L’idée de ce salon pas comme les autres : rencontrer le vigneron, déguster son vin et repartir une bouteille sous le bras. Du 31 octobre au 4 novembre, c’est à un véritable tour de France des vignobles qu’il nous convie à la halle Tony-Garnier.
C’est une machine bien huilée qui prend ses quartiers à la halle Tony-Garnier pour cinq jours, nonobstant ses dimensions. Imaginez : 1 000 appellations (AOP, IGP, villages, couleurs, cuvées, millésimes), 545 stands, un bon millier de vignerons (ils sont souvent deux par stand) et 55 000 visiteurs attendus. Un véritable labyrinthe œnologique de 11 000 m2 (une fois et demie la place des Terreaux) dans lequel le public, verre à la main, devra se frayer un chemin. Il faut six mois pour le préparer et deux jours pleins pour le monter.
La particularité de ce salon est d’être un véritable et immense marché du vin hexagonal. A minima, chaque vigneron vient avec une palette de bouteilles, soit 600 par stand. Multipliées par le nombre de loges, le calcul est vite fait : 330 000 cols (sachant que certains vignerons prévoient jusqu’à six palettes). “Généralement, ils repartent les mains vides”, assure Florence Corre, directrice du développement et de la communication de la Confédération des vignerons indépendants de France. Un vigneron indépendant ? C’est un vigneron qui travaille sa vigne, vinifie et élève son vin, le met en bouteille, et s’engage à chaque étape de l’élaboration.
Le vigneron à la dégustation
C’est ce qui fait aussi que ce salon est différent des autres : il est proposé par une organisation viticole professionnelle. Les trois fondamentaux : présence du vigneron (commerciaux prohibés), représentation de toutes les appellations françaises et équité dans la présentation des vins, que le vigneron ait de gros ou de petits moyens, que l’appellation soit plus ou moins connue. Une belle promenade à travers une France viticole aux accents aussi divers que les hommes sont différents et les vins variés. Des cépages comme le merlot, le chardonnay, le mourvèdre ou le petit manseng avec des appellations comme saint-émilion, chablis, fitou, coteaux-d’ensérune ou maury.
Quand le premier salon des vignerons indépendants lyonnais a vu le jour, en 1980 (quatre ans après le pionnier parisien), on ne parlait pas beaucoup de vente directe. Il y avait alors, d’un côté, le vigneron qui produisait son vin, de l’autre, le négoce qui le vendait. Primo, les affaires ne marchaient pas terrible, deuxio, les vignerons perdaient de la marge financière. Du coup, ils se sont mis à vendre eux-mêmes, en direct. “Aujourd’hui, la vente directe, ça semble normal, mais il y a trente ans, ce n’était absolument pas dans les mœurs, rappelle Florence Corre. Bref, on a clairement été avant-gardistes.”
Tout le monde est gagnant : le vigneron, mieux payé, et le consommateur qui paie moins cher. Raisin sur le gâteau, les deux parties se retrouvent autour d’un verre. Pour plagier le cuisinier Cyril Lignac, “c’est craquant-gourmand, ça raconte une histoire”.
Salon des vignerons indépendants – Du 31 octobre au 4 novembre à la halle Tony-Garnier (Lyon 7e)
Horaires : de 15h à 22h le 31 octobre, 10h à 20h les 1er et 2 novembre, 10h à 19h le 3 et 10h à 18h le 4
Entrée : 6 €, tarif réduit 3 €, gratuit pour les enfants de -15 ans accompagnés (sans remise de verre)
“Derrière chaque bouteille, il y a un homme ou une femme”
4 questions à DANIEL MOUTY – vice-président de la Confédération des vignerons indépendants de France
Lyon Capitale : Comment est né le Salon des vignerons indépendants ?
Daniel Mouty : L’histoire a débuté en 1976, quand une trentaine de vignerons du sud de la France s’est rendue à Paris, près de la gare d’Austerlitz, pour créer le premier salon. L’idée est née du fait qu’à cette époque pas mal de vignerons se rendaient compte que la vente par le négoce ne leur apportait pas beaucoup de valeur ajoutée, ni de marge. Du coup, ils se sont dit qu’ils pourraient vendre eux-mêmes leur production, en direct. Le vigneron indépendant est celui qui a, dans son métier, une forme d’authenticité. C’est un vigneron qui a des tripes, car il a choisi de faire son métier du tout début jusqu’à la fin, de la taille de sa vigne à la commercialisation de ses bouteilles.
Quelle est la spécificité de ce salon ?
Le fait de parler à un vigneron, d’entendre son accent, plaît beaucoup aux consommateurs. D’ailleurs, l’un de mes premiers soucis est de m’assurer que c’est bien le vigneron en personne qui vient sur place et pas un commercial. L’intérêt de rencontrer le vigneron, c’est qu’il raconte une histoire. Derrière chaque bouteille, il y a un homme ou une femme.
Quels changements avez-vous vus dans votre métier, vous qui êtes en contact direct avec les producteurs des quatre coins de la France ?
Le métier a bien changé, en vingt ans. Je peux en témoigner, car je suis vigneron en Bordelais. Désormais, il faut être aussi bon en informatique qu’en taille des vignes. Mais, comme le vigneron ne peut pas tout gérer tout seul, il est contraint de s’entourer de collaborateurs. Il doit jongler avec plusieurs métiers.
Comment voyez-vous l’avenir de la viticulture française ?
Il faut avoir la lecture du consommateur qui, au lieu de boire une bouteille tous les jours, ouvre une bouteille par semaine. Il boit moins mais mieux. Il a une vraie exigence de qualité. Du coup, les vignerons ont baissé les rendements dans les vignobles, pour être plus qualitatifs. Si le vin est encore très fortement vendu en grande distribution, je crois qu’on est en train de vivre un revirement. Le développement de la vente directe n’a jamais été aussi fort. Les gens n’ont plus envie de choisir leur vin dans des étals de trente mètres de long sur cinq de haut. L’achat vin se fait au contact de celui qui le fait. En cela, le Salon des vignerons indépendants a été pionnier. Et puis, le marché viticole d’avenir passe par une viticulture plus propre et plus transparente.
LES VIGNERONS INDÉPENDANTS EN CHIFFRES