Le géant de l'événementiel est co-propriétaire du site référence de la Biennale d'art contemporain. Une rénovation vient d'être exécutée qui révèle les priorités de GL Events. Aux deux premiers niveaux, la culture cohabitera avec des événements corporate ou festifs. En haut, des bureaux et un club lounge.
Pour GL Events, la razzia continue. Déjà exploitant du centre des Congrès et d'Eurexpo, voici que le groupe événementiel prend possession d'un espace de 10.000 m2 en plein cœur de la Confluence, un lieu emblématique de la culture à Lyon : la Sucrière. La multinationale prend déjà ses quartiers avec une rénovation qui se termine le 18 juillet, avant le lancement de la Biennale d'art contemporain.
"La culture, ça coûte beaucoup"
Le constat est partagé : la Sucrière vivait peu. Quatre mois tous les deux ans lors de la biennale d'art contemporain, quelques soirées lors des Nuits sonores et lors d'expositions exceptionnelles, comme "Our Body". Un gros gâchis pour un bâtiment aussi riche, chargé d'âme. Deux possibilités s'offraient pour le relancer : le secours de la Ville de Lyon pour y abriter des artistes. Ou l'intervention d'un acteur privé qui chercherait un moyen de rentabiliser l'équipement culturel. Comme l'a expliqué Gérard Collomb ce lundi lors de la visite de chantier, "la culture, ça rapporte quelques fois, mais ça coûte surtout beaucoup". Un nouveau modèle a été imaginé, censé offrir un compromis entre animations artistiques et activités lucratives.
L'arrivée de GL Events résulte du choix du propriétaire initial, Rhône Saône Développement, filiale de Voies Navigables de France qui possédait l'ensemble du port Rambaud. Comme pour les Dock 40, Groupe 45 ou le siège du groupe Espace, voisins des lieux, l'établissement public s'est rapproché d'un investisseur occupant pour lancer la rénovation. En l'espèce GL Events. Une société civile immobilière a été créée en 2008, associant à parts égales les deux acteurs propriétaires. Le chantier a ainsi pu commencer sans attendre la commercialisation des bureaux. "Notre objectif, c'est que ce bâtiment vive 18h/24", indique Serge Grzybowski, président directeur d'Icade, le promoteur.
Vice-président au Grand Lyon en charge de l'aménagement des fleuves, Roland Bernard insiste sur cette nouvelle forme de collaboration entre le privé et le public. "Quand le privé accompagne avec force la volonté politique, c'est tout le territoire qui est gagnant", soutient-il. PDG de GL Events, Olivier Ginon (à droite sur la photo ci-dessus) défend son arrivée - forcément polémique alors que son groupe est déjà en situation de quasi-monopole dans l'agglomération. "Une ville doit-elle s'ouvrir sur l'extérieur ou se refermer sur elle-même ? Est-il intéressant d'utiliser un leader européen pour vendre la destination lyonnaise ?". Selon lui, les principales métropoles s'appuient un opérateur unique, tel Viparis qui gère Villepinte, la porte de Versailles, le Cnit à la Défense et le Carrousel du Louvre.
Une nef centrale où "on pourra suspendre des voitures"
L'utilisation des espaces intérieurs traduit cette intervention privée. Dans sa nouvelle version, la culture est rapatriée aux deux premiers niveaux. Et encore est-elle amputée d'une bonne partie du 1er étage, ouvert dans sa partie centrale pour aménager une énorme nef, de 42 mètres de long, de 14 mètres de large qui accueillera des œuvres monumentales. "On pourra suspendre des voitures", précise l'architecte, William Vassal (cabinet Z architecture). A part la Biennale et les Nuits sonores, cet espace dédié à la culture recevra des salons de niche, des événements corporate de grandes entreprises, des défilés de mode, des galas de prestige ou des ventes aux enchères de haut niveau. Olivier Ginon promet qu'il n'y aura pas "des opérations trop commerciales". Il évoque la possibilité d'accueillir des expositions exceptionnelles d'autres musées.
Le 2e étage, utilisé lors des dernières Biennales, est transformé en bureaux qui couvrent 3000 m2 du total. Ceux-là sont particulièrement bichonnés : ils comportent des loggias ouvertes sur la Saône et couvertes d'un plafond incliné en inox (photo ci-dessous). Elles peuvent servir de salles de réunion à la belle saison. "On se croirait comme à un balcon au théâtre, avec la Saône en scène", commente un visiteur. Au-dessus, un attique a été dressé qui hébergera quelques bureaux et surtout un club lounge d'une capacité de 800 personnes, avec une terrasse exceptionnelle tout autour. Les bureaux seront loués à un prix fort, équivalents à la Cité Internationale.
Si les agencements intérieurs trahissent l'introduction d'acteurs privés, le bâtiment conserve de l'extérieur ses atours actuels. Sa rénovation ne le dénature pas, à commencer par sa façade à l'esprit Woodstock, maintenue en l'état. "On travaille en opposition avec ces bâtiments modernes autour. On vient un peu s'encanailler à la Sucrière", plaisante William Vassal qui avait piloté la rénovation des Subsistances. A l'intérieur sont conservées les hélices qui servaient à faire glisser les sacs de sucre de 100kg.
Avec la Sucrière, nous assistons a un énième épisode du feuilleton vedette de la vie économique lyonnaise : 'main basse sur la ville', une coproduction Collomb-Ginon. Tout ceci va beaucoup trop loin et le pigeon final, c'est le contribuable lyonnais qui paye. A plus long-terme, c'est toute l'agglomération qui sera perdante car la situation monopolistique de GL EVENTS lui permet de pratiquer une politique de prix prohibitifs et de services de piètre qualité. Résultat : les grands acteurs de l'événementiel se détournent de Lyon qui sera bientôt une 'cite mal famée' dans l'univers événementiel ... Si Collomb s'était montre moins complaisant avec Ginon, s'il lui avait demande moins de 'petits services entre amis', on n'en serait pas la. Dans cette affaire, ce qui est contestable, ce n'est pas la DSP vers le prive, c'est le favoritisme ...