L'ASVEL en NBA dans dix ans, pour un fan de basket, c'est un peu comme si l'on avait dit à nos arrière-grands-parents qu'un jour, un type marcherait sur la Lune.
Vue de Villeurbanne, Chalon ou Roanne, la NBA c'est une autre planète. Alors comment diable l'ASVEL, actuel premier ex-aequo d'un championnat de France en retrait de l'élite européenne, pourrait se retrouver un jour à affronter les Chicago Bulls ou les Boston Celtics ? C'est à la fois très simple et très compliqué. Depuis quelques années, la NBA fait montre d'une volonté d'expansion hors du marché américain et notamment en Europe. Les tournées de pré-saison en Europe et leur succès, de Londres à Madrid, en passant par Paris-Bercy à l'automne et même Lyon en 2006, en dit long sur cette volonté des Américains d'implanter la NBA en Europe : "Depuis 2003, notre vision c'est qu'on va tendre vers une NBA Europe dans les dix ans, confie Antony Thiodet, vice-président de l'ASVEL. La NBA a besoin de se chercher de nouveaux territoires. Nous ne sommes pas les seuls à le penser puisque David Stern le dit lui-même".
Un pas immense
En effet, il y a juste un peu plus d'un an, le 18 février 2008, lors de l'All-Star Game, la fête annuelle de la ligue, le boss de la NBA, a annoncé sa volonté de créer en Europe, à l'horizon 2018, une division qui comprendrait cinq équipes de cinq grandes cités européennes, dont Madrid, Rome, Berlin, Londres. Plus une cinquième, vraisemblablement française. De là à envisager que ce fût Lyon, via l'ASVEL, il n'y aurait alors qu'un pas, certes immense. Pour Antony Thiodet cela n'a rien d'utopique : "La responsabilité d'un dirigeant, c'est de se doter d'une vision.
Il peut paraître prétentieux que l'ASVEL ose prétendre (à la NBA). Mais ce club a une histoire, on pense qu'il y a une place pour nous. Qui aurait imaginé qu'en octobre 2006 l'ASVEL irait jouer un match contre les Spurs. Et bien on l'a fait et en plus à l'Astroballe." Avec Tony Parker, star de la grande ligue aux commandes, parfaite tête de pont entre la France et le basket US, affleure le sentiment que l'ASVEL veut et peut aller encore plus loin. Avec ses connexions aux USA, ses relations privilégiées avec les Spurs, qui met à disposition de l'ASVEL ses "chasseurs de talent", Parker a créé du rêve. "TP", soucieux de s'impliquer dans le développement du basket français, rêve aussi de diriger un jour une franchise NBA. L'ASVEL pourrait donc constituer, via une expansion de la NBA, son ticket d'entrée dans la ligue nord-américaine.
S'il a choisi l'ASVEL, après des contacts parfois étroits avec Rouen ou l'ambitieux projet Lillois, c'est parce qu'aujourd'hui le club est le mieux structuré du championnat de France. Le plus ambitieux aussi, capable d'envisager s'installer en haut de l'Euroligue comme de candidater à la NBA. Même si comme le souligne Jacques Monclar, ancien joueur et entraîneur, consultant de Canal + et fin connaisseur de la Pro A et de la NBA, "la NBA c'est un sacré cahier des charges et beaucoup d'argent". Par comparaison, le ticket d'entrée de la dernière franchise créée par la NBA, les Charlotte Bobcats, c'est 400M$. David Stern lui-même, l'a dit et répété "pour être viable, une franchise doit générer 100M$ de revenus annuels". Le budget actuel de l'ASVEL? 7 millions. Une autre planète donc. Mais Jacques Monclar, relativise : "On peut penser qu'à l'échelle du marché européen, les volumes d'argent générés seraient moindres".
"Pas avant dix ans"
Pour Antony Thiodet, ce problème serait surtout constitutif de la formule de compétition qui serait choisie par la NBA : "100M$ par an, c'est dans le cadre d'une NBA globalisée où l'ASVEL jouerait la saison régulière avec les franchises américaines. Je vois plus une conférence européenne avec des clubs qui se qualifieront entre eux pour des playoffs joués avec les Américains. Là, on est plus proche de 15 et 20M d'euros. Soit un budget de gros club européen mais pas plus. L'avantage de Lyon : en termes de bassin de population et de ressources économiques, l'agglomération lyonnaise n'a rien à envier à nombre de villes moyennes de la NBA (Milwaukee, Charlotte, Portland...) et occupe, comme le souligne Monclar, "une position de carrefour européen". "Avec une nouvelle salle, on pense être capable d'y arriver", indique Antony Thiodet. Ce qui nécessite quand même de la remplir, à l'heure où le basket est loin d'être un sport très porteur.
Jacques Monclar, lui, y croit : "En dépit des idées reçues les audiences du basket français sont très correctes et même en hausse, et puis, quand on a des résultats, une salle de 15 000 places se remplit sans problème". Les résultats, voilà pour Monclar, homme de palmarès, quatre fois champion de France, la vraie condition de la réussite de l'ASVEL, NBA ou pas, et le meilleur moyen de ne pas brûler les étapes. "Les ambitions c'est très bien. L'arrivée de Tony est une chance, pour l'ensemble du basket français, notamment en termes d'images, mais tout ça ne servira à rien si l'ASVEL n'est pas compétitive sur le terrain. Et puis on parle de quelque chose qui ne se fera pas avant dix ans. Dans l'immédiat, la priorité de l'ASVEL doit être de gagner le titre de Pro A et de se qualifier pour l'Euroligue sur le terrain. Point barre." En 10 ans, il est vrai qu'avant même de songer au titre NBA, l'ASVEL a le temps de remplir l'armoire à trophées.
NBA, mode d'emploi
Comme toutes les ligues professionnelles américaines, et à l'inverse de la culture sportive européenne, la NBA est une ligue dite "fermée" on n'y accède donc pas par un système de promotion/relégation, mais en payant un droit d'entrée. Chacune des 30 équipes qui composent la NBA sont divisées en deux conférences géographiques, Est/Ouest, de 15 équipes chacune. Elles-mêmes réparties en 3 divisions de 5 équipes. Les 8 premiers de chaque conférence sont qualifiés selon leur pourcentage de victoires pour les playoffs, le premier rencontrant le 8e, le 2e le 7e et ainsi de suite jusqu'à la finale de conférence. La finale NBA oppose alors le vainqueur de la conférence Est, à celui de la conférence Ouest. Chaque tour de playoffs se déroule au meilleur des 7 matches, le premier à 4 victoires l'emporte.
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