Surprenant. La clinique du Tonkin et les quatre établissements mutualistes de l’agglomération lyonnaise vont s’allier pour créer une grande clinique de 700 lits dans le Nord-Est de Lyon. Si le lieu n’est pas encore choisi, il y a une chance sur deux que l’implantation de cette structure se fasse à Décines, où la Mutualité possède déjà un terrain. Villeurbanne pourrait alors perdre son unique service d’urgences et sa maternité. Explications.
Villeurbanne va-t-elle perdre sa clinique du Tonkin ? Ce scénario pour le moment hypothétique pourrait pourtant se réaliser. A l’origine du déménagement probable de la clinique, deux vieux projets qui se rencontrent, deux serpents de mer de la rénovation hospitalière qui ne font désormais plus qu’un. La clinique du Tonkin et les quatre établissements de la Mutualité vont en effet créer une hyperstructure commune, une clinique de 700 lits. Une alliance surprenante pour ces deux établissements privés dont l’un est à but lucratif et l’autre, non lucratif. Mais une nécessité après que chacun d’eux se soit vu refuser son projet de reconstruction.
Une union de circonstance
Fin 2011, le groupe d'établissements de santé Capio, avait présenté à l’Agence Régionale de Santé (ARS), un projet concernant son site du Tonkin, dont la rénovation avait débuté mais avait dû être interrompue, jugée trop longue et trop coûteuse. Idée avait alors été lancée de reconstruire. Projet rejeté par l'ARS.
La Mutualité, de son côté, souhaitait rassembler ses quatre entités de l’agglomération (clinique du Grand large, clinique mutualiste, clinique de l’Union et établissements de la Fougeraie et des Ormes), sur un même site à Décines, dont elle avait déjà fait l’acquisition et réalisé la dépollution. Cela faisait plusieurs années que le groupe mutualiste courrait après les financements. Comme pour le Tonkin, refusé.
L'ARS avait alors jugé que les deux projets présentaient "une faible efficacité en terme de recomposition de l’offre de soin et de trop gros risques financiers" . Il faut dire que l’institution a lancé depuis plusieurs mois un plan de réduction drastique du nombre de lits proposés dans l’agglomération, notamment en chirurgie, motivée par l'explosion de la chirurgie ambulatoire où le patient est opéré et ressort le jour même. Seule solution pour les deux groupes afin de pouvoir faire évoluer leurs établissements : présenter un projet commun qui réduirait la capacité d'accueil totale des établissements. Mais si du côté de l’ARS on prétend que cette idée "est venue spontanément des deux établissements", il est plus juste d’affirmer que ce sont bien les circonstances qui les ont poussés à fonctionner main dans la main. Car en réduisant de 150 le nombre de lits sur l'ensemble du projet, les deux groupes s'assurent le soutien et l'aide financière de l'Agence.
Villeurbanne ou Décines
Mais si cette union sera prochainement actée, restent encore de nombreuses questions en suspens. La première d’entre elles étant le lieu d’implantation de ce futur ensemble. Si la Mutualité souhaiterait voir cette nouvelle clinique sur son grand site de Décines, Capio, de son côté, reste attaché à Villeurbanne. Mais où construire cet établissement avec une telle densité urbaine ? Un site appartenant au Grand Lyon a été trouvé, à proximité immédiate du boulevard Laurent Bonnevay, à quelques encablures à peine de l’hôpital neurologique. Mais l’emplacement reste beaucoup plus petit que l’ancien site Archémis à Décines dont la Mutualité est déjà propriétaire depuis plusieurs années.
"L’ARS n’interviendra pas dans ce choix qui revient aux deux groupes. Villeurbanne ou Décines, peu importe du moment qu’il s’agit d’une offre structurée autour du Nord-est de Lyon où l’accès au soin peut être équilibré et assuré avec une maîtrise du reste à charge pour les patients", juge l’ARS. Mais d’après une source qui suit le dossier de près, Capio, qui avait pourtant affiché une volonté féroce de rester sur son secteur, commencerait à céder aux sirènes du site décinois. Pour finir de convaincre son partenaire de quitter Villeurbanne, la Mutualité pourrait même lui céder gracieusement une partie de son terrain. Mais rien n’est encore décidé.
Quid des urgences et de la maternité ?
Mais les jeux ne sont pas encore faits non plus sur le partage des activités. "A priori la chirurgie devrait revenir aux équipes du Tonkin et la médecine et les suites de soin à celles de la Mutualiste", affirme la même source. Certaines activités de consultations pourraient être maintenues dans le quartier du Tonkin, mais les urgences et la maternité seront intégrées dans le nouveau site. Si Décines est préférée, Villeurbanne, vingtième ville de France en termes de nombre d’habitants, perdrait alors son seul service d’urgences et son unique maternité. Début septembre, une importante réunion doit avoir lieu à l’ARS, qui devrait sceller un partenariat tripartite entre l’agence et les deux établissements. Capio et la Mutualité se laissent jusqu’au 30 octobre pour arrêter le lieu du futur établissement, mais d’ici là de nouveaux acteurs devraient entrer dans les négociations et faire pencher la balance.