Aux abords du New York Stock Exchange (NYSE), de puissantes structures métalliques sur vérins hydrauliques bloquent la circulation. Des policiers du New York Police Department (NYPD) équipés de gilets pare-balles, casques de combats et fusils d'assauts stationnent près de leurs blindés et laissent passer au compte-goutte quelques véhicules autorisés.
Yuri(*), responsable des risques de Vision Capital (*), un Fond Alternatif (Hedge Fund) très discret qui depuis 1998 assure à ses actionnaires près de 25% de rendement par an nous attend pour 18h30. Nous laissons le NYSE sur notre droite et nous engouffrons dans Broad Street.
Arrivés à l'angle de Pearl Street nous pénétrons dans l'immeuble du 80. Nos papiers d'identité nous sont demandés par un premier vigile qui vérifie que nous sommes bien attendus par Yuri.
Après nous avoir photographiés à l'aide d'une caméra numérique et passé nos sacs au scanner, un second vigile nous conduit jusqu'à l'ascenseur express qui en quelques secondes nous propulse au dernier étage de la tour. Yuri, ancien chercheur en physique des particules, 45 ans, lunettes Prada aux montures épaisses, chemise élégante sans cravate, nous salue chaleureusement dans un français marqué d'un mélange d'accent russe et américain. Il nous conduit jusqu'à notre salle de réunion - une grande baie vitrée nous permet d'admirer depuis le 53ème étage le coucher de soleil sur la baie sud de Manhattan.
Le spectre de la stagflation
Le regard de Yuri, songeur, se porte au-delà de Staten Island. En dix ans Yuri et ses associés ont su traverser toutes les crises financières et n'ont pas déçu leurs investisseurs, y compris en 2007. Mais Yuri est inquiet : " la crise financière issue du subprime n'est pas terminée et les choses semblent même se compliquer ". Mercredi 20 février, la banque centrale américaine, conduite par Ben. S. Bernanke a reconnu les signes d'un mal dont elle n'avait plus souffert depuis les années 1970 : la stagflation, cette combinaison redoutable d'une économie qui stagne et d'une inflation qui limite les marges de manœuvre de la banque centrale. "La majorité des américains s'était habitués à une vie finalement bon marché, la nourriture, l'essence, les voitures ... avec la flambée des prix de l'énergie et des matières premières et la baisse du dollar qui renchérit nos importations, le portefeuille des américains rétrécit !" De nouvelles baisses des taux par la Fed n'auraient pour effet que d'accentuer cette inflation, en poussant notamment le dollar un peu plus à la baisse. " La Fed est donc prise en ciseau par ce double mouvement des prix haussiers et d'une activité économique qui s'essouffle ... les marchés des actions vont le découvrir dans la douleur ... si dans les huit mois à venir la bourse reperdait 15% nous ne serions pas surpris chez Vision Capital ! "
(*) Nom d'emprunt
Les commentaires sont fermés