Le ministère de la Transition écologique et de l’Agriculture a présenté lundi la version définitive du plan Loup, après une consultation publique qui se prononçait en faveur de la conservation du canidé. Ce plan ne contente aucune des deux parties, qui le rejettent en bloc. En Auvergne-Rhône-Alpes, syndicats et associations d’éleveurs ne déchantent pas…
Lundi dernier, le gouvernement a présenté le document qui compte définir la gestion de la population de loup en France jusqu’à la fin du quinquennat Macron, une question de friction entre les éleveurs et les écologistes. Ces derniers réclament des initiatives promouvant la conservation du canidé, tandis que les éleveurs souhaitent une meilleure régulation du prédateur. Car, si l’on compte quelque 360 loups dans l’Hexagone, les attaques ne cessent de décimer leurs troupeaux. “En 2015, nous avons perdu 9 000 litres de lait soit 54 000€ de chiffre, partage la Confédération paysanne. Nous ne demandons pas l’extermination du loup, mais que le gouvernement français offre les outils nécessaires aux éleveurs pour lutter contre la prédation.” En 2017, 11 700 animaux domestiques ont été victimes des crocs du loup. 30% des attaques se déroulent en Auvergne-Rhône-Alpes, récurrence due à la très forte concentration du canidé dans le massif des Alpes.
“Ce n’est pas notre boulot de tuer des loups”
Début janvier déjà, le plan initial a été soumis à une enquête publique qui s’est prononcée à 75% pour la préservation du canidé. Comptes faits, le nouveau rapport est quasiment identique au précédent, laissant un goût aigre dans la bouche des éleveurs. Dans les grandes lignes, le document prévoit la mise en application de quotas d’exécution de l’animal. Entre le 1er janvier et 31 décembre 2018, un plafond de 40 a été fixé, avec priorité aux tirs de défense. Les tirs de prélèvement – visant à tuer – ne seront autorisés qu’à partir du 1er septembre. Les années suivantes, les quotas dépendront des effectifs restants de loups, le gouvernement souhaitant atteindre une population de 500 canidés d’ici la fin du mandat Macron. Toujours est-il que seule une maigre portion des 27 pages d’argumentaire que les associations d’éleveurs avaient soumises au gouvernement n'a été considérée. “Le seul point où le ministère est allé dans notre sens est l’instauration de bergers de garde, poursuit un membre de la Confédération paysanne. Mais là aussi, la mesure manque de fond, nous souhaitons que nous soyons dissociés des bergers de garde. Ce n’est pas notre boulot de tuer des loups.”
500 loups, c'est trop
Néanmoins, le président de la SRSEA, Michel Joux, note un grand pas. “Les éleveurs ont maintenant carte blanche s’ils sont attaqués par ces prédateurs. Toujours est-il, nous trouvons l’initiative trop timide.” L'objectif de 500 loups, c’est trop, beaucoup trop même pour les éleveurs qui craignent que la prospérité du canidé ne devienne une menace même pour l’Homme. “L’état impose une extermination de 10% des loups par an, alors que leur population augmente de 20% chaque année, se révolte Michel Joux. Le président de la SRSEA est formel. Pour lui, les éleveurs doivent obtenir la capacité de réguler la population des canidés, que ce soit par la force ou par “l’éducation” – il mentionne notamment l’utilisation des excréments de loups pour dissuader d’autres meutes.
“Payer pour être indemnisé”
Puis, il y a la problématique de la conditionnalité des indemnisations, fortement huées par les communautés d’éleveurs. Le gouvernement leur impose d’ériger au moins deux mesures de protection, d’une liste prédéfinie, contre le prédateur. Dans le cas contraire, les indemnités – supposées faire pendant des pertes de brebis – ne seraient pas versées. "On doit payer pour recevoir des indemnités", s'agace un membre de la Confédération paysanne qui estime que l'investissement pour se protéger du loup serait“rédhibitoire pour un salaire de 300€ par mois”. Michel Joux ne peut qu’approuver, “c’est du grand n’importe quoi”, ajoute-t-il.
Au-delà du plan, les syndicats d’éleveur craignent que les attaques répétées provoquent un effet domino sur la profession. “Notre situation dissuade les éleveurs en devenir, se désole Michel Joux. La Confédération paysanne renchérit : “On le dit souvent, nous sommes les premiers écolos, nous remplissons les rayons bio au supermarché. Bientôt, à cause des attaques répétées, nous n’aurons peut-être plus la possibilité de fournir ces stocks…”