Un documentaire qui interroge sur l’intégrité d’Interpol

Interpol, une police sous influence ? diffusé sur Arte ce mardi, une semaine après l’avant-première lyonnaise, a fait largement réagir téléspectateurs et internautes. Les deux journalistes indépendants qui ont travaillé le sujet pendant plusieurs années mettent en cause le financement de l’organisation par de puissantes institutions et entreprises privées, comme la Fifa ou Philip Morris, ou des États comme le Qatar.

Lyon, jeudi 16 mars. Au cinéma Comœdia, les spectateurs se pressent pour assister à l'avant-première du documentaire Interpol, une police sous influence ? dont Lyon Capitale est partenaire. Dans la salle n° 4, les conversations fusent en plusieurs langues, trahissant la présence d'un fort contingent d'agents d'Interpol en provenance de la Cité internationale, où se trouve le siège mondial de l'organisation. 90 minutes plus tard, au terme d'un débat post-projection qui aura vu les spectateurs s'indigner du financement d'Interpol démontré dans le documentaire, la directrice de la communication de l'organisation prend la parole, en anglais, pour défendre son employeur. Face aux journalistes du collectif indépendant WeReport et à la société de production Cocottes Minute, à l'origine du projet, elle brandit la menace à peine voilée d'un recours auprès du diffuseur Arte. Et pour cause, Interpol est mise en cause dans la probité de son financement.

Des partenariats avec Philip Morris, la Fifa et l’industrie pharmaceutique

Comme l'avaient écrit les deux journalistes à l'origine du documentaire dans Lyon Capitale, Interpol, en mal de financements publics, est allée chercher des fonds dans des partenariats public-privé à partir du milieu des années 2000, sous l'impulsion du secrétaire général d'alors, Ronald Noble. Or, ces partenariats, parfois immoraux, avec Philip Morris, la Fifa, l'industrie pharmaceutique ou le CIO, interrogent quant à la probité d'Interpol et au choix de ses priorités en matière de lutte contre la criminalité. "Enquête embarrassante et alarmante sur Interpol", "une enquête choc et très claire, on a envie d'en savoir plus", ont réagi les internautes. Le but des journalistes de We Report semble donc atteint. "Nous avons voulu poser les informations sur la table pour provoquer un débat", expliquait Mathieu Martinière, lors de l'avant-première au Comœdia.

Quand Interpol sert de police politique

Pour poursuivre sur les errements d'Interpol, on parlera notamment des abus de “notices rouges”, effleurés dans ce documentaire (disponible en replay) axé sur le financement de l'organisation. Les notices rouges, sortes d'avis de recherche internationaux, permettent aux pays qui les demandent de traquer une personne partout dans le monde. Mais leur nombre s'est envolé ces dernières années, avec les abus de certains régimes autoritaires qui s'en servent comme un outil de police politique. C'est notamment le cas de la Russie et de la Turquie. Le manque de vigilance et de rigueur dans le contrôle, de la part de l'organisation, ne permet pas d'enrayer ces abus, malgré certaines réformes. La montée en puissance de la Chine, qui a placé un de ses ministre à la tête de l'organisation, n'est pas pour rassurer les dissidents, ouïghours notamment, ni les observateurs internationaux. D'autant que certains chefs d'Etat, comme Vladimir Poutine, ont déjà trouvé un moyen de contourner les quelques garde-fous mis en place.

Lire aussi : Interpol reconnaît des notices rouges politiques infondées
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