L’Ena sélectionne les meilleurs étudiants de France, pour les propulser ensuite aux plus hautes responsabilités : cabinets ministériels, conseils d’administration du CAC 40... Mais qu’apprend-on à l’École nationale d’administration ? Quelles valeurs transmet-elle ? Un Lyonnais diplômé de la promotion 2011, terriblement déçu par l’école, en révèle les dessous : indigence des cours, arrogance des élèves... Le témoignage* d’Olivier Saby décrit surtout une élite administrative qui fonctionne comme une “famille”, solidaire, où l’autocensure règne. Extraits de l'entretien à lire dans Lyon Capitale-le mensuel de décembre.
Lyon Capitale: Vous êtes le premier étudiant de l’Ena à raconter dans un livre sa scolarité et à dresser un constat effrayant. Que s’est-il passé ? L’Ena n’était pas faite pour vous ?
Olivier Saby : Pas du tout. En réalité, je n’ai fait que décrire ce que tous ceux qui sont passés par l’Ena savent : le niveau de l’enseignement est affligeant. On avait soit des intervenants incompétents, soit des intervenants très compétents... mais pas dans le domaine où l’école leur a demandé d’intervenir ! Résultat, on ne vous forme pas à l’Ena, on vous jette en pâture dans la fonction publique. (…)
On pourrait faire un parallèle entre votre livre et celui de Florence Noiville, J’ai fait HEC et je m’en excuse, où elle dénonce : “On n’y apprend pas à se remettre en cause. On en sort gonflé du sentiment de sa propre importance, obnubilé par la seule réussite économique.”
Les enjeux ne sont pas les mêmes. Un con qui sort d’HEC mal formé, c’est dommage, mais symboliquement il ne représente que lui. Il n’aura pas un emploi à vie dans des ministères où il aura sous sa direction des services extrêmement importants... (…)
Ne seriez-vous pas un peu trop idéaliste ?
Si, et je le revendique. Parce que la politique, ce n’est pas de la gestion, c’est de l’idéalisme ! La vraie question pour moi est celle de la diversité de l’entourage des décideurs. Je me suis rendu à des réunions de Terra Nova, le “think tank” du PS. Autour de la table, il n’y avait que des énarques. Quand j’ai demandé “Vous ne voulez pas qu’on invite d’autres gens ?” on m’a répondu : “Pourquoi ? Il y a des rapports, des livres, on sait ce qu’ils disent...” J’y ai même entendu dire : “De toute façon, le vrai problème, c’est le vote. Si on pouvait limiter ce droit aux polytechniciens et aux énarques, la France tournerait bien mieux !” (…)
* Promotion Ubu roi – mes 27 mois sur les bancs de l’Ena, éd. Flammarion.
L’intégralité de cet entretien est à lire dans Lyon Capitale n°717, en vente en kiosques jusqu’au 20 décembre, et dans notre boutique en ligne.