Alors que toute la famille socialiste semble s'être réconcilliée, le maire de Lyon, qui avait vivement critiqué son parti pendant les européennes, veut conserver sa liberté de ton. Le PS bouge mais pas forcément assez vite pour lui.
Qu'avez-vous pensé du discours de Martine Aubry vendredi ?
Je crois qu'elle a été entraînée par un mouvement de fond. On avait bien vu qu'elle n'était pas la plus chaude partisane des primaires ouvertes. Elle a été obligée d'emboîter le pas. Ma motion avait proposé des primaires ouvertes dès le Congrès de Reims. C'est le seul moyen de séparer le problème des présidentiables du projet de société. Je veux que le PS viennent sur mon terrain. Aubry est devenu collombiste. Encore six mois et elle me demande d'être candidat à la présidentielle. C'est cela qui m'inquiète (rires).
Et quand Martine Aubry a promis le non cumul des mandats, avez-vous grincé des dents ?
On verra au mois d'octobre (lors de la consultation des militants, ndlr). Chacun fera comme il voudra mais si, pour les régionales, nous devons présenter des têtes de listes qui n'exercent qu'un mandat, il risque d'y avoir de la déperdition. Si Jean-Jack Queyranne n'y va pas, il faudra lui trouver un remplaçant. Et la politique, ce n'est pas comme un leg testamentaire, on ne se refile pas le mistigri comme ça. Pareil si on ne veut pas que je sois maire de Lyon, il faut me le dire. Cela fait 20 ans que j'entends parler du non cumul des mandats. Plus vous gagnez d'élections, plus vous cumulez. Quand vous gagnez, vous gagnez. Si demain on perd les régionales, on dira vivement le cumul des mandats. La position de Martine Aubry est un peu démago mais elle était dans une situation difficile. Moi aussi, je peux faire un tabac dans une salle sur le non cumul des mandats. Mais après c'est plus difficile à tenir.
Le PS pouvait imploser lors de cette université d'été, finalement l'heure n'est-elle pas à l'apaisement ?
Cela aurait pu être une catastrophe suprême mais nous n'en sommes qu'au début du chemin. C'est plutôt sympa. Il y a de l'ordre dans la cuisine, maintenant il faut regarder le menu que l'on prépare.
Vous-même êtes moins critique sur le PS. C'est un effet La Rochelle ?
J'ai critiqué la ligne politique mais je n'ai jamais dit du mal de Martine Aubry. Des fois, je suis en désaccord politique avec le PS. Quand on fait de la politique, c'est mieux d'avoir des idées. Je suis un homme libre dans mon parti. Je suis comme je suis. Je n'ai personne à consulter avant de parler. Il n'y a que ma motion qui n'est pas dans la direction du parti. Il y a tout le monde pourtant dans le machin. Solférino, c'est un musée zoologique. De temps en temps, la ligne claire (sa motion au Congrès de Reims) vient le visiter.
Comment avez-vous trouvé le discours de Ségolène Royal, que vous aviez soutenu en 2007 ?
Son discours était bien pour des régionales, mais pour une ancienne ou une future candidate à la présidentielle cela m'inquiète. J'aurais pensé qu'elle tiendrait un discours moins de présidente de région et plus national ou international. Elle a raccourci la portée de son discours. C'est la paix des braves. Après, quand elle envoie bouler la taxe carbone, je ne suis pas sur qu'elle ne dise pas une connerie.
Comment avez-vous réagi au propos de Martine Aubry qui demande à François Bayrou de faire ses preuves ?
Et qui note la copie ? On va faire une commission qui réunit tous les courants du PS pour faire une moyenne ? Cette histoire ne tient pas la route. Bayrou a été avec Balladur à une époque, mais depuis deux ans il est bel et bien dans l'opposition. Personne ne soupçonnerait Eric Besson de rouler contre Sarkozy. Les régionales vont apporter la preuve par le fait de la position de Bayrou. En 2007, avec Rebsamen, j'étais allé voir Ségolène Royal pour lui dire : " va voir François Bayrou ". Si on fait une primaire, c'est pour rassembler. On ne peut pas dire qu'on va la faire sans celui-là ou celui-ci. Si François Bayrou peut gagner ces primaires ouvertes alors cela veut dire que le PS est très mal. Et il vaut mieux en prendre acte maintenant qu'en 2012. Je suis pour une alliance du PCF au MoDem. Comme pour le cumul des mandats, il va falloir dire en Ile-de-France, pour les régionales, qu'il faut battre Pécresse mais sans faire avec le MoDem. On finit toujours par être rattrapé par la réalité.
Marie-Georges Buffet, la secrétaire nationale du Parti Communiste, n'est pas partante pour des primaires ouvertes à toute la gauche...
Ce que dit Buffet, on s'en fout. La dynamique de rassemblement va dépasser les individus. Bon gré mal gré, tout le monde sera obligé d'entrer dans cette dynamique.
Qui a gagné la guerre interne entre les quadras et les éléphants du PS ?
C'est comme à la bourse. Tant que l'on n'est pas sorti du marché, on n'a pas perdu. Les quadras ont fait un bon coup puisqu'ils ont fait bouger la direction, même si ce serait mieux que la direction mute d'elle-même. Je pense que l'on n'est pas tout à fait sorti du congrès de Reims.
Propos recueillis, à La Rochelle, par Paul Terra
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