Benoit Decourt est co-fondateur et associé d'Elyse Energy, une entreprise basée à Lyon qui propose des solutions bas carbone pour l'industrie, et pour le transport maritime et aérien. Elle a annoncé le développement d'une usine à plus d'un milliard d'euros et une seconde à plus de 700 millions d'euros.
Benoit Decourt débute en expliquant le projet d'Elyse Energy : "notre objectif, c'est de produire des molécules bas carbone à destination de trois secteurs, le transport aérien, le transport maritime et la chimie. Nos molécules ont deux bases. D'une part, on produit de l'hydrogène par électrolyse de l'eau. L'idée, c'est d'utiliser de l'électricité bas carbone, renouvelable ou nucléaire, pour produire cet hydrogène. En parallèle, on va valoriser du carbone, qu'on va capter en sortie de procédés industriels, dans des cimenteries comme celle de Lafarge par exemple ou dans la bio-énergie. Et avec de l'hydrogène et du carbone, on synthétise, on produit des molécules du méthanol d'une part pour le transport maritime en carburant et pour la chimie; du kérosène de synthèse d'autre part pour le transport aérien, qui permettent de remplacer les produits fossiles qu'on utilise aujourd'hui et qui sont importés, par des molécules produites localement à faible empreinte carbone."
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Il poursuit en donnant des indications sur le marché dans lequel ils s'inscrivent : "Alors nos clients, en miroir de ce que je disais tout à l'heure, ce sont des clients dans le transport maritime. Donc, par exemple, des opérateurs de porte-conteneurs. On est sur du transport lourd de croisières, de ferries. C'est également des transporteurs aériens, les grandes compagnies aériennes, par exemple, ou les acteurs de la chimie. Ces acteurs achètent ou en tout cas, ils s'engagent pour trouver des solutions bas carbone pour décarboner leur activité. Un, parce qu'ils ont conscience de l'importance, de l'impératif du changement climatique. Donc, ils doivent évoluer pour pérenniser leurs activités. Deux, ils ont des contraintes réglementaires. Et donc, typiquement, dans le transport aérien ou dans le transport maritime, la Commission européenne a sorti des réglementations en 2023 qui obligent à des trajectoires ou à des incorporations, par exemple, de kérosène bas carbone. Et nous, on apporte une solution à ces acteurs-là en produisant ces molécules et en les produisant sur le territoire."
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Le retranscription intégrale de l'émission avec Benoit Decourt.
Eloi Thiboud : Bonjour à tous, bienvenue dans l'émission 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction de Lyon Capitale. Aujourd'hui, on poursuit notre série de présentation d'entreprises innovantes du territoire lyonnais. Aujourd'hui, on va parler d'Elyse Energy, une entreprise basée à Lyon qui propose des solutions bas carbone pour l'industrie, pour le transport maritime et aérien. C'est une entreprise qui a annoncé le développement d'une usine à plus d'un milliard d'euros et une seconde à plus de 700 millions d'euros. Pour en parler, nous recevons Benoit Decourt, co-fondateur et associé. Bonjour Benoit Decourt. Bonjour. Merci d'être venu sur notre plateau. On va rentrer dans le vif du sujet. Quel est le concept d'Elyse Energy ? Qu'est-ce qui fait votre couleur ? Vous, quelle est votre logique ?
Benoit Decourt : Elyse Energy, nous, on est une PME industrielle. Effectivement, notre objectif, c'est de produire des molécules bas carbone à destination de trois secteurs, le transport aérien, le transport maritime et la chimie. Nos molécules ont deux bases. D'une part, on produit de l'hydrogène par électrolyse de l'eau. L'idée, c'est d'utiliser de l'électricité bas carbone, renouvelable ou nucléaire, pour produire cet hydrogène. En parallèle, on va valoriser du carbone, qu'on va capter en sortie de procédés industriels, dans des cimenteries comme celle de Lafarge par exemple ou dans la bio-énergie. Et avec de l'hydrogène et du carbone, on synthétise, on produit des molécules du méthanol d'une part pour le transport maritime en carburant, pour la chimie, du kérosène de synthèse d'autre part pour le transport aérien, qui permettent de remplacer les produits fossiles qu'on utilise aujourd'hui, qui sont importés par des molécules produites localement à faible empreinte carbone.
Voilà, c'est quasiment l'identique des produits polluants. Simplement, comme le procédé de fabrication est différent, finalement, ça permet d'avoir un gros gain sur la production d'émissions de gaz à effet de serre, par exemple. Est-ce que vous avez quelques données pour nous dire quel est le gain pour l'environnement, justement, puisque c'est comme le fin mot de l'affaire aussi de permettre de moins polluer.
Oui, c'est la mission principale d'Elyse. C'est la raison pour laquelle nos produits ont de la valeur. C'est leur empreinte carbone. Donc un projet, par exemple, comme celui de eM-Rone, qui est un projet de méthanol installé sur le Rhône, sur la plateforme chimique d'Osiris, c'est un projet qui va aller capter 210 000 tonnes de CO2 qui, sinon, auraient été émis dans l'atmosphère et à qui on donne une deuxième vie.
Voilà, donc il y aura quand même un vrai gain, c'est énorme. C'est difficile à forcément visualiser, à comprendre, mais c'est quand même des énormes chiffres, on le sait. Pareillement, là, on se met de l'autre côté. Pour vos clients, d'abord, qui sont-ils et quel est le service que vous leur rendez, qu'est-ce qu'ils ont à gagner aussi, à travailler avec vous?
Alors nos clients, en miroir de ce que je disais tout à l'heure, ce sont des clients dans le transport maritime. Donc, par exemple, des opérateurs de porte-conteneurs. On est sur du transport lourd de croisières, de ferries. C'est également des transporteurs aériens, les grandes compagnies aériennes, par exemple, ou les acteurs de la chimie. Et donc, ces acteurs-là, ils achètent ou en tout cas, ils s'engagent pour trouver des solutions bas carbone pour décarboner leur activité. Un, parce qu'ils ont conscience de l'importance, de l'impératif du changement climatique. Donc, ils doivent évoluer pour pérenniser leurs activités. Deux, ils ont des contraintes réglementaires. Et donc, typiquement, dans le transport aérien ou dans le transport maritime, la Commission européenne a sorti des réglementations en 2023 qui obligent à des trajectoires ou à des incorporations, par exemple, de kérosène bas carbone. Et nous, on apporte une solution à ces acteurs-là en produisant ces molécules et en les produisant sur le territoire.
Très bien. Eh bien, écoutez, je pense que c'est très clair. Simplement, vous travaillez beaucoup à partir d'hydrogène que vous produisez vous-même à partir d'électrolyse de l'eau, un procédé qui ne pollue pas. Ce n'est pas encore le cas beaucoup en France. Ce n'est pas très partagé. L'immense consommation d'hydrogène en France est faite à partir d'hydrogène qui est polluant, qui est fabriqué avec un procédé polluant à cause du surcoût, bien entendu. Comment est-ce que vous, vous pouvez être compétitif dans ce contexte-là ?
Alors, nous, on n'a pas vocation à être compétitif avec de l'hydrogène produit par gaz naturel, par craquage du méthane dans le cas d'espèces, souvent importées. Nous, on doit être compétitif par rapport aux autres solutions bas carbone qui sont sur le marché. Et donc, notre promesse à nos clients, c'est bien celle-là, c'est celle de produire, encore une fois, des solutions qui ont une vraie empreinte carbone négative, entre guillemets, en tout cas beaucoup plus faible que les références fossiles. On a une obligation de décarboner au moins 70% par rapport aux références fossiles et de le faire de manière le plus efficace et le plus compétitif possible par rapport aux autres options qui peuvent exister pour nos clients.
D'accord, je comprends. Est-ce qu'on peut revenir un petit peu aussi sur l'histoire d'Elyse Energy, quand même ? Ça a été créé il y a seulement quelques années. Est-ce que vous pouvez revenir un petit peu dessus ? D'abord, quand est-ce que ça a été créé ? Vous étiez combien au tout début ?
Alors, Elyse Energy, c'est une entreprise qui a été créée en octobre 2020, donc il y a un petit peu plus de trois ans. On est cinq associés. On a une soixantaine de collaboratrices et de collaborateurs aujourd'hui sur nos différents bureaux et notamment à Lyon, où se trouve le siège social de l'entreprise. Et l'histoire d'Elyse, c'est la rencontre entre ces différences associées, et notamment moi qui travaillais depuis une quinzaine d'années sur le secteur de l'hydrogène, sur les e-fuels dans l'industrie et puis dans le cadre de mes recherches académiques. Et puis celle de mes associés qui, dans leur vie précédente, ont développé des opérateurs indépendants d'électricité renouvelable, notamment solaire et éolien pour Pascal Pénicaud, notre président chez Tenergie, et dans le biométhane pour l'un de nos autres associés, Cédric de Saint-Jouan. Et donc ces deux opérateurs qui étaient très importants, et eux voulaient continuer à amorcer des filières, à faire émerger des solutions dont on est convaincu qu'elles sont nécessaires pour répondre au défi du changement climatique. Et donc on a décidé de s'associer pour développer Elyse Energy et apporter ces solutions-là à nos clients.
Et vos perspectives, en deux mots, parce qu'on approche déjà de la fin, comment est-ce que pourrait être Elyse Energy dans deux, trois, quatre ans, à court et moyen terme finalement ?
D'abord, le premier enjeu d'Elyse Energy, on est sur des projets au long cours, vous avez annoncé les éléments d'investissement, c'est des projets qui prennent du temps, donc les mises en service des premiers projets sont attendues en 2028. Donc le vrai enjeu de l'entreprise, c'est d'abord d'être au rendez-vous de l'industrialisation, donc de répondre aux différentes phases qui sont à venir, notamment celle du financement, et puis ensuite celle de la construction et de l'exploitation. Et puis par ailleurs, on a un portefeuille de projets qui est un peu plus large, en France d'une part, mais aussi de l'autre côté des Pyrénées, en Espagne, au Portugal. Donc c'est de continuer à nous développer pour répondre aux besoins du secteur.