"Convergence des luttes" et opposition à la politique d'Emmanuel Macron étaient au programme de la "marée populaire". À Lyon, deux mille personnes se sont retrouvées près du pont de la Guillotière à l'appel de plusieurs dizaines de collectifs, syndicats et partis politiques.
Les stands se sont multipliés dès la fin de matinée sur les grandes marches des quais du Rhône, près du pont de la Guillotière. En bas, les chapiteaux flanqués France Insoumise sont attenants à ceux de la CGT pour dire "Non au coup d'Etat social". Au micro, non loin des barbecues et des tireuses à bière, les tribuns se succèdent pour montrer par cet événement "la convergence des causes, des luttes". PCF, Front de gauche, Justice pour la Palestine, syndicat des avocats... à chacun ses flyers, ses drapeaux et ses revendications, mais tous semblent d'accord sur leur opposition au gouvernement actuel. Grégoire, 44 ans, est adhérent du syndicat Solidaires. Dans la vie, il travaille dans une collectivité territoriale. "Je suis ici car l'idée que nous avons besoin en France de prendre un vrai virage social et écologique ne se fera pas sans pression populaire", exprime-t-il. "Ce qui est intéressant aujourd'hui, c'est le rassemblement unitaire. On sort un peu des querelles de chapelles et d’ego, on a d'ailleurs besoin de dépasser cela pour faire progresser un certain nombre de valeurs".
Laurent, cheminot à la gare de Perrache depuis 19 ans, ne dira pas le contraire. "Il y a 80 associations, partis politiques et organisations syndicales venues pour la défense des services publics, mais aussi en soutien des étudiants et du droit à l'accès à la formation". Une cinquantaine de cheminots se sont déplacés aujourd'hui, en dehors du mouvement de grève, qui reprendra dès lundi avec une manifestation en marge du conseil municipal, face à l'Hôtel de Ville. Quelques minutes plus tôt, certains s'empareront de fumigènes, debout devant le Rhône, bras tendus, avant de se mettre à écrire sur le sol en lettre capital des messages à l'attention d'Emmanuel Macron. Observée à quelques mètres de là par Brigitte et Blanche. "C'est bien de retrouver des gens qui partagent des idées communes et sont contre les choses que, personnellement, je n'ai plus envie de vivre : l'autoritarisme, les inégalités"... "La dictature, n'ayons pas peur des mots" ajoute carrément Blanche, 48 ans, aide-soignante dans un EPHAD. "J'aspire à des choses qui peuvent paraître utopistes, mais qui pour moi me paraissent réalisables, comme une bonne répartition des richesses", poursuit Brigitte. "Et que le capitalisme s'écroule, ce serait pas mal !" renchérit Blanche.
"Ce ne sont pas les élections qui vont changer quelque chose"
Sur les marches, des étudiants de l'université Lyon 1 distribuent le journal de lutte ouvrière à d'autres étudiants déjà croisés sur le campus de la Doua. Marie-France, 70 ans, était pédiatre. Aujourd'hui, elle aussi distribue les tracts de lutte ouvrière. "Je suis solidaire de la misère qui grandit partout. Il faut modifier le rapport de force et la force des travailleurs, ce sont les grèves, c'est ce qui fait vraiment peur à l'élite. Ce ne sont pas les élections qui vont changer quelque chose". Plus loin, ça discute circuit-court, permaculture, lutte contre la grande distribution, quartiers ou éducation. "Sauvez une infirmière, mangez un actionnaire" peut-on lire sur les multiples pancartes accrochées un peu partout.
À quelques mètres de là, Agathe, 34 ans, est kinésithérapeute. Militante de la France Insoumise, elle indique que ce n'est "pas une étiquette que l'on a voulu mettre en avant aujourd'hui". Le petit stand qu'elle tient est un "porteur de parole" à destination des enfants. À la question "qu'est ce qui te rend heureux ?", les enfants répondent par un dessin qui est ensuite affiché. Au milieu des arcs-en-ciel et des vacances, certains sont déjà plus politisés, notamment sur l'école. Un enfant a même dessiné Brigitte Macron. "On s'est dit que ce serait bien de faire une activité pour les enfants qui seraient ici. L'objectif est d'ouvrir le débat. Dans cette journée où l'on lutte contre Macron, on essaye de les impliquer, et certains ont bien compris que Macron ne leur voulait pas que du bien" lâche-t-elle en tirant sur sa clope.
"Aucune des réformes ne me convient"
Au "bureau de poste de la Fête à Macron", Danielle, 63 ans, aide à tenir le stand. Un sous-groupe de la France Insoumise, les canuts Insoumis, proposent d'envoyer une carte postale à Emmanuel Macron. Un peu plus tôt, ils ont organisé un lâché de ballons auxquelles étaient accrochés toutes sortes de message à l'attention du Président et de son gouvernement. "On propose aux gens d'écrire ce qu'ils souhaitent faire savoir au gouvernement, en espérant qu'ils lisent, qu'ils entendent et qu'ils arrêtent", explique cette retraitée de la sécurité sociale. "Aucune des réformes faites ne me convient. Et pas seulement celle des retraites. Sur l’exonération des cotisations, on ne dit pas ce qu'il y a en contre-partie et tout ce qui touche le social me préoccupe. Les réformes ne sont bonnes que pour certains, pas pour d'autres. Toute ma vie j'ai pensé que ça irait de mieux en mieux pour la majorité, mais là, on se rend compte que pour les jeunes qui viennent après nous, ça empire, alors il faut se battre".
À la fin du rassemblement, une camionnette de la CGT lance la marche pour la manifestation jusqu'à la place des Terreaux. Plusieurs policiers municipaux remontent en camion pour suivre le cortège. Pendant les quelques heures d’événements, "il n'y a pas eu d'incidents", déclare l'un d'eux. Si le parcours de la manifestation était bien prévue à partir de 14h, un autre départ de manifestation n'a pas été autorisé par la préfecture. Il s'agit d'une manifestation pour réclamer la fermeture du local de militants d'extrême droite Le Pavillon Noir.