INTERVIEW - 45 millions d’euros, c’est le déficit du compte principal prévu au budget 2011 des Hospices Civils de Lyon en 2011. Moins qu’en 2010, où le deuxième CHU de France accusait un déficit de 54,3 millions d’euros. Mais les HCL doivent revenir à l’équilibre en 2013. D’ici là de profondes réorganisations dans les services vont se poursuivre et l’équivalent de 200 temps-pleins seront supprimés chaque année. Entre difficultés financières, problèmes de recrutement et investissements à venir, Daniel Moinard, directeur général des HCL répond à nos questions.
Lyon Capitale : Le budget 2011 des HCL présenté vendredi 1er juillet prévoit un déficit du compte principal de 45 M€ ( 5 M€ après apport des produits de la valorisation immobilière). Est-ce conforme à vos attentes ?
Daniel Moinard : Oui. Depuis 2009 nous avons initié un plan de retour à l’équilibre baptisé cap 2013. Il s’agira d’ici deux ans d’avoir ramené les comptes à l’équilibre. Par rapport à ce plan conclu avec l’Agence régionale de santé (ARS), nous sommes même en avance sur nos objectifs, malgré l’augmentation des contraintes comme la baisse des tarifs de l’assurance maladie (-6M€ pour les HCL). Les dotations forfaitaires, délivrées par l’Etat et qui rétribuent les missions d’intérêt général ont également diminué. Cette année, nous nous attendions à toucher près de 34 M€, mais finalement nous n’avons perçu que 9M€.
Et comment comptez vous pallier ces entrées de trésorerie plus faibles que prévues ?
Nous sommes d’autant plus vigilants sur les dépenses et les réorganisations de structures. Sur les dépenses de personnel nous allons faire 14M€ d’économie cette année. Nous maintenons le rythme de 200 suppressions d’équivalents temps plein chaque année, jusqu’à 2013. 11 M€ d’économie proviennent des personnels non médicaux. Nous faisons en sorte d’épargner les personnels soignants.
En 2011, il y a 700 départs à la retraite de prévus. 500 embauches auront lieu, c’est tout de même mieux que dans la fonction publique d’Etat où un sur deux ne sont pas remplacés.
200 postes en moins, pourtant vous avez lancé une campagne de recrutement d’infirmières…
Soyons clairs, les infirmières ne sont absolument pas concernées par ces suppressions de poste. Chaque infirmière qui part est remplacée. Seulement, comme tous les CHU, nous avons du mal à recruter. Il nous manque actuellement 220 infirmières sur 5000. 110 d’entre elles ont bénéficié des dernières mesures sur la réforme des retraites. Nous avons donc effectivement lancé une campagne de recrutement à l’étranger, notamment au Portugal, ce qui nous a coûté beaucoup plus cher, puisque nous sommes passés par des agences de recrutement, qui sont loin d’être gratuites. Aujourd’hui, une infirmière qui se présente chez nous à l’embauche est recrutée et titularisée au bout de 3 mois, si elle le souhaite.
Quelles sont les conséquences de cette pénurie à court terme ?
Nous fermons pour l’été et de manière traditionnelle un certain nombre de lits, suite à la baisse d’activité programmée. Normalement nous les rouvrons tous à l’automne mais là, je suis inquiet. Cette pénurie d’infirmières est un sérieux handicap pour rouvrir tous les lits dans des conditions optimums.
Le 6 juillet sera inaugurée la stérilisation centrale qui permet d’aseptiser l’ensemble des matériels des HCL. C’est un projet colossal et coûteux. D’autres investissements comme celui-ci sont-ils prévus ?
La stérilisation centrale est un outil remarquable, ultra moderne, sécurisé et qui participe au retour à l’équilibre financier. Au lieu d’avoir plusieurs centres de stérilisation répartis dans plusieurs hôpitaux, un seul pôle effectuera cette tâche pour l’ensemble des HCL. Il permet de gagner en efficience. La cuisine centrale, réalisée il y a peu, relève de la même démarche. Nous allons prochainement faire de même en centralisant la blanchisserie. Mais ce ne sont pas des investissements aussi énormes, que ceux nécessaires pour la réalisation du bâtiment médico chirurgical de la Croix-Rousse, l’Hôpital Femme Mère Enfant ou le bâtiment d’hématologie qui ouvrira à l’automne. Les investissements vont diminuer de 170 M€ en 2010, seuls 115 M€ devraient être investis en 2011. Il est nécessaire de marquer une pause avant de se concentrer sur l’hôpital Edouard Herriot.
Justement, l’hôpital Edouard Herriot est en attente depuis longtemps d’une importante rénovation. Le 4 juillet en conseil municipal, Gérard Collomb, président du conseil de surveillance des HCL, s’est inquiété auprès de Nora Berra, secrétaire d’Etat à la Santé, d’une rumeur de déménagement de HEH à l’est de l’agglomération…
Un déménagement n’est absolument pas souhaitable. L’hôpital Edouard Herriot jouit d’une situation merveilleuse au cœur de Lyon, et 820 lits ne se déménagent pas en claquant des doigts. L’ARS nous a demandé de réfléchir à l’offre de santé sur l’est lyonnais, ce que nous faisons. Concernant HEH, nous sommes en pleine phase de réflexion qui est loin d’être achevée je ne peux donc pas en dire plus. Edouard Herriot a un avenir. On y investit d’ailleurs beaucoup, notamment en chirurgie ambulatoire. Nous allons également regrouper les services d’urgences médicales et chirurgicales, d’un point de vue managérial principalement.
Mais à quelle échéance HEH fera-t-il peau neuve ?
Sa rénovation est inscrite dans le projet médical 2014-2018. Mais avant, il est indispensable d’avoir retrouvé l’équilibre financier pour dégager une réelle capacité d’autofinancement qui sera indispensable dans ce projet. Car nous avons décidé, pour la première fois depuis dix ans, de bloquer la dette totale des HCL à son niveau actuel, 920 millions d'euros sur un budget de fonctionnement de 1,5 milliard d'euros. Sa réduction débutera dans les années à venir.
Vous montrez-vous serein face à cette échéance de retour à l’équilibre pour 2013 ?
Personne ne peut affirmer ce que seront l’économie mondiale et celle de la France en 2013. En attendant il faudra conduire le paquebot HCL. Je suis conscient que tout le monde fait un travail considérable. Nous avons fait des investissements lourds qui à terme, paieront. Il ne faut pas les regretter.