Le géant du lait français déverse ses eaux usées dans l’Isère

À Saint-Just-de-Claix, l’usine L’Etoile du Vercors, filiale du premier groupe laitier mondial, Lactalis, déverse dans l’Isère une partie de ses eaux usées, soit l’équivalent de la consommation d’une ville de 10 000 habitants.

L'entreprise Etoile du Vercors à Saint-Just-de-Claix

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L'entreprise de la filiale de Lactalis, Etoile du Vercors, à Saint-Just-de-Claix

Près de 200 salariés, un chiffre d'affaires de plus de 29 millions d'euros en 2015 et des milliers de litres d'eaux usées rejetés dans l'Isère depuis près de vingt ans. Bienvenue à l'usine de L'Etoile du Vercors, à Saint-Just-de-Claix, là où sont conçus par milliers les saint-marcellins et saint-féliciens typiques de la région. Révélée par France 3, la situation est à peine croyable. Alors qu'une vingtaine de communes ont investi dans un réseau public d'assainissement d'eau auquel l'entreprise voisine, Saint-Jean, s'est raccordée sans peine, L'Etoile du Vercors refuse de le faire. Pourtant, depuis 2014, ce réseau arrive devant sa porte. En plein travail pour créer une nouvelle station d'épuration, l'intercommunalité avait obtenu en 2000 un accord de l'entreprise et prévu l'investissement en fonction de ce dernier. Seul problème : l'usine n'appartenait pas encore à Lactalis, qui a racheté L'Etoile du Vercors en 2012. "Au départ, nous avons essayé de renégocier sur l'aspect financier, explique le maire de Saint-Just-de-Claix, Joël O'baton. Nous avons descendu les prix au plus bas avec eux, mais on ne peut pas faire non plus deux poids deux mesures par rapport au prix que paye l'entreprise Saint-Jean pour le traitement de ses eaux usées. Et puis, les particuliers aussi payent leur droit d'entrée au réseau d'assainissement, pourquoi Lactalis aurait un tarif préférentiel ?"

“On marche sur la tête”

Aujourd'hui, plus question de négociation, les relations entre la multinationale et la mairie n'existent plus. Chaque année depuis 2014, année de mise en service du réseau d'assainissement payé par l'intercommunalité, trois permis de construire ont été réclamés par Lactalis, qui souhaiterait pouvoir "garder la main sur leur outil de travail". Chaque demande pour construire une station d'épuration propre à l'entreprise sera rejetée par la mairie, notamment parce que Lactalis envisage de la construire tantôt en bordure, puis en plein milieu d'"une zone agricole". Face au refus d'accorder un permis de construire par la mairie, la multinationale fait des recours au tribunal administratif. Aujourd'hui, ce dernier va juger le premier refus de la mairie au géant du lait, survenu il y a près de trois ans. "Cela commence à nous coûter cher au niveau juridique, déplore le maire, Joël O'baton. Et surtout aux vingt communes de l'Isère et de la Drôme qui ont investi et qui payent la station." Pendant ce temps, les eaux usées s'écoulent encore dans l'Isère. Pour le maire de Saint-Just-de-Claix, ancien fromager, "on marche sur la tête". Surtout qu'un précédent de la multinationale Lactalis lui reste en mémoire. En Bretagne, cet été, un incident lié à la saturation d'une station d'épuration détenue par Lactalis a entraîné la pollution au lactose de la rivière de la Seiche, tuant près de 4 tonnes de poisson.

Une plainte de la Frapna

"Je ne veux pas risquer qu'il se passe la même chose qu'en Bretagne", déclare Joël O'baton. Si les relations avec la direction de l'entreprise sont au point mort, l'ancien fromager reste en contact avec des ouvriers de l'usine, d'autant plus qu'il connaît bien leur travail pour l'avoir effectué pendant des années. "Le lactosérum qui est issu du fromage est évacué vers des porcheries, mais la dernière partie du sérum et les morceaux de caillé tombent dans l'Isère avec, aussi, les produits de nettoyage et de désinfection qu'ils doivent sans doute utiliser. Selon moi, ce qui est le plus inquiétant dans ces déversements, ce n'est pas ce que l'on voit, mais ce qu'on ne voit pas", estime le maire de Saint-Just. Il y a quelques mois, la Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature (Frapna) a déposé plainte contre Lactalis dans l'espoir que les eaux usées de sa filiale L'Etoile du Vercors cessent d'être déversées dans l'Isère, comme c'est le cas depuis près de vingt ans.

Localisation de l'usine l'Etoile du Vercors, au bord de l'Isère

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Localisation de l'usine l'Etoile du Vercors, au bord de l'Isère

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