Le chef-propriétaire de L’Auberge de l’Ile, Jean-Christophe Ansanay-Alex, auquel le Michelin a récemment retiré une étoile, envisagerait de quitter Lyon. Et la France. Coup de sang ?
C'est l'une des belles tables de la ville. Nichée sur l'Insula Barbara, là où les derniers druides se manifestèrent et les Romains ne s'aventurèrent point. D'ici à quelques mois, pfuiit ! elle n'y sera plus. C'est en tout cas ce que nous a laissé croire Jean-Christophe Ansanay-Alex, le chef-propriétaire de L'Auberge de l'Ile.
Coup de sang du cuisinier suite à la très récente reprise, par le guide Michelin, de l'une de ses étoiles ? Ou ras-le-bol plus général ? Mystère.
Le chef-propriétaire, ici depuis 1991 (succédant à ses parents qui reprirent la guinguette des bords de Saône en 1967 pour la transformer en restaurant gastronomique bourgeois), nous a en tous les cas confié "rêver d'ailleurs". Quitter Lyon, partir pour l'étranger ? La porte serait très ouverte.
Il en parlait déjà d'ailleurs depuis un petit moment. La perte de sa deuxième étoile, en février dernier, a été "le déclencheur". "Finalement, ce n'est pas plus mal. J'ai plein d'autres projets." Et de nous avouer qu'"en France, tout devient compliqué."
Chef particulier d’Onassis
Arrivé à 23 ans comme "consul" de L'Auberge de l'Ile*, l'ancien chef particulier de Christina Onassis décroche un macaron au Michelin deux ans plus tard. Le guide Rouge lui en accordera un autre en 2002. L'Auberge de l'Ile adhère à Relais & Châteaux, puis fait son entrée aux Grandes Tables du Monde, qui regroupent 158 restaurants d'exception sur 4 continents.
Jean-Christophe Ansanay-Alex a récemment préparé le dîner officiel offert par la Ville de Lyon au président chinois Xi Jinping, en visite entre Rhône et Saône.
Mais, depuis quelques mois (années), JCAA rencontrait quelques problèmes avec les autres propriétaires de l'île Barbe. Sous leur pression, la Ville vient de lui suspendre son autorisation de terrasse. La goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Sans compter toutes les "tracasseries administratives" qui semblent lui peser... Bref, JCAA semble en avoir ras l'andouillette. S'il venait à quitter la ville, pour le coup, ce serait vraiment dommage pour Lyon. A suivre donc...
L’article de Lyon Capitale d’octobre 2003
L’Ile au trésor
Entre modernité et classicisme, élégante pérégrination gastronomique à L'Auberge de l'Ile, l'un des fleurons de la cuisine lyonnaise.
Difficile de ne pas tomber sous le charme de cette vieille bâtisse du XVIIe siècle, nichée en l'appendice de l'île Barbe. Cette grande demeure aux volets verts patinés par les années, recouverte de vigne vierge et de glycines généreuses, est d'ailleurs la seule à avoir droit de cité sur ce bout de terre qui émerge de la Saône. La ville paraît si loin. A l'entrée, la plaque sur laquelle est gravé "État souverain de l'île Barbe – Consulat général" ajoute encore le sentiment d'être à mille lieues de Lyon*.
"J'ai voulu faire de cette maison l'endroit où l'on rêverait de venir manger", souffle Jean-Christophe Ansanay-Alex, le chef-cuisinier et gardien du temple. Car, avant d'avoir effleuré du bout des lèvres le moindre mets, ce sont les yeux qui sont en éveil.
L'Auberge de l'Ile est un savant mélange de genres, entre classicisme et modernité, poutres apparentes, élégant parquet noir et jolies tomettes, monochromes et tableaux contemporains, lumière opaque et discrète. Un goût sobre et distingué qui se retrouve également dans les assiettes. Le chef s'invite à table pour expliquer les plats du moment comme une vinaigrette tiède de langoustine bretonne, melon jaune rôti et pamplemousse rose ou un velouté de champignons "comme un cappuccino", lardons de foie gras à la vapeur.
"Après l'explosion des potagers et des vergers des mois précédents, c'est le réveil de la nature sauvage. Les hirondelles se rassemblent et l'on sent le parfum flottant de l'automne qui approche. Les moissons, les champs, nous dévoilent leurs robes d'une belle couleur dorée, et des bois, les effluves des premiers champignons nous invitent à table."
Lyon a indéniablement son île au trésor.