Kraftwerk
© Daniel Boud

Kraftwerk, les pionniers de l’électro aux Nuits sonores

Avec un concert très spécial en 3D, c’est Kraftwerk, pionnier allemand de la musique électronique et grand rénovateur de la musique tout court, qui clôturera les Nuits sonores à Lyon cette année. La preuve que le meilleur moyen de ne pas vieillir est encore d’être un homme-machine.

En concert, quand ils reprennent leur traditionnel et mythique Radioactivity, les hommes-machines répètent traditionnellement la liste noire des grandes catastrophes nucléaires : “Tcher-no-byl, Har-ris-burg, Sel-la-field”. Depuis quelque temps, au moment de conclure ce drôle de couplet, “Fukushima” vient faire la rime, terrible, avec “Hiroshima”. Savaient-ils, les Allemands, au moment d’écrire ce titre, qu’ils pourraient régulièrement ajouter des noms à cette terrible énumération ?

À l’époque de Radioactivity (1976), en dehors du bombardement d’Hiroshima et du premier accident de Sellafield/Windscale, aucune de ces catastrophes n’avait eu lieu – Harrisburg ouvrirait le bal trois ans plus tard avec la centrale de Three Mile Island. Cela montre à quel point Kraftwerk, en plus de sa longévité, fut visionnaire.

Dès sa formation, en 1970 par Florian Schneider et Ralf Hütter (le reste du groupe sera à géométrie variable), Kraftwerk a été l’un des rares groupes à être immédiatement influent – la trilogie berlinoise de Bowie et Joy Division, pour ne citer que ces deux exemples, leur doivent quelques chandelles. Boucles rythmiques, utilisation révolutionnaire des synthétiseurs, reconstitution de paysages sonores, Kraftwerk ouvre la voie à toute une armée de suiveurs fascinés. Même les punks qui méprisent ouvertement l’ensemble de la planète rock roulent de grands yeux devant ces Allemands à l’esthétique très affirmée. C’est cette rencontre avec les jeunes coqs à guitares déchirées et la martialité électro de Kraftwerk qui fera notamment naître la cold et la new waves, quand il sera établi que le punk est une blague qui n’a que trop duré.

Autobahn

Dans le même temps, Kraftwerk ouvre une gigantesque autoroute, symbolisée par l’album et le single éponyme Autobahn, à ce qui deviendra la musique électronique. Les “hommes machines” célèbrent le progrès et la modernité, sans occulter son aspect glacial – Schneider et Hütter ont grandi dans ce grand parc industriel qu’est la Ruhr d’après-guerre –, l’avènement de l’ère numérique aussi, tout en dénonçant avec ironie l’aliénation/déshumanisation qu’elle engendre – comme lorsqu’ils se font remplacer sur scène par des sosies.

Mais, alors que les groupes aussi influents se contentent généralement d’un statut culte tardif et de ventes nulles durant leur temps d’exploitation (cf. le Velvet Underground), le tour de force des laborantins de Kraftwerk est de faire entrer la musique expérimentale dans les charts : l’album Autobahn est dans le top 5 aux États-Unis et en Grande-Bretagne en 1975, le single Radioactivity atteint un million d’exemplaires dans le caniculaire été 1976 et l’album The Man Machine, en 1978, 200 000 exemplaires. Des chiffres inatteignables aujourd’hui pour un tel groupe. Signe que l’époque, dans sa troublante continuité, a tout de même changé au fur et à mesure que Kraftwerk continuait de réciter l’annuaire de l’apocalypse.

Kraftwerk – Concert spécial en 3D. Dimanche 1er juin à 20h30, à l’ancien marché de gros (Lyon 2e). Dans le cadre des Nuits sonores 2014.

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Lire aussi : “Nuits sonores 2014 : sélection lyonnaise émergente”

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