Un document des services de renseignement américain révélé parWikiLeaks identifie la Grande Mosquée de Lyon comme l'une des neuf bases arrières du terrorisme international. Pourtant, celle-ci n'a jamais été liée au salafisme radical, comme l'ont été par le passé d'autres lieux de prières de l'agglomération.
La Grande mosquée est-elle un foyer du terrorisme international, à l'instar de Finsbury Park à Londres ? C'est ce qu'indique un document de 17 pages du Département d’État américain mis au jour par WikiLeaks. Ce document intitulé "Matrix of Threat Indicators for Enemy Combattants" rédigé en août 2004 est adressé aux interrogateurs de Guantanamo afin d'évaluer le niveau d'importance des prisonniers dans la hiérarchie d'Al-Qaida.
Aucun fidèle de la Grande mosquée de Lyon arrêté
Parmi les critères référençant la dangerosité des prisonniers, on trouve le fait que ces individus se soient rendus en Afghanistan après le 11-Septembre, qu'ils aient été invités au mariage de Ben Laden fils ou encore qu'ils portent une montre Casio - le modèle argenté ayant été offert par la nébuleuse terroriste à ceux qui avaient participé à une formation sur le maniement des explosifs improvisés. À la page 9 du document est également dressée une liste de neuf mosquées connues selon les experts américains pour avoir accueilli et recruté des "membres connus d’Al-Qaïda". La fréquentation de ces épicentres de l'Islam radical est donc un indicateur déterminant éveillant les soupçons. Ces mosquées sont situées à Sanaa au Yémen, à Karachi au Pakistan, à Kaboul en Afghanistan mais cinq d'entre elles sont basées en Occident, et parmi elles la Grande Mosquée de Lyon appelée "Laennec mosque" dans le document.
L'information interpelle : la Grande Mosquée de Lyon n’est pas connue des services français pour avoir, hier comme aujourd’hui, abrité des prêches intégristes. Par ailleurs, aucun des présumés terroristes arrêtés à Lyon n'a été un fidèle de ladite mosquée. L’information est donc à prendre avec précaution et sans doute à relativiser au regard de ce que l’on sait de l’histoire des mouvements intégristes dans l’agglomération lyonnaise. Celle-ci fut certes le lieu d’entrée du salafisme en France dont la dérive intégriste s’est polarisée bien plus dans des mosquées à Vénissieux, La Duchère, Bron, Saint-Fons ou Vaulx-en-Velin. Le danger serait de sacraliser toute information révélée par Wikileaks. D’ailleurs, de nombreux sites identitaires ou fascistes se sont immédiatement fait le relais de cette nouvelle.
Kabtane "très surpris"
Le recteur de ce lieu de culte, Kamel Kabtane, s'est dit "très surpris" de ces révélations. Il souligne les très bonnes relations qu'il entretient avec les autorités américaines, le consul venant chaque année rompre le jeûne du Ramadan à son invitation. "Comment se fait-il que les Américains soient plus forts que la police française qui n'est jamais intervenue chez nous ?", ironise-t-il, demandant à rencontrer l'ambassadeur américain. Kamel Kabtane reconnaît que Lyon a été identifié il y a quelques années comme une base de l'Islam radical voire terroriste, citant Khaled Kelkal, mais jamais la Grande Mosquée de Lyon.
Le recteur est aussi surpris de voir l'institut culturel islamique de Milan sur la liste. "C'est un centre qui rassemble surtout des convertis, des gens très posés, universitaires, médecins, chercheurs, que je connais bien". En revanche, l'observateur averti sera moins étonné de retrouver les mosquées de Londres, notamment la mosquée de Finsbury Park. C’est par elle qu’ont transité bon nombre d’apprentis djihadistes européens avant de se retrouver dans des camps d’entraînement au Pakistan ou en Afghanistan. Ce fut par exemple le cas des Lyonnais qui ont séjourné à Guantanamo, Nizar Sassi, Mourad Benchellali, mais également de Nabil Hadjarab. Ce Lyonnais de nationalité algérienne (dont le cas avait été révélé par Lyon Capitale, lire ici) a grandi du côté de Gerland et reste encore aujourd’hui prisonnier sur la base de Guantanamo.
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Le préfet a démenti dans un communiqué ces allégations. Ce sont des "rumeurs" qui n'étaient "absolument pas confirmées par les services en charge des questions de terrorisme". De plus, Jean-François Carenco a affirmé que Kamel Kabtane, recteur de la Grande Mosquée de Lyon était "un interlocuteur légitime et reconnu par les autorités du département du Rhône".
"La Grande Mosquée de Lyon ne saurait être considérée comme liée à une entreprise terroriste, a-t-il conclu. Si cette rumeur devait participer à un amalgame entre une religion ayant toute sa place dans la République et des terroristes reconnus et poursuivis comme tel, elle serait en tous points condamnable".
Pour aller plus loin: Lire l'enquête du mensuel Lyon Capitale (voir ici) sur la mosaïque de l'islam à Lyon. En vente chez votre marchand de journaux jusqu'à vendredi.
Lire aussi : Un Lyonnais est toujours détenu à Guantanamo
Cela fait peur...