L’avertissement d’Emirates sur la ligne Lyon/Dubaï

Un peu plus de deux ans après l’ouverture d’une ligne Lyon-Dubaï, Thierry de Bailleul, le directeur général d’Emirates France, a exprimé son incompréhension devant la difficulté pour sa compagnie d’obtenir une liaison quotidienne entre les deux villes. (Article mis à jour le mardi 17 décembre à 14 h 30)

Dans le bureau du troisième étage du 235 cours Lafayette, occupé par la compagnie Emirates, le ton de Thierry de Bailleul est un brin solennel : "Nos partenaires économiques se sont exprimés sur le sujet, nous le devions aussi." Le sujet ? Toujours le même, celui de l'ouverture de nouveaux droits de trafic pour passer de cinq liaisons par semaine, la fréquence actuelle, à sept. Autrement dit, une liaison quotidienne.

Le directeur général a précisé, ce lundi matin, que les démarches entreprises par la compagnie émiratie s'étaient vu opposer une fin de non-recevoir. Les discussions pour la négociation d'un nouvel accord bilatéral et donc de nouveaux droits de trafic ne sont pas à l'ordre du jour.

Le contexte récent ne semble pas favorable à la compagnie, après la publication le 3 novembre dernier du rapport parlementaire Le Roux. Ce rapport, du nom du président du groupe de travail “Compétitivité du transport aérien français”, également président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, est critique envers les compagnies du Golfe.

Un rapport qui complique l’octroi de nouveaux droits

Thierry de Bailleul l'a d'ailleurs évoqué : "Cela nous a surpris, mais le rapport préconise, dans l'une de ses conclusions, de ne plus octroyer de droits de trafic supplémentaires aux compagnies [du Golfe, NdlR]." La réalité est un peu plus nuancée.

Le rapport énonce effectivement qu’“il convient de freiner les ambitions des transporteurs de pays leur accordant des aides de toute nature, et qui ne sont pas soumis aux même obligations que les transporteurs européens". Cependant, il dénonce aussi une concurrence "déloyale" faite aux compagnies françaises par celles du Golfe.

Il rappelle notamment que celles-ci sont intégrées dans des filières plus larges, rassemblant tous les segments du transport aérien, ce qui leur offre de nombreux avantages. Elles peuvent par exemple favoriser leur hub, comme Dubaï, à cheval entre l'Europe et l'Asie. De même, elles bénéficient, selon le document, d'une "fiscalité inexistante" sur leurs activités.

Les rapporteurs en concluent notamment qu'il faudrait conditionner l'octroi de nouveaux droits de trafic à ces compagnies au "respect de règles équivalentes à celles s'imposant aux opérateurs européens dans le champ social et fiscal".

Une mauvaise décision d’un point de vue économique ?

Le directeur général d'Emirates France évoque pour sa part une "organisation liée au cadre hérité de la fin de la Seconde Guerre mondiale". En filigrane point la critique des liens entre la Direction générale de l'aviation civile (DGAC), Air France et Aéroports de Paris (ADP).

Le directeur général ne voit en effet pas bien comment l'aéroport Saint-Exupéry pourrait se développer sans octroyer de nouveaux droits de trafic à des compagnies étrangères prêtes à ouvrir de nouvelles lignes : "Il va y avoir une privatisation bientôt. Un actionnaire ne peut pas s'engager sans avoir de perspectives de développement."

L'enjeu économique est effectivement de taille : faire de l'aéroport lyonnais un aéroport de standing international. Chiffres à l'appui, Thierry de Bailleul montre que l'arrivée de la compagnie émiratie a profité en partie aux autres compagnies qui exploitent des liaisons. Pour Emirates, ce ne sont pas moins de 200 000 passagers depuis 2012 qui ont volé avec la compagnie, avance le directeur général.

Se défendant de prêcher pour sa paroisse – "On ne demande pas de nouveaux droits que pour nous, cela pourrait être une compagnie chinoise ou indienne" –, Thierry de Bailleul rappelle tout de même les investissements d'Emirates en France. Les 56 Airbus A380 achetés et les près de 86 autres en commande font d’Emirates le premier client de la compagnie d'aéronautique française. Thierry de Bailleul avance également le chiffre de 14 500 emplois générés en France et 30 000 en Europe.

Privilégier d’autres aéroports ?

En quelques mots, le directeur général d'Emirates France suggère que l’hypothèse de privilégier d'autres aéroports en Europe n’est pas écartée si la compagnie n'obtient pas cette liaison quotidienne. Les travaux pharaoniques sur le terminal 1 de Saint-Exupéry, qui ne peuvent laisser la compagnie émiratie indifférente, pourraient néanmoins la retenir.

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