Lyon : l'école Robert Doisneau mobilisée pour les enfants à la rue

Ce lundi soir, journée internationale des droits de l'enfant, un apéro partagé était organisé à l'école lyonnaise Robert Doisneau, afin de dénoncer les conditions de vie de onze élèves qui dorment actuellement dans la rue.

Devant l'école lyonnaise Robert Doisneau, ce lundi 20 novembre, journée internationale des droits de l'enfant, une banderole "Ici, des élèves dorment dehors. STOP !" a été tendue entre deux arbres. Onze enfants scolarisés à la maternelle ou en élémentaire sont concernés, soit six familles. Du monde commence à affluer, l'apéro partagé organisé par le comité de soutien aux familles en difficulté commence vers 17h45 devant les grilles de l'établissement scolaire.

"Ce ne sont pas des conditions de scolarisation normales, dénonce Mathieu, membre du comité. C'est d'autant plus révoltant qu'il existe des logements vides dans toute l'agglomération, dont certains appartiennent à la Ville de Lyon, même si ce n'est pas elle qui est directement responsable de l'hébergement d'urgence. Cette année par rapport aux précédentes, nous avons quand même des liens avec la municipalité qui assure un suivi des familles sans résultat à ce jour."

Et de poursuivre : "À l'heure des scandales sur la défiscalisation qui sortent tous les jours, on se dit qu'il suffirait que toutes les entreprises et tous les citoyens paient leurs impôts correctement, et que l'État fasse respecter cela, pour qu'il existe des budgets suffisants pour loger tout le monde."

Entouré de sa femme et de sa belle-sœur, Carol, 25 ans, les traits fatigués et emmitouflé dans des vêtements chauds, raconte que sa famille dort sous tente dans un parc depuis le 22 septembre. Arrivé à Lyon il y a environ trois ans, le jeune homme a deux enfants de 8 et 6 ans et sa belle-sœur, un garçon de 10 ans qui fréquente aussi l'école Robert Doisneau.

"J'aime bien venir à l'école"

"Les filles sortent le matin de la tente et me disent "Papa, il fait froid". C'est difficile !", confie Carol. Et d'évoquer la semaine dernière très pluvieuse. Il se fait pourtant un point d'honneur à amener ses enfants à l'école. Il loue également la gentillesse de la directrice et du personnel. Un peu intimidée, Sonia*, la plus grande de ses filles, ne souhaite, quant à elle, pas parler de leur situation mais préfère citer le prénom de ses amies rencontrées dans son établissement scolaire. "J'aime bien venir à l'école parce qu'ici, tu apprends des mots et à lire", précise-t-elle.

La petite aide financière que Carol perçoit pour ses filles passe dans l'achat d'habits pour elles. Il souhaiterait trouver "n'importe quel travail" et a déposé des CVs mais est pour l'instant obligé à faire la manche. Quant au 115, numéro d'urgence sociale, il l'appelle "jusqu'à deux fois par jour". Mais on lui propose seulement une place pour sa femme et lui.

Angela*, 10 ans, parle elle aussi du froid. Elle explique qu'elle dort dehors sans tente avec ses parents, son petit frère Angelo* de 3 ans et sa petite sœur de 6 ans. Ils bougent souvent et s'abritent où ils peuvent. Arrivés en France en septembre 2013, ils ont d'abord vécu sous tente puis dans un foyer pendant deux ans et sont à nouveau à la rue depuis environ un an et demi. Asthmatique, Angelo a été hospitalisé la semaine dernière et toute la famille est restée avec lui.

Indignée par cette situation, l'enseignante de la fillette décrit une enfant "très assidue, très volontaire et très bien intégrée". "Ces derniers temps, avec le froid, c'était difficile car elle était très malade. Elle arrivait le matin avec des yeux tout gonflés et de la fièvre", raconte-t-elle. Et d'insister : "Ses parents ont vraiment le souci qu'elle vienne à l'école et qu'elle travaille bien. Angela porte beaucoup, elle porte sa famille en fait, puisque c'est elle qui traduit lors des rendez-vous avec les parents. Et c'est même elle qui appelle le 115."

Soulagement

Les participants de l'apéro partagé rentrent vers 18 h dans le gymnase de l'école Robert Doisneau afin de discuter en assemblée générale de la suite de la mobilisation. Les deux policiers municipaux qui se tenaient devant l'établissement scolaire, présents pour "la sécurisation" selon leurs dires, les suivent mais les laissent se réunir. Les militants décident finalement d'occuper l'établissement scolaire à partir de ce mardi soir pour héberger les familles. Lundi soir, trois familles avaient accepté la proposition.

Même s'il a peur d'être expulsé, Carol est soulagé de savoir qu'il pourra mettre sa famille à l'abri ce mardi soir. "C'est quelque chose de très important pour les enfants et pour nous, assure-t-il. Ma fille est très contente et j'ai vu qu'elle rigolait."

Les militants et les familles quittent l'école en début de soirée. Sur le trottoir, avant de repartir chacune de leur côté, Angela et Sonia s'étreignent. "À demain ma chérie !"

*Ces prénoms ont été changés.

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