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Danger sur les boîtes de conserves

L'Anses (Agence nationale de sécurité des aliments) met en garde contre le bisphénol A contenus dans l'alimentation. Les femmes et les enfants sont très exposés.

« Le risque identifié concerne une altération de la glande mammaire chez l'enfant, qui est susceptible de favoriser le développement ultérieur de tumeurs. »

Les conclusions de Marc Mortureux, directeur général de l'Anses, ont de quoi faire froid dans le dos. Le bisphénol A, dont le haut fonctionnaire parle, est l'un des perturbateurs endocriniens les plus toxiques qui soit. Une substance chimique de synthèse, qui imite les hormones naturelles et désoriente les fonctions essentielles du corps humain, en particulier sur la reproduction, sur le métabolisme, le cerveau et le comportement.

Si les nourrissons, les enfants, les adolescents et les femmes enceintes sont les plus exposés,

l'« Évaluation des risques du bisphénol A (BPA) pour la santé humaine » de l'Anses n'a pu pêtre conduite que pour l'enfant à naître de la femme enceinte, faute de repères toxicologiques pour les autres populations. Cet avis de l'Anses fait suite à un rapport d'identification des dangers publiés en septembre 2011. L'Agence de sécurité des aliments avait alors conclu que les effets de ces perturbateurs endocriniens, en particulier le bisphénol A, étaient avérés à « des doses notablement inférieures aux doses de référence utilisées à des fins réglementaires ».

Bisphénol A ()

Contenants alimentaires et tickets de caisse

L'étude de 2013, fruit de trois ans de travail, arrive à la conclusion que la dose journalière tolérable*, au-delà de laquelle on ne risque rien, défini par l'EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) doit être révisée et revue à la baisse. Les chercheurs ont en effet identifié des « effets critiques jugés pertinents pour l'enfant à naître des femmes enceintes exposées » en-deça de cette dose journalière tolérable.

L'Anses recommande ainsi, pour la population en général, et pour les femmes enceintes en particulier, de réduire leur exposition au bisphénol A via le relargage par les boîtes de conserve et les bonbonnes en polycarbonate, à savoir les fontaines à eau.

Car si on trouve du bisphénol A dans l'air (12%) et dans les poussières (4%), c'est essentiellement dans l'alimentation qu'il s'accumule. Et les produits conditionnés en boîtes de conserve représentent la moitié de l'exposition totale. Les légumes sont les plus exposés, devant les plats préparés à base de viande et de poisson. Pour les conserves, c'est leur revêtement intérieur, à base de résine époxy, qui relargue le bisphénol A. Quant aux fontaines à eau, c'est le plastique, le polycarbonate, qui migre dans l'eau (entre 2,5 et 7,4 milligrammes par bonbonne de 19 litres).

« Cela montre clairement que si l'on supprime l'exposition via les contenants alimentaires, on réduit les risques de manière spectaculaire » insiste Dominique Gombert, directeur de l'évaluation des risques à l'Anses. Chaque année en France, entre 150 et 170 millions de litres d'eau sont commercialisés dans de telles bonbonnes. Quant aux boîtes métalliques (acier et métal) destinées à l'alimentation humaine, la France en produit plus de 3 milliards par an**.

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L'Anses pointe également du doigt les papiers thermiques, et particulièrement les tickets de caisse, pour lesquels le bisphénol A intervient dans la synthèse de certains retardateurs de flamme et comme révélateur chimique. L'étude note une situation de risques pour les caissières dans leur travail quotidien de manipulation de tickets thermo-imprimés (factures de caisse recus de distributeurs automatiques de billets de banque), notamment par les agents de caisse.

Quand « un toxique chasse l'autre »

Après avoir suspendu la commercialisation des biberons au bisphénol A en juillet 2010 - mesure étendue à toute l'Union européenne en juin 2011 par une directive européenne – et les conditionnements alimentaires destinés aux enfants de moins de 3 ans depuis le 1er janvier 2012, la France imposera l'interdiction générale du perturbateur endocrinien dans tous les emballages alimentaires à partir du 1er juillet 2015.

Biberon sans BPA ()

La balle est désormais dans le camp des industriels. À ce jour, l'Anses a répertorié 73 substances qui pourraient remplacer le bisphénol A. Mais, selon Yannick Vicaire, chargé de mission au Réseau Environnement Santé, « le bisphénol S (BPS) est déjà employé comme alternative dans les papiers thermiques tandis que plusieurs marques de biberons ont adopté le polyéthersulfone (PES) qui est à base de BPS ». Et de s'inquiéter : « les consommateurs ne pourront avoir confiance que lorsque l’industrie chimique cessera ce petit jeu cynique où un toxique chasse l’autre et adoptera une vraie approche globale de chimie verte pour concevoir des produits dépourvus de PE (EDC-free) ».

* dose journalière tolérable (DJT) : estimation de la quantité d'une substance présente dans les aliments ou l'eau de boisson, exprimée en fonction du poids corporel (mg/kg ou µg/kg de poids corporel), qui peut être ingérée quotidiennement pendant toute la vie sans risque appréciable pour la santé.

** chiffres donnés par l' Association française des industries des fontaines à eau (AFIFAE) et l'Union interprofessionelle pour la promotion des industries de la conserve appertisée (UPPIA).

> Pour en savoir plus sur les perturbateurs endocriniens dans l'alimentation : Alimentation : Chocapic et BN farcis d'insecticides.

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