Après l’émotion, vient le temps des questions. Les Roms installés depuis octobre dans le squat touché par l’incendie vivaient dans des conditions précaires, que dénonçaient depuis longtemps les associations. L’accompagnement de ces populations n’est pas suffisant, accusent notamment le Mrap ou Médecins du monde.
À 8 heures ce matin, les parents d’élèves de l’école primaire sont à peine étonnés par l’incendie qui vient de ravager un immeuble vétuste du 8e arrondissement. “On voyait des charrettes de contreplaqué entrer dans l’immeuble, visiblement pour se chauffer”, affirme l’un d’eux. “Le problème, c’est que personne ne veut voir la situation des Roms”, ajoute-t-il en secouant la tête. Les associations sont les premières à monter au créneau : la situation de ces Roms est intenable et depuis longtemps.
Un squat insalubre
Depuis le mois d’octobre, 150 Roms dont près de 100 enfants ont investi ces lieux, un immeuble appartenant à l’ex-usine Leroy Sommer. Il s’agissait des anciens bureaux, aménagés en lieu de vie. Ces personnes venaient d’autres squats éparpillés dans l’agglomération lyonnaise, notamment rue Simon dans le 9e ou route de Genas à Villeurbanne.
Aujourd’hui, près d’une quarantaine de lieux comme celui-ci existent dans le Grand Lyon. Les Roms de ce squat devaient faire l’objet d’une expulsion le 15 ou le 16 mai. Depuis le 2 mai, tous les flux (eau, gaz et électricité) avaient été coupés, selon un membre du Mrap. Les conditions s’étaient donc détériorées dans ces bâtiments, où “habitaient” parfois jusqu’à 300 personnes selon la préfecture. La nuit dernière, ils étaient 185.
Les associations très sévères sur la politique du Gouvernement
Les associations travaillant au quotidien avec les Roms ont les réactions les plus virulentes, parfois même violentes. “Combien faudra-t-il de morts pour que l’État français envisage d’apporter de réelles solutions à une population de 20 000 personnes, dont 10 000 enfants, qui ont choisi de vivre en France malgré les traitements inhumains et discriminatoires que le gouvernement français leur inflige, en violation de ses propres lois et des lois européennes ?” dénonce ainsi avec virulence le Mrap dans un communiqué.
Moins vindicatif mais tout aussi sévère, Médecins du Monde, à la veille d’une rencontre avec Jean-Marc Ayrault sur, justement, la situation des Roms en France, explique que “l’urgence n’est pas d’expulser mais bien de protéger les personnes les plus précaires, et trouver des solutions de logement pérennes, comme le prévoit la circulaire du 26 août 2012”.
Manuel Valls sur place
Le ministre de l’Intérieur, profitant d’un déplacement ce même jour à Lyon, s’est rendu sur les lieux du drame ce lundi matin en compagnie de Christiane Taubira. Il a salué la mémoire des victimes de cet “effroyable drame” et exprimé “sa profonde tristesse”. Mais il est resté très déterminé quant à la politique menée par le Gouvernement : “Ces squats doivent être évacués, car ils représentent un véritable danger pour ceux qui les occupent.”
De son côté, Gérard Collomb, lors d’une conférence de presse, a insisté sur ce problème “difficile et complexe des squats”. Chiffres à l’appui, il soutient qu’il faut trouver des solutions pérennes : “L’État consacre 90 millions d’euros à l’hébergement d’urgence, 45 millions d’euros au logement social, et le problème dure depuis des années”, a-t-il martelé. Il a alerté Jean-Marc Ayrault lui-même en l’appelant, et lui a parlé du projet “Tinca” mené par le Grand Lyon. Cette région de Roumanie est aidée par l’agglomération lyonnaise pour maintenir la sédentarisation des populations : programme d’assainissement, gestion des eaux et des déchets…
Un processus pour intégrer ces populations
Dans le Rhône, la préfecture rappelle volontiers le programme Andatu initié par le préfet l’an dernier. Près de 300 personnes issues de ces régions d’Europe de l’Est bénéficient d’un processus d’intégration, avec un titre de séjour et un logement. À elles ensuite de trouver un travail, de scolariser les enfants. “Andatu fonctionne bien”, nous confirme la préfecture. Il concernera 400 personnes d’ici à la fin de l’année.
Comme l'aurait dit en 1990 un certain ministre : 'La France ne peut accueillir toute la misère du monde'