Gilles Fumey est géographe à la Sorbonne et spécialiste de l’alimentation et analyse la place de la gastronomie à Lyon et son lien avec le terroir lyonnais.
Lyon Capitale : Pourquoi l’alimentation n’a-t-elle jamais été un grand sujet pour les géographes ?
Gilles Fumey : Qui se souciait d’alimentation il y a cinquante ans ? Tout allait bien dans le meilleur des mondes d’une agriculture productiviste dont les États-Unis étaient le modèle. C’était plutôt les stocks qui encombraient l’Europe. Et patatras culturel : McDo débarque à Strasbourg en 1979, l’année où Joël de Rosnay publie un livre sur ce qu’il baptise d’un mot inconnu : la malbouffe. C’est à ce moment-là que les sciences sociales investissent le sujet. Historiens, sociologues, anthropologues et géographes vont travailler sur ce que les économistes et les biologistes ont échoué à faire : nourrir le monde, pas seulement le monde riche, mais aussi les pauvres et, dans les pays du Sud, ceux qui sont empêchés de se nourrir par les guerres et l’incurie politique aggravant l’impact des dérèglements climatiques. Au Nord, deux milliards d’humains sont mal nourris (surpoids, obésité, diabète, maladies neurodégénératives et cardiovasculaires). Le tout avec un gaspillage éhonté : près du tiers de la production.
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