"Pas d’esprit de vengeance chez les chrétiens d’Irak"

Le cardinal de Lyon est rentré ce vendredi de son voyage en Irak. Il y a rencontré des milliers de chrétiens en exode qui lui ont confié leurs histoires et leurs interrogations. Le primat des Gaules affirme que malgré les événements, aucun chrétien n’a été tué à Mossoul.

"Il y a de la désolation, de la tristesse mais aucun désir de vengeance chez les chrétiens délogés de Mossoul". C’est ce témoignage que le cardinal a tenu à apporter ce vendredi, à l’occasion d’une conférence de presse, quelques heures seulement après son retour d’Irak. Mgr Barbarin, à l’initiative de ce déplacement, avait obtenu l’appui du Vatican et a donc pu effectuer ce voyage accompagné de Mgr Dubost, évêque d’Evry et du directeur de l’œuvre d’Orient, Mgr Gollnisch.

Une centaine d’histoires

Sur place, la délégation a rejoint le patriarche des chaldéens, Mgr Louis Raphaël Sako. "Ma seule exigence était que nous rencontrions le moins possible de ministres, d’élus et d’officiels pour laisser le plus de place possible à des temps d’échange avec la population. Et de ce côté-là, tout a été parfait", assure le cardinal. "Le principal, l’essentiel, c’est de créer du contact humain", glisse-t-il en même temps qu’il raconte les histoires de ces chrétiens expulsés.

Des familles perdent tout, un jeune couple dont le mariage célébré en mai n’a pas pu être enregistré à l’état civil, un homme délogé pour la cinquième fois de sa vie, un autre à qui on a voulu prendre l’enfant à un check-point... "Nous en avons peut-être entendu une centaine, je les ai notées. C’est ce qu’il y a de plus précieux pour moi", appuie le cardinal qui s’émeut de voir que, malgré les conditions, "aucun chrétien n’a abjuré sa foi comme le réclamaient les combattants de l’Etat islamique". Grand soulagement pour l’archevêque de Lyon, "aucun catholique n’a été tué à Mossoul". Un homme musulman, docteur en droit à l’université de Mossoul, a toutefois perdu la vie pour avoir marqué son opposition à l’expulsion des chrétiens de la ville, rapporte Natalia Trouiller, directrice de la communication du diocèse, également présente lors du voyage.

Fraternité

Mais de quoi ont besoin ces chrétiens expulsés aujourd’hui ? "De fraternité" assure Mgr Barbarin qui a annoncé un jumelage entre le diocèse de Lyon et celui de Mossoul. "L’argent que nous avons apporté est une aide d’urgence, il nous permet de veiller à ce que les enfants puissent faire la rentrée dans de bonnes conditions, il permet de venir en aide aux personnes dans des situations précaires" explique-il, citant en exemple une famille réfugiée qui vit à 24 personnes dans une petite salle de classe de la ville d’Erbil.
Quant à la possibilité d’accueillir les chrétiens d’orient en France, l’archevêque de Lyon semble plutôt critique. "Il faut tout faire pour que les chrétiens d’Irak puissent rester en Irak où ils ont leur place", insiste-il. Et de raconter que le consul de France à Erbil, lui-même, se demandait qui accueillerait ces gens et comment on pourrait les identifier, "eux qui n’ont même plus de papiers".

10 mosquées détruites à Mossoul

"Il ne faut pas se dire que les chrétiens de Mossoul, c’est fini", affirme Natalia Trouiller. "Mais certains disent ‘on y arrivera plus’", oppose le cardinal. Pourtant, la directrice de communication du diocèse sent un frémissement dans la population sunnite de Mossoul qui prend semblerait prendre ses distances avec le calife depuis qu'il a annoncé, selon elle, qu’il souhaitait "détruire le tombeau du Prophète, puisque c’est assimilé à de l’idolâtrie". "Dix mosquées ont déjà été détruites à Mossoul", rapporte d’ailleurs le cardinal. Quant à la cathédrale de la ville, personne ne sait vraiment… Même si des témoignages affirment qu’elle est partie en flammes, tout comme l’évêché.

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