Le ministère de l’Économie a publié mi-juillet un décret portant mention “Fait maison” permettant de distinguer les bons cuisiniers des moins bons. Qu’en pensent les intéressés ? Jacky Gallmann, directeur de la brasserie Georges à Perrache (Lyon 2e), nous répond.
Des plombes qu'on avalait de travers. Et puis il y eut ce 11 juillet et son fameux dicton : à la Saint-Benoît, le coucou chante dans les bons endroits, ou bien il est mort de froid. On écopa de la deuxième partie de phrase, l'estomac dans les talons. Ce 11 juillet fut publié au Journal officiel le fameux décret sur le "fait maison". Ou comment "mieux informer le consommateur sur les plats qui lui sont servis", permettant de différencier les cuistots qui utilisent des produits frais de ceux qui assemblent les kits Lego de l'agro (alimentaire).
Sur le papier, l'idée faisait saliver. Dans l'assiette, on risque de dégobiller. "On est foutu, on mange trop. On est foutu, on mange trop. Mais qu'est-ce qu'on fera quand on sera gros ?" chante Souchon. Car peuvent entrer dans la composition d'un plat “fait maison” les produits "épluchés, à l'exception des pommes de terre [imaginez du McDo en "fait maison" ! NdlR], pelés, tranchés, coupés, découpés, hachés, nettoyés, désossés, dépouillés, décortiqués, taillés, moulus ou broyés, fumés, salés" mais aussi tous ceux qui sont "réfrigérés, congelés, surgelés, conditionnés sous vide". Mais, là où l'on reste comme deux ronds de flan, c'est lorsqu'il est dit que le restaurateur peut utiliser des produits transformés ailleurs, du moment qu'est indiquée la "marque du produit ou le nom du professionnel qui l'a fabriqué expressément". J'ai la rate qui s'dilate, j'ai le foie qu'est pas droit, j'ai le ventre qui se rentre, j'ai l'pylore qui s'colore...
Si, à Lyon Capitale, vous l'aurez sûrement compris, on s'est fait notre propre idée de ce label "fait maison", on est allé voir quelques restaurateurs pour savoir ce qu'ils en pensaient et comment ils travaillaient.
Restaurant : Brasserie Georges
Chef : Gérald Straga
Adresse : 30 cours de Verdun, Lyon 2e
Lyon Capitale : Que pensez-vous du label “Fait maison” ?
Gérald Straga : Je suis un peu mitigé. Je pense que tout ça s’est fait de manière un peu précipitée, sans qu’il y ait vraiment eu de concertation avec les professionnels, les syndicats… En plus, il existe déjà d’autres labels. La brasserie Georges est certifiée “Maître restaurateur” depuis 2011. C’est plutôt à partir de là qu’il aurait fallu travailler. Prendre ce qu’il y avait de bon dans ce label et collaborer avec les professionnels pour l’améliorer, plutôt que d’en rajouter un. Au final, tout cela participe à la confusion et les clients vont s’y perdre. Heureusement, ils ne sont pas dupes et sauront toujours différencier un bon plat d’un mauvais.
Quelle est la provenance de vos produits ? Pour quelle cuisine ?
Je me fournis pour une grande partie auprès des commerçants lyonnais : la poissonnerie Marguin, la boucherie Beauvallet, les fromages à la Maison Richard… J’inscris cette provenance sur le menu, c’est un gage de qualité et ça met en valeur le produit. Après, il est évident que je me fournis à l’extérieur pour d’autres produits. L’été, je fais venir du jambon ibérique, nous avons un artisan glacier qui nous fournit les crèmes glacées. C’est une brasserie, ce n’est pas de la gastronomie de luxe. Mais ce sont des produits de qualité, transformés par du personnel qualifié et diplômé.
Pouvez-vous nous citer un plat typique “fait maison” servi dans votre restaurant, et comment le différenciez-vous du même plat chez l’industriel ?
Si je devais vous en citer un, je dirais la choucroute, parce que c’est celui pour lequel tout le monde vient, même si ça renforce un peu cette image de brasserie. Je me fournis auprès d’un choucroutier d’Alsace, les charcuteries viennent de chez Gast, qui s’occupe lui-même des salaisons. Au final, c’est un plat traditionnel qui est mis en valeur par la qualité des produits.