Le jeune milieu de terrain Nabil Fekir, 20 ans, au parcours atypique, est l’une des révélations de la classe biberon lyonnaise.
À l’heure de dresser son portrait, Nabil Fekir doit avant tout mettre fin à une fausse information. Sur Internet, de nombreux articles ayant trait à son parcours relatent le départ du joueur de l’Olympique lyonnais pour Saint-Priest. En réalité, après avoir passé deux ans au sein de la préformation de l’OL, il n’est pas conservé et repart dans son club de toujours : le FC Vaulx-en-Velin, où évoluent toujours ses trois petits frères. Trois ans après, il rejoint Saint-Priest et joue en U19 nationaux. Auteur d’une belle saison, il est de nouveau recruté par l’OL. Cette saison, ce fan de Zinédine Zidane – comme le célèbre numéro 10, Nabil Fékir a des origines kabyles – a intégré le groupe professionnel. Retour en arrière. “Depuis tout petit j’aime le foot, confie-t-il. C’est mon père, qui est un fan de ce sport, qui m’a donné le goût. J’ai débuté à l’âge de 5 ans à l’AS Tonkin et j’ai plus quitté les terrains (sourire).” Son père, Mohamed, bénévole au FC Vaulx, a un souvenir très précis des premiers pas de son fils avec un ballon rond. “À 4 ans, je l’emmenais au parc de la Tête-d’Or et il aimait déjà jongler. Cela amusait beaucoup les passants”, se remémore-t-il tout sourire.
Recalé par l’OL, retour par la grande porte
Doué balle au pied, Nabil Fekir intègre donc la préformation de l’OL. Mais il ne sera pas gardé par le club lyonnais. “J’avais une blessure [Osgood-Schlatter, une infection du genou, NdlR] qui m’a handicapé sept mois, précise-t-il. Sur le coup, j’étais déçu. Mais j’ai fait le choix de ne pas baisser les bras, en me disant que j’aurais une chance ailleurs.” Pour son père, ce renvoi lié à un souci “de taille”, l’a “forgé” : “Il a tenu à revenir au FC Vaulx pour retrouver avant tout du plaisir. Il a d’ailleurs dans un premier temps évolué avec l’équipe 2, car son souhait était surtout de taper le ballon avec ses copains.” Depuis, Nabil a retrouvé l’OL et fait partie intégrante du groupe pro. Il fait ses grands débuts avec le maillot olympien le 28 août dernier à San Sebastian, à l’occasion du barrage retour de Ligue des champions, perdu face à la Real Sociedad (2-0). Son père était devant la télé. “J’étais stressé. Je devrais pas le dire mais, en regardant le match, j’ai fumé un paquet de cigarettes.”
Il refuse de jouer pour Saint-Étienne
Si Nabil était forcément “fier et heureux”, il avait surtout hâte de fouler une pelouse particulière : celle du stade de Gerland. Ce fut le cas en Ligue 1 face à Rennes. “Honnêtement, je n’aurais jamais imaginé jouer à Gerland, avoue-t-il. Je n’ai pas de plan de carrière, je sais une chose : je me donne à fond pour Lyon. C’est ma ville, je veux réussir ici.” Visiblement, pas simplement des paroles en l’air. Son père dévoile une anecdote : “Avant de revenir à l’OL, il était suivi par de nombreux clubs, dont l’AS Saint-Étienne. Mais il a refusé, car c’est un vrai Lyonnais (rires).” Assurément, Nabil Fékir est un pélo de Lyon. Enfin, plutôt, un mec de Villeurbanne*.
Originaire du quartier Jacques-Monod, il réside toujours chez ses parents. “Les gens de mon quartier sont contents pour moi, ils sont fiers de me voir jouer à l’OL, indique-t-il. Je ne sais pas si je suis un exemple pour les petits, mais j’espère que ça leur donne de l’espoir et une envie de réussir.” Malgré sa notoriété grandissante, Nabil, qui est d’une nature calme, assure qu’il n’est pas du genre “à prendre la grosse tête”. Une chose est certaine, en cas d’égarement, il se fera reprendre de volée par la patrouille familiale. “Même s’il est devenu pro et qu’on parle de lui dans les médias, je serai toujours là pour le surveiller. Il est hors de question qu’il déraille”, insiste son père. D’ailleurs, Nabil, qui vient souvent encourager les équipes du FC Vaulx, a offert son premier maillot pro au club vaudais. Au moins, pour le coup, personne ne se trompera en parlant de Saint-Priest...
* Mec(s) de Villeurbanne est le titre d’une chanson de rap qui a fait fureur à Villeurbanne à l’été 2007.
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L’avis de Rémi Garde
“C’est un garçon que j’ai découvert même si Stéphane Roche [entraîneur de la CFA et directeur du centre de formation] m’en avait parlé. Ses premiers entraînements ont été difficiles, car l’exigence est élevée. Par la suite, il a compris certaines choses. Il s’est donné sans calcul d’un point de vue athlétique. C’est un garçon qui est à l’écoute même si, bien sûr, il doit corriger un certain nombre de choses dans son jeu. C’est un joueur qui peut dynamiser dans des petits espaces. Quand on met la pression sur l’adversaire, par ses dribbles, il peut déstabiliser une défense. Comme de nombreux jeunes joueurs, il peut progresser dans son jeu sans ballon. Il fait partie de cette génération qui joue seulement lorsqu’elle a le ballon dans les pieds. C’est quelqu’un de puissant, endurant, dur dans le combat et les duels. Au niveau de son attitude, je n’ai pas de souci avec lui. J’espère que ça continuera ainsi.”