© Association Fin Gras, Photographe Ludovic Combe

Le produit du mois : Mézenc, le fin du foin

Comme on irait manger un cassoulet à Castelnaudary, une choucroute en Alsace, une quenelle à Lyon, on mange le Fin Gras au Mézenc.

L’or des plateaux du Mézenc, c’est son foin. Le géographe André Fel parle d’espace “herbager-pastoral”, où prairies et pâtures ne peuvent être dissociées*. Ici, à ces altitudes (1 100 mètres en moyenne), entre Ardèche et Haute-Loire, ce sont les fleurs qui racontent le Mézenc. Knautie d’Auvergne, trisète jaunâtre, fétuque noircissante, crételle, violette jaune. Elles sont gastronomiques et condimentaires, comme la gentiane officinale, la raiponce en épi, l’orle chénopode Bon-Henri, le salsifis des prés. Médicinales aussi, à l’image du trèfle violet, de la flouve odorante, de la reine-des-prés. Souvent mellifères, comme le lotier des prés, la renouée bistorte, la bugrane arrête-bœuf, le trèfle blanc ou le genêt sagitté. Autant de diversité que suivent le cortège pastoral d’alchémille des rochers, de nard raide, d’orchis sureau, de fétuque d’Auvergne ou de pâturin des prés, et son cousin le défilé prairial avec le cynosure à crête, la fléole des prés, la houlque laineuse… Et surtout le cistre (ou fenouil des montagnes), plante emblématique des prés de fauche du Mézenc, qui sent le céleri en frais et le curry en sec, et que les bovins ingèrent abondamment, une fois séché. Les paysans l’appelaient jadis “herbe à viande”.

*Les Hautes Terres du Massif central : tradition paysanne et économie agricole (1962).

Inventaire à la Prévert

L’inventaire floristique, réalisé en 1995 à l’occasion du lancement de la démarche AOC Fin Gras du Mézenc, a permis de confirmer l’exceptionnelle diversité de ces flores prairiales et pastorales. Globalement, ont été recensées 107 espèces réparties dans 28 familles. Les bêtes sont six mois à l’intérieur, six mois à l’extérieur, avec finition au foin l’hiver. Le Fin Gras ne se consomme que de février à juin. C’est donc une viande qui a un côté végétal car elle s’aromatise grâce à ce foin. “La grande diversité floristique héritée de plusieurs siècles de traditions pastorales est d’ailleurs à l’origine de fourrages plus riches sur les plans nutritifs et organoleptiques que d’autres massifs montagneux”, note le Conservatoire botanique national du Massif central. Les bêtes sont engraissées doucement, ce qui donne ce goût unique à la viande, trente-trois mois étant l’âge moyen d’abattage en AOP. Le foin du Mézenc véhicule dans le gras de la viande les arômes de ce florilège floral, le gras s’infiltre au cœur du muscle, c’est ce qu’on appelle le “persillé” qui apporte saveur et onctuosité inégalées.

Fin de race
“Les premières bêtes ‘Fin Gras’ étaient fournies par des bœufs de travail de race mézine (…) emblème du plateau”, peut-on lire dans la thèse “Le Fin Gras du Mézenc”, d’Amélie Chapus pour obtenir le grade de docteur vétérinaire. L’apogée d’extension de la race se situe aux environs de 1830, elle a été considérée comme disparue à la fin des années 1970. “Très tôt, les éleveurs ont pris l’habitude d’acheter des bœufs d’Aubrac ou des vaches Montbéliardes.” Aujourd’hui, les races de vaches autorisées sont salers, limousine, charolaise et aubrac en race pure ou en croisement entre elles.

© Association Fin Gras, Photographe Ludovic Combe

[SAISON]
La période de commercialisation pour l’AOP Fin Gras du Mézenc se situe entre février et juin. Les animaux rentrent à l’étable à partir du 1er novembre. L’engraissement s’étend sur une période de 110 jours minimum à compter de l’entrée de l’animal à l’étable. Durant cette période, l’animal reçoit une alimentation essentiellement à base de foin de montagne, toute la spécificité de l’AOP.

[ALTITUDE]
1 753 mètres, c’est la hauteur du mont Mézenc, dont les deux sommets, sud et nord, sont respectivement les plus hauts d’Ardèche (1 753 mètres) et de Haute-Loire (1 744 mètres). L’altitude moyenne des plateaux se situe aux alentours des 1 100 mètres.

[CLIMAT]
Le massif du Mézenc se distingue par sa position orientale, à l’origine d’un climat particulier, rude en hiver et plutôt sec en été (avec des épisodes de sécheresse printanière).

[AOC]
L’obtention Le Fin Gras du Mézenc ou Fin Gras est labellisée AOC depuis 2006 (et AOP, à l’échelon européen, depuis 2013). Une viande AOC désigne une viande dont toutes les étapes de production sont réalisées selon un savoir-faire reconnu dans une même zone géographique qui donne ses caractéristiques au produit. Le Fin Gras du Mézenc fait partie des quatre AOC françaises de viandes bovines (taureau de Camargue, bœuf Maine-Anjou et bœuf de Charolles, également produit en Auvergne-Rhône-Alpes).

[TÊTES]
En 2024, le Fin Gras du Mézenc, c’est 1 190 génisses et bœufs commercialisés, 190 éleveurs, une centaine de fermes, 150 boucheries et 52 restaurants adhérents déployés sur quinze départements. 
À Lyon, on en trouve chez Bello (Lyon 2e)

[AFFAIRES]
Les ventes de Fin Gras du Mézenc représentent plus de 3 millions d’euros de chiffre d’affaires. “Il y a la partie économique mais aussi la vraie dimension sociale avec plus de 200 éleveurs en activité sur les petites communes de notre zone. Le Fin Gras aujourd’hui c’est une plus-value importante humaine et sociale”, explique l’association Fin Gras du Mézenc.

[FÊTE]
La fête du Fin Gras se tient à la fin de la saison, quand les éleveurs s’apprêtent à sortir les bêtes de l’étable. 6 000 personnes sont présentes pour clôturer la saison. Cette année, la fête débute le 1er juin à Chaudeyrolles et se prolonge le 2 juin à Présailles, deux petites communes au cœur de l’appellation, en Haute-Loire.

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