Selon le Financial Times, c'est le fonds souverain gestionnaire de la majeure partie des réserves de change de la Chine (1 650 milliards de dollars), le State Administration of Foreign Exchange (SAFE) placé sous l'autorité de la banque centrale chinoise, qui a acheté 1,6 % de Total pour 2,8 milliards de dollars (1,8 milliard d'euros).
Dans son édition du vendredi 4 avril 2008, le Financial Times indique que des dirigeants de Total auraient rencontré des représentants du fonds souverain et que l'annonce était coordonnée avec les autorités chinoises.
Certains y voient une posture conquérante de l'investisseur chinois aux enjeux géopolitiques d'envergure. La société française assure qu'il s'agit pour elle d'un moyen de "diversifier" son capital avec un type de structure "qui investit à long terme dans des actifs rentables". Une prise de participation de cette ampleur dans la plus grosse capitalisation française peut-elle pour autant être neutre sur la politique étrangère française ?
Darfour-Tchad
La Chine achète 65% du pétrole soudanais et n'est pas étrangère aux blocages de la communauté internationale au Darfour, région de l'ouest du Soudan. Premier fournisseur d'armes du Soudan, elle joue également un rôle dans les tensions opposant le Soudan à son voisin le Tchad d'Idriss Deby Itno, allié de la France. Selon Gérard Prunier, chercheur au CNRS [1], en avril 2006, les rebelles qui sont parvenus jusque dans les faubourgs de N'Djamena étaient équipés d'armes chinoises.
"Les permis pétroliers de Total dans le sud du Soudan demeurent toujours bloqués par des arguties juridiques ...", explique Gérard Prunier.
Peut-être que le nouvel actionnaire de Total va pouvoir aider la compagnie française à progresser dans ses discussions avec l'état soudanais ?
Vendredi 4 avril, le lendemain de l'annonce de Total, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-Moon, écrivait dans un communiqué : "Il y a quatre ans cette semaine, le Conseil de sécurité s'est saisi pour la première fois du problème du Darfour."
"La situation est aussi sombre aujourd'hui qu'alors, peut-être même encore plus."
"Les violences contre les civils, y compris des femmes et des enfants, se poursuivent à des niveaux alarmants sans qu'on puisse désigner des responsables ou en voir la fin", ajoute-t-il.
[1] Le Monde Diplomatique, Darfour la chronique d'un génocide ambigu, Mars 2007