Centrale du Bugey : pourquoi la Métropole ne peut pas être à la CLI ?

La commission locale d'information de la centrale nucléaire du Bugey prévoit de rejeter la demande d'intégration de la métropole de Lyon en son sein. Pour Pierre Hémon, président d'EELV à la ville de Lyon, il s'agit là de ne surtout pas avoir l'obligation de communiquer aux lyonnais à propos des risques et des incidents liées à la plus vieille centrale de France, juste après celle de Fessenheim.

Pierre Hémon, président d'EELV à la Ville de Lyon déplorait déjà que la Métropole de Lyon ne soit pas conviée à la dernière réunion de la commission locale d'information de la centrale nucléaire du Bugey, faute qu'un courrier de demande ne soit tout simplement envoyé à temps. Une démonstration d'un "désintérêt considérable de la Métropole à ce sujet" pour le président d'EELV à la Ville de Lyon. Cette fois, le courrier a bien été envoyé et demande même d'intégrer la CLI de la centrale nucléaire âgée de 37 ans, située à peine à 30 kilomètres du coeur de Lyon.

Pourtant, à l'ordre du jour de la réunion du 10 juin prochain, il est écrit noir sur blanc : rejet de la candidature de la Métropole de Lyon pour intégrer la CLI, avec comme argument : "le règlement actuel ne permet pas d'accepter la métropole, dans la mesure où elle se situe hors du périmètre de sécurité de 10 kilomètres autour de la centrale." Etonnamment, lors de cette même réunion, sera évoqué l'élargissement du périmètre des plans particuliers d'interventions (PPI) autour des sites nucléaires, qui passera de 10 à 20 kilomètres. Le 26 avril dernier, pour les 30 ans du drame de Tchernobyl, Ségolène Royal annonçait cette mesure, considérée par Green Peace comme une mesurette, étant donné que la plupart des pays européens appliquent déjà ce périmètre, mais également que "l'impact radiologique de l'accident de Fukushima s'étendait sur un périmètre de 100 km et la catastrophe de Tchernobyl sur un périmètre de 300 km".

Au delà du périmètre, silence radio

Par un simple calcul de distance sur Google Maps, on s'aperçoit que la commune de Jonage, intégrée à la Métropole de Lyon, se trouvera à moins de 20 kilomètres de la centrale. À priori, rien ne devrait donc empêcher la Métropole de Lyon d'intégrer la commission locale d'information, plutôt que de n'autoriser qu'un représentant à assister aux réunions en "auditeur libre" comme semble le prévoir la CLI de la centrale du Bugey. "Pour la sécurité des lyonnais et de la Métropole, la métropole doit faire partie de cette commission", selon Pierre Hémon."Le canton de Genève en fait partie alors qu'ils sont à 70 kilomètres, le grand stade de Décines doit être à 18 kilomètres à peine. Il y a un soucis de logique. À mon avis, cette décision est plutôt dû au fait de la "grande muette" et de l'opacité sur le nucléaire en France. Il y a tout à coup des obligations, à partir du moment où l'on élargit le périmètre."

La Commission locale d'information de la centrale a été crée en 1992 et à vocation à échanger sur les questions posées par ses membres, mais aussi à faire état des incidents de différents niveaux qui ont lieu régulièrement sur le site et ce sur ce rayon particulier de 10 kilomètres. "Si vous allez acheter une maison ou une appartement dans les 10 kilomètres qui entourent la centrale, il est obligatoire que l'on vous expose les risques. Mais au-delà de ces 10 kilomètres, on ne parle de rien. Maintenant, si vous achetez dans les 20 kilomètres, on va vous en parler. Si on fait entrer la métropole de Lyon dans cette commission, il va falloir répondre à ses questions et informer les lyonnais. C'est quelque part reconnaître qu'il y a un danger sérieux et tant mieux. Ca veut dire qu'il faudra réfléchir à la distribution et au stockage de pastilles d'iodes sur Lyon en cas d'incident. C'est de ça dont ils ont peur, qu'il y ait plus de questions et qu'on ne les laissent pas tranquille." Pourtant, la CLI de la centrale du Bugey met ses comptes rendus en ligne après chaque réunion. En ce moment, l'état d'avancement pour la reprise de Bugey 5, dont l’enceinte de confinement est à l’arrêt pour des problèmes d’étanchéité est au coeur des discussions, qu'on peut notamment lire dans le dernier compte rendu.

La métropole sera-t-elle présente lors des grands débats ?

Pour Pierre Hémon, président d'EELV à la ville de Lyon, cette décision s'intègre parfaitement dans l'histoire du nucléaire depuis ses débuts en France : "le nucléaire était géré par des ingénieurs et des politiques et pour eux, le nucléaire ne se discute pas, c'est une affaire d'Etat. Quand il y un incident, c'est entre guillemet, un secret d'Etat. Si les citoyens commencent à y mettre leur nez... C'est une vieille culture du secret. C'est aussi très lié au développement du nucléaire militaire et donc à la question militaire, mais aussi soi-disant, à l'indépendance de l'appareil de production. Mais il n'y a rien d'indépendant puisqu'il n'y a pas d'uranium en France." Selon lui, la présence de la métropole au sein de la CLI est capitale, surtout au moment où de grands débats vont l'agiter : "cette centrale approche des 40 ans, est ce qu'il faut remettre des centaines de millions d'euros pour la sécuriser ou est ce qu'il faut laisser tomber ?" Ce sera tout l'enjeu dans les années à venir.

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