Gratin de Cardon © Jean-François Mallet
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Les grandes recettes lyonnaises : le gratin de cardons à la moelle

Si la ville de Lyon a les plats de toute la France, elle a aussi ses recettes fétiches. Le gratin de cardons à la moelle est l’une des essentielles, canonique régression gourmande.


L’emblème de Lyon

“Si les quenelles et la poularde demi-deuil ont grandement contribué à la réputation gastronomique de notre ville, il est juste de dire, en ce qui concerne les légumes, que, comme le gratin de pommes de terre du Dauphiné, le gratin de cardons à la lyonnaise mérite d’être à l’honneur.” La phrase n’est pas celle d’un cuisinier, mais d’un horticulteur-grainier de la rue d’Algérie (Lyon 1er), bien connu des Lyonnais, et probablement fin gourmet. Celui-là même dont le père était le fournisseur en pommes de terre des frères Lumière (pour la fécule des autochromes) – pour la petite histoire, la dynastie Rivoire rayonna pendant une centaine d’années dans le monde horticole, leurs graines de fleurs et de légumes étant envoyées à des clients de plusieurs dizaines de pays.

Cardon vert de Vaulx-en-Velin

L’histoire de cette plante potagère se confond avec celle de l’artichaut, écrit l’horticulteur, car elles dérivent toutes deux de la même espèce sauvage (Cynara cardunculus), indigène dans le Midi et aux bords de la Méditerranée. Chez la première on prend les côtes, chez la seconde les fonds. Dans la monographie Fleurs, fruits, légumes : l’épopée lyonnaise* – au sujet de laquelle les “sachants académiques” peuvent parfois avoir de la condescendance, alors même qu’on y dépeint l’histoire et le patrimoine d’un territoire –, on apprend que le cardon était cultivé par les Romains, avant de s’éclipser au Moyen Âge et de réapparaître à la Renaissance. Remontant progressivement la vallée du Rhône, le cardon se répand dans la région dès le XVIIe siècle, où ses côtes tendres et savoureuses sont appréciées. Le père de l’agronomie, Olivier de Serres, qui en cultivait dans sa propriété du Vivarais, louait les mérites de ce légume, particulièrement quand il venait à Lyon, “vrai pays des cardes” qui “surpassent en valeur plusieurs fruits du jardin”. À partir du XIXe siècle, le cardon prend racine dans les sols alluvionnaires, profonds et frais du Rhône, à Vaulx-en-Velin. Les jardiniers lyonnais réussissent, après des années de sélection et d’amélioration, à obtenir la variété “inerme vert de Vaulx-en-Velin”, aujourd’hui considérée comme l’une des plus agréables au palais.

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