deux à la fois. Lyon Capitale a pu voir le spectacle lors de sa création à la Comédie de Valence en janvier. Critique.
Jade gît au sol, emmurée dans des toiles fines et transparentes, enveloppée par une musique aux sons brouillés, dont la réverbération révèle les couches et sous-couches d’un univers mental qui semble exploser, en essayant peut-être de trouver l’issue. Le corps subit, écrasé par la pression. Étrangement, il nous emmène dans les profondeurs abyssales d’un fond marin. Liquide immatériel qui étouffe le souffle de la noyée ou qui laissera émerger vers la naissance, le corps flottant.
Le pari de la lenteur
Avec sa comparse, la chorégraphe et metteure en scène Raja Shakarna, Sandrine Bonnaire fait le pari de la lenteur sur scène et nous aspire vers son corps, devenu le lieu de notre propre enfermement mais aussi du recueillement.
Cette femme échevelée, folle, recroquevillée, décharnée verra peu à peu le rideau qui l’entoure se déchirer, les médicaments rejetés, les éclairs la secouer, son corps se relever pour tenter, doucement, de se reconnecter. Jusqu’à découvrir sa peau et sa nudité.
Sandrine Bonnaire ne triche pas. Elle est juste l’incarnation de cette femme et il est étonnant de voir à quel point son corps émet, sans les dire, des sentiments qu’une comédienne moins mouvante pourrait nous déclamer dans une forme plus conventionnelle et moins charnelle. Si elle puise en elle pour retracer l’histoire de cette renaissance, elle évite l’écueil du narcissisme et transforme son travail en une véritable proposition artistique et humaniste.
Les éléments scénographiques sont à leur place, ponctuant avec la musique les étapes de l’éveil de cette femme qui nous donne la sensation d’appartenir à une même communauté. Celle d’une folie qui côtoie les peurs tout en regardant les lueurs de la vie.