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La mariée devait-elle se dévoiler ?

Le 9 juin, l'adjointe au maire du 9e arrondissement a demandé à une jeune femme de relever sa "voilette" pour procéder à son mariage. "Une interprétation abusive de la loi qui n'est pas acceptable", réagit Kamel Kabtane, recteur de la Grande Mosquée de Lyon.

Le 9 juin dernier, Samira et Ali (1) se disent oui, à la mairie du 9e arrondissement. Pourtant, à la sortie, la jeune femme est en pleurs. Les deux époux fulminent contre l'adjointe qui, quelques instants plus tôt, a demandé à la mariée de relever son voile au moment de la lecture du Code Civil.

Benhamed ()

"Respecter les lois de la République"

"Je les fais toujours se découvrir, qu'elles portent une voilette ou un chapeau", précise Fatiha Benahmed, également conseillère régionale (Europe Ecologie-Les Verts, photo ci-contre). Une requête destinée à vérifier l'identité de la jeune femme. Durant la cérémonie, le malaise était perceptible : l'époux garde le regard baissé et refuse à la fin de serrer la main à l'élue. "Ma religion me l'interdit", lui expose-t-il. "Nous avons la même religion, je pourrais être votre mère", réplique Fatiha Benahmed. Pour elle, elle a simplement "fait respecter les lois de la République".

La circulaire du 22 juin 2010 précise que les futurs époux doivent présenter une pièce d'identité avant leur mariage. Mais cet acte "ne dispense pas l'officier de l'état civil de vérifier visuellement l'identité des époux ainsi que des témoins". "Par conséquent, le port d'une pièce vestimentaire dissimulant le visage d'un des futurs époux ou d'un témoin, quelle ait une vocation religieuse, traditionnelle ou décorative, ne permet pas à l'officier de l'état civil de contrôler le consentement des époux ni de s'assurer de l'identité", précise le texte. Etait-ce le cas le 9 juin ? Le visage était-il réellement dissimulé au point de ne pouvoir procéder à la vérification de l'identité de l'épouse ?

L'élue "a gâché le plus beau jour de leur vie"

kabtane ()

"C'est une interprétation abusive de la loi qui n'est pas acceptable", réagit Kamel Kabtane, recteur de la Grande Mosquée de Lyon (photo ci-contre). Pour lui, "la multiplicité des lois contre les musulmans fait que même les élus se perdent en conjecture". La coordination contre le racisme et l'islamophobie (CRI) prend aussi l'affaire au sérieux. Son président Abdelaziz Chaambi, voit dans la requête de l'adjointe un "zèle islamophobe". "On ne peut quand même pas me taxer d'islamophobie !", s'exclame l'élue, musulmane issue d'une famille pratiquante. Un argument balayé par Abdelaziz Chaambi qui connaît "des arabes et mêmes des musulmans islamophobes".

"Cette attitude a gâché le plus beau jour de leur vie", tempête le CRI. Et demander "des excuses publiques" de la part de Fatiha Benahmed et qu'elle soit démise de ses fonctions. Le maire, Alain Giordano, adopte pour l'heure une attitude prudente. Il a commandé à ses services un rapport sur les événements. "J'attends de voir le détail de ce qui s'est passé", explique-t-il, notant ne pas avoir reçu de plaintes de la part des mariés. "Si l'ovale du visage est reconnaissable, on n'avait pas besoin d'aller plus loin", reconnaît l'édile. Une constatation qui est laissée à l'appréciation de l'officier d'état civil. D'ailleurs, les deux maires d'arrondissement que nous avons contactés et qui célèbrent souvent des mariages n'ont pas la même position face à ce cas.

chaambi ()

Ce mardi, l'élu a cependant renouvelé dans un communiqué "son soutien et sa confiance" à Fatiha Benahmed, communiqué co-signé avec le groupe Europe Ecologie de Lyon. Lequel poursuit : "Les accusations sont colportées par ceux-là mêmes qui, il y a quelques semaines invitaient des représentants du Hezbollah et du Hamas à Lyon", visant Abdelaziz Chaambi (photo ci-contre) qui n'avait pu finalement tenir sa réunion publique, faute d'autorisation. Les écologistes voient dans sa réaction "une tentative de déstabilisation contre les élus qui ont à charge de faire respecter la Loi et l'esprit de la République".

Le maire assure qu'il "prendra ses responsabilités", sans préciser si la tête de l'adjointe était en jeu. Il tient pour l'heure à relativiser les faits. Les deux époux ne comptent pas s'exprimer, ne souhaitant pas s'exposer.

(1) Prénoms d'emprunts

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