Depuis 1999, l'association Objectif Quartier Péri (OQP) organise le marché du ramadan, place Bahadourian (Lyon 3e) pour offrir, au-delà des frontières religieuses, un florilège de saveurs orientales à ses visiteurs pendant la période du ramadan. C'est également l'occasion pour certains commerçants amateurs de se professionnaliser.
À première vue, ce marché du ramadan ne ressemble à aucun autre sur Lyon. Stands professionnels et improvisés se succèdent dans l'allée centrale. Les uns vendent fruits et légumes, les autres proposent des pâtisseries faites à domicile. Avec 90 % d'amateurs, le marché est composé "de gens qui veulent s'occuper pendant le mois du ramadan en vendant des produits faits maisons. Tout le monde est le bienvenu tant que le stand est propre, bien tenu et que les produits sont bons", explique Kader Bentaleb. Membre de l'association OQP, il est chargé de l'organisation et de la sécurité du marché. Assis sur une barrière à l'abri du soleil, il raconte comment, avant l'arrivée de l'association, les gens s'installaient sporadiquement sur la place et proposaient leurs produits maisons sans réglementation. "Maintenant, on a un vrai marché en accord avec les autorités, et la mairie", assure-t-il.
Zlabias, gâteaux et chorba
Comme pour tous les marchés, l'hygiène est au cœur des préoccupations des organisateurs, mais aussi des autorités. Exposés au soleil d'été, les produits frais ont une durée de consommation limitée. Les services de l'hygiène ont procédé à des contrôles "dès le premier jour", selon Kader. Les cuisiniers amateurs du marché proposent des bricks farcies aux légumes à une clientèle cosmopolite composée de musulmans, mais aussi de non-musulmans à la recherche de saveurs orientales. Les employés des bureaux alentours y achètent leurs déjeuners, et les gourmands viennent déguster des zlabias, confiseries colorées au miel. Le marché offre ainsi l'occasion de découvrir un large éventail des produits consommés pendant le ramadan : gâteaux au miel, fruits de toutes les couleurs, galettes épicées à la harissa, et bien sûr la chorba, soupe traditionnelle bue quotidiennement pendant le ramadan.
Des commerçants contributeurs
Si la plupart des commerçants sont des sympathisants de l'association OQP et de ses actions, ils doivent tout de même s'acquitter d'une taxe d'occupation (4 euros le mètre de stand) d'après un commerçant. Un autre, Taleb Ghulam (vendeur de fruits et légumes à la Croix-Rousse et à Vaise) affirme payer avec joie ce tribut. "Je le complète même avec des cagettes que je pourrais pourtant revendre au rabais", ajoute-t-il.
Arrivé avec un petit stand il y a cinq ans, "le paki" comme l'appellent les habitués, possède désormais un emplacement de presque dix mètres. Ces dons et contributions servent à l'association OQP qui distribue chaque soir de Ramadan quelques 160 repas aux plus démunis dans ses locaux.
Un tremplin professionnel
Si certains ont une simple table pour stand, d'autres, plus organisés, s'affirment au fil des années. C'est le cas de Khadija Idrissi. Présente depuis dix ans, elle a réussi à créer une entreprise de restauration, La Rose des Sables, traiteur "oriental & occidental". Quant à Taleb, il avoue s'y retrouver financièrement mais l'horaire de fermeture du marché (18h30) reste un frein aux affaires.
Si quelques courageux viennent faire leurs courses pendant les heures chaudes de la journée, les habitués arpentent plutôt les allées vers 18 heures. "Trop tard pour que les commerçants puissent écouler leur stock", selon Kader. Impossible de rogner sur l'heure légale avec une voiture de la police nationale qui veille au grain sur la place. Une situation embarrassante pour le représentant de l'association qui a l'impression que les autorités "cherchent la petite bête". Mais qu'importe, c'est avant tout un esprit de convivialité qui anime ce marché unique à Lyon.