Exploité par le groupe espagnol MagmaCultura et scénographié par l’agence britannique Casson Mann, le nouvel équipement culturel lyonnais se veut pédagogique, ludique et gourmand. Nous avons pu la visiter en avant-première lors de la mise en place de l’exposition permanente. Les cuisines n’étant pas installées, nous n’avons pas pu appréhender la dimension "gourmande" des lieux.
Le dôme des Quatre-Rangs
Aujourd’hui
La création de Vincent Breed met en scène 13 cuillères qui symbolisent les 13 malades sur 15 qui ressortaient vivants d’ici (contre 4 sur 15 à l’Hôtel-Dieu de Paris).
Hier
Le petit dôme ou dôme des Quatre-Rangs présente une forme originale avec sa base rectangulaire, sur laquelle s’ouvre chacune des salles de malades. Ce plan en croix permet la séparation des sexes et celle des blessés et des fiévreux, limitant le risque de contagion. C’est un des premiers modèles du genre en France, même s’il est déjà adopté dans d’autres pays d’Europe, comme en Italie, à Florence, à l’hôpital Santa Maria Nuova, l’ospedale Maggiore de Milan, achevé au XVIIe siècle ou l’hôpital de Mantoue, en Italie, construit dans les années 1450, l’exemple le plus proche de l’Hôtel-Dieu. Les ouvertures du dôme – baies en plein cintre dans la partie inférieure, œil-de-bœuf dans la toiture – assurent une fonction sanitaire en évacuant l’air vicié et les miasmes des quatre ailes des dortoirs. Elles contribuent également à la diffusion de la lumière dans les salles de malades. Sa coupole à quatre pans recouverte de stuc-marbre italien (mélange de poudre de marbre et de chaux) enveloppe cet espace d’une lumière d’un blanc laiteux très doux. Le dôme est surmonté d’un lanternon, qui fait office de cheminée aspirante.
Le cœur de la Cité (chapelle)
Aujourd’hui
Sous le petit dôme, l’ancienne chapelle sera le cœur de la Cité de la gastronomie. Le parcours au sein de la Cité sera libre, sans itinéraire unique. L’occasion pour chacun de dresser son menu de visite. C’est tout l’intérêt du dôme central d’où l’on peut accéder aux quatre ailes du bâtiment, avec sa thématique dédiée.
Hier
C’est aussi la plus ancienne partie de l’Hôtel-Dieu (les travaux s’étendent de 1622 à 1637). Au centre se dresse un autel à double face et le chancel – barrière basse séparant le chœur des autres parties dans un lieu de culte – qui permettait aux malades invalides de suivre l’office quotidien depuis leur lit. La messe y est célébrée tous les jours à 5 h. Les quatre ailes, longues de 40 mètres et hautes de 7,5 mètres, présentent des plafonds à la française et des sols en carreaux de terre cuite.
Pour permettre la construction du dôme, outre les innombrables quêtes et dons, les troupes de théâtre jouant à Lyon étaient contraintes de donner une représentation au bénéfice des malades. Il est aujourd’hui envisagé de faire du théâtre, des conférences et de la musique dans cette place centrale.
La petite apothicairerie
Aujourd’hui
L’espace se veut contemplatif et poétique, grâce à une projection artistique sur la voûte sur croisée d’ogives.
Hier
La pharmacie de la Charité a été sauvée de la destruction de l’hôpital du même nom, en 1930. Les boiseries du XVIIIe siècle sont classées aux Monuments historiques de 1904. L’apothicairerie se compose de trois parties avec au centre une quarantaine de niches où se plaçaient pots et chevrettes renfermant huiles, sirops et miels.
Et demain ?
Aujourd’hui
Au sein de la salle du Conseil et de la salle des Archives, le visiteur pénètre dans un salon de compagnie confortable et chaleureux. Grâce à différents dispositifs (tablettes tactiles, journaux, télévision…), celui-ci peut approfondir certains sujets liés aux enjeux contemporains et sociétaux de l’alimentation durable comme la biodiversité, les agricultures alternatives, la transmission, la lutte contre le gaspillage, le bien-être animal ou la justice alimentaire.
Depuis l’Antiquité, alimentation et santé sont liées. Le rapprochement de ces deux notions – sans omettre l’importance du goût et du plaisir – constitue aujourd’hui un enjeu sociétal majeur. De nombreuses initiatives locales et internationales permettent désormais de devenir acteur de son alimentation. À Lyon, carrefour millénaire d’échanges commerciaux et haut lieu de transmission de compétences en matière de gastronomie, une valorisation des métiers de bouche et de l’agriculture est essentielle. Il s’agit de veiller à la conservation de ce patrimoine et de retrouver la fierté de nourrir un territoire, en demeurant à l’écoute des enjeux contemporains.
Hier
Les boiseries du XVIIIe siècle de la salle patrimoniale issue de l’hôpital de la Charité (détruit en 1930) furent sauvées grâce à leur classement aux Monuments historiques de 1904 par le secrétariat d’État aux Beaux-Arts. Elles ont été intégralement remontées à l’Hôtel-Dieu dans une salle des Quatre-Rangs. La beauté de ce travail d’ébénisterie est à la mesure du soin apporté au précieux décor des volumes de comptabilité tenus par les recteurs.
Gastro’ludothèque
Aujourd’hui
Au premier, le public accédera à l’espace MIAM MIAM !, d’une grande valeur pédagogique, qui, grâce à divers éléments muséographiques, mécaniques et interactifs, proposera aux enfants des activités ludiques (avec des objets connectés, une dînette…) permettant de comprendre les cycles de l’alimentation, du produit à la consommation, en passant par la cuisine et toutes les valeurs associées, dans le but de promouvoir une alimentation plus saine.
Hier
À l’époque, les lits étaient alignés le long des murs. Pour remédier à la problématique récurrente de plusieurs malades par lit, les recteurs ont fini par faire l’acquisition de lits à une place en bois de noyer.
Le banquet
Dans cet espace baigné de lumière, c’est la gastronomie lyonnaise qui est mise à l’honneur. Et notamment son histoire qui a créé progressivement à la renommée internationale de Lyon. Cette partie de l’exposition se veut très conviviale, avec un visiteur immergé “comme à la table d’un bouchon ”. Les figures emblématiques sont ici présentées : de Paul Bocuse aux mères Brazier et Fillioux, en passant par les frères Troisgros, Fernand Point et Jacques Pic. Les silhouettes de ces grands personnages de la gastronomie invitent à prendre part à un banquet avec plusieurs objets inédits : piano de Bocuse, menus, spécialités, recettes mythiques, films, photos de famille, le frémissement des casseroles (mais sans l’odeur)...
À table !
Ici, toutes les étapes du repas gastronomique sont évoquées depuis la production (terroirs, marchés, cuisine) jusqu’au plaisir de se retrouver réunis autour d’une table. Inspirée d’une journée, la scénographie invite chaque personne à choisir les meilleurs produits sur des écrans représentant le marché. Enfin, de l’art de cuisiner au plaisir de partager un repas, la salle permet d’évoquer la gastronomie comme un sujet sociétal et culturel. L’attention portée au choix des produits, l’acte de cuisiner et l’importance accordée au fait de se retrouver ensemble autour d’une table sont autant d’éléments reconnus par l’Unesco en 2010. Le “repas gastronomique” des Français a ainsi été inscrit sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. La diversité de nos terroirs gastronomiques, le respect de la saisonnalité des produits et la commensalité (le plaisir de partager son repas entre amis, collègues ou en famille) s’inscrivent dans un développement durable et participent à une meilleure santé.
Plongée dans l’histoire de l’Hôtel-Dieu
Aujourd’hui
Dans cette partie consacrée à l’histoire du Grand Hôtel-Dieu, traitée via le prisme de la santé et de l’alimentation, le visiteur découvre comment les sœurs hospitalières et les recteurs faisaient fonctionner cette ville dans la ville. De l’évocation de la maternité, au dévouement du personnel hospitalier en passant par les grandes inventions médicales, c’est tout un pan de l’histoire de ce bâtiment exceptionnel qui est raconté.
Hier
Le Grand Hôtel-Dieu avait vocation à accueillir et soigner les indigents. L’alimentation prodiguée participait donc au processus de guérison. Le bouillon servi permettait aux plus démunis de retrouver des forces pour affronter la maladie. Les dons, l’aumône et la quête étaient essentiels pour trouver des ressources afin de faire fonctionner cette ville dans la ville. La cuisine et le réfectoire (pour le personnel) étaient des lieux stratégiques au cœur de l’hôpital. Un passage court (l’actuelle rue Childebert) accueillait des boucheries (les recteurs percevaient les loyers).
En chiffres
- 4 000 m2 d’espaces
- 4 niveaux
- 300 000 visiteurs attendus dès la 1re année (l’équivalent du musée des Beaux-Arts de Lyon en 2017)
- 362 jours d’ouverture par an
- Entrée adulte 12 €, enfant 8 €
- Dégustation 12 €
- 5,3 millions de CA prévu
- 16,4 millions de budget (10,4 par 11 mécènes, 3 par la Métropole, 2 par la Ville de Lyon et 1 par l’État)