Sanofi a reconnu un "échec" dans le développement de son vaccin anti-Covid
Siège mondial de Sanofi-Pasteur à Gerland© Camille Padilla

Sanofi : la cession du site de Vertolaye se précise pour les syndicats

Les syndicats du site Sanofi de Vertolaye, dans la vallée de la Dore, s’inquiètent depuis septembre de voir l’avenir de l’entreprise compromis par des restructurations. Leurs craintes auraient été confirmées jeudi dernier. D’après leurs informations, le groupe pharmaceutique semble bien décidé à vendre la filiale, contrairement aux dires de la direction.

Sanofi se sépare de "son activité tiers"­­. D’après l’intersyndicale (CGT, CFDT, FO, Sud) de l’entreprise de Vertolaye (Puy-de-Dôme), c’est ce qu’aurait laissé entendre le directeur général du groupe pharmaceutique, Olivier Brandicourt le 23 février lors d’un comité de groupe France. Cela impliquerait donc la cession du site, une information que Sanofi réfute.

L’entreprise Sanofi de Vertolaye fabrique des principes actifs principalement vendus à des tiers. Le 1er janvier dernier, le site de Vertolaye, comme ceux d’Elbeuf en Seine-Maritime et d’Ujpest en Hongrie, s’est vu intégrer l’entité autonome Cépia, qui rassemble les activités de développement, commerciale et de production des principes actifs dédiés aux clients tiers. Sanofi avait décidé de scinder son activité chimie en deux : celle pour son propre compte et celle pour ses partenaires. Depuis, l’intersyndicale du site de Vertolaye s’inquiétait d’une possible cession ou fermeture de l’entreprise. La direction les avait rassurés en précisant qu’il n’y aurait aucune conséquence sur les effectifs, quelle que soit la décision prise pour l’avenir de l’entité.

Ce que Sanofi maintient aujourd’hui : "Olivier Brandicourt n’a rien confirmé. Concernant l’entité Cépia, l’étude est en cours et trois options sont envisagées dont la cession, la co-entreprise ou le maintien au sein de Sanofi", a assuré Nicolas Kressmann, des relations presse de Sanofi.

L’avenir du site déjà tracé ?

Pour les syndicats, l’avenir du site est déjà tracé, d’autant plus qu’il s’agit d’une inquiétude nationale. Bien que le groupe Sanofi n’ait pas encore donné sa réponse officielle, il souhaiterait céder son "activité tiers", ainsi que la société Zentiva qui s’occupe des médicaments génériques Europe. "Sanofi joue sur les mots, elle étudie la vente, ça veut donc dire que les entreprises vont être cédées", a déclaré l’adjoint délégué syndical central CGT, Jean-Louis Peyren.

Au-delà du site de Vertolaye, c’est tout le groupe Cépia qui est concerné par la cession, et également les autres entreprises de chimie de Sanofi, dont les sites de Ploërmel en Bretagne, de Vitry et Antony en Ile-de-France, de Sisteron en Paca, d'Aramon en Occitanie et de Mourenx en Aquitaine.

Avec cette possible mise sur le marché, qui serait négociée par la banque Messier & Associés, l’intersyndicale de Vertolaye a peur que le repreneur ne soit pas à la hauteur des besoins du site. "Vertolaye a besoin d’équipements de qualité, qui doivent souvent être renouvelés. Si c’est un laboratoire ou un fonds d’investissement qui récupère le site, il risque de se saisir de nos procédés et de nous laisser tomber par la suite", explique Frédéric Cubizolles, le délégué syndical CGT du site.

Quelle stratégie pour Sanofi ?

Auprès des syndicats, Sanofi reste évasif sur la raison de cette cession, prétextant "chercher une solution pour pérenniser l’avenir". Pourtant, le groupe se porte bien, l’entreprise de Vertolaye n’est pas en déficit. "L’activité tiers ne perd pas d’argent, mais elle ne fait pas assez de marge pour le groupe. Ils veulent augmenter leur profitabilité, quand on sait qu’en 2017 ils ont versé 3,5 milliards d’euros de dividendes", dénonce Jean-Louis Peyren.

Pour l’intersyndicale de Vertolaye, "Sanofi veut abandonner la chimie au profit de la biotechnique, plus prometteuse", suppose Frédéric Cubizolles. Sanofi est le seul fabricant européen de certains principes actifs, comme les corticostéroïdes (Solupred), avec pour concurrents la Chine et les Etats-Unis. "On fabrique des produits de qualité, d’intérêt public pour la santé. Le repreneur pourrait ne pas garder l’activité en France", déplore Frédéric Cubizolles.

Selon Sanofi, l’étude en cours concernant l’avenir des activités tiers s’effectue "dans un souci de développement de l’entité Cépia. Nous devons nous adapter aux évolutions du marché pour être compétitifs et attractifs", a déclaré Nicolas Kressmann, avant de répéter qu’il n’y aurait "aucun impact sur l’emploi quelle que soit la décision prise".

Mais les syndicats se méfient. "Sanofi se veut rassurant, mais on voit les signes. Depuis 2009, déjà 6 200 postes ont été supprimés suite aux restructurations. Quand Sanofi vend un site, le contrat veut que l’activité soit maintenue pendant cinq ans, ensuite le repreneur licencie. C’est ce qui s’est passé pour l’entreprise de Porcheville", assure Jean-Louis Peyren.

Des répercussions sur l’économie de la région

L’entreprise de Vertolaye, située en pleine zone rurale, emploie 860 salariés et permet de faire vivre la vallée de la Dore. "30 % des entreprises de la vallée travaillent pour Sanofi, si par effet de cascade le site ferme ce sont des entreprises en péril, des familles qui s’en vont, donc des fermetures de classes", s’inquiète Sylvie Monnet, de l’union locale CGT du bassin d’Ambert.

André Chassaigne, député (Gauche démocrate et républicaine) de la 5e circonscription du Puy-de-Dôme, dénonce dans un communiqué la stratégie de "ventes à la découpe" que Sanofi opère depuis 2009, qui "s’est déjà traduite par la fermeture de 15 sites”. “Cette stratégie n’a qu’un seul objectif, écrit-il, augmenter la profitabilité de l’entreprise pour distribuer toujours plus de dividendes aux actionnaires." Interpellé par l’intersyndicale en décembre dernier, André Chassaigne se mobilise pour que Sanofi conserve son activité. Il a d’ailleurs porté l’affaire devant la commission des affaires économiques sur "l’avenir de l’industrie du médicament en France" de l’Assemblée nationale le 15 février, en compagnie de Philippe Luscan, président de Sanofi en France.

L’intersyndicale de Vertolaye cherche aussi à interpeller Laurent Wauquiez et le conseil régional, sans succès. "La maire d’Ambert [qui est aussi conseillère régionale, NdlR] devait nous arranger un rendez-vous avec M. Wauquiez, mais celui-ci a préféré recevoir la direction de Sanofi Vertolaye. Et quand on contacte Laurent Wauquiez directement, il nous renvoie vers Myriam Fougère", explique Frédéric Cubizolles. L’intersyndicale dénonce une stratégie politicienne de la Région : "Ils veulent enterrer l’affaire. Myriam Fougère se présente aux législatives contre André Chassaigne", ajoute Frédéric Cubizolles.

Au niveau national, les syndicats cherchent aussi à mobiliser les élus, "mais ils sont tous en campagne. Personne ne s’intéresse à nous, pourtant on est la première entreprise du CAC 40", se désole Jean-Louis Peyren. Mais la CGT ne lâche rien : "Si, à l’issue de la décision, on n’a pas été écoutés par Sanofi, on mobilisera les salariés", annonce Jean-Louis Peyren.

La réponse officielle de Sanofi sera annoncée dans le courant du second semestre 2017. En attendant, une nouvelle réunion est prévue entre André Chassaigne et l’intersyndicale le 21 mars pour préciser les débats qui ont eu lieu lors de la commission à l’Assemblée nationale. Affaire à suivre, donc.

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