INTERVIEW - Suite au limogeage, ce jeudi 17 février, du directeur interrégional des services pénitentiaires de Rennes par le garde des Sceaux et président du Conseil général du Rhône, Michel Mercier, Rémy Moreille, secrétaire régional du syndicat national des personnels de l'administration pénitentiaire (SNEPAP-FSU) réagit.
Lyon Capitale : Comment réagissez-vous à l'annonce de la démission forcée du directeur inter-régional des services pénitentiaires de Rennes après l'affaire Laetitia ?
Rémy Moreille : Selon moi, le gouvernement nie ses responsabilités, au lieu de rechercher des solutions pour répondre au manque d'effectifs au sein des services pénitentiaires. Il est important de rappeler que dès mai 2010, le directeur inter-régional du SPIP de Loire-Atlantique, celui-là même qui perd son poste aujourd'hui, avait prévenu son supérieur, le directeur de la direction pénitentiaire, du manque de moyens humains pour faire face à la totalité des dossiers. Rien n'avait été fait, il n'est donc pas étonnant que des dossiers comme celui de Tony Meilhon puissent être passés au travers. La faute ne doit donc pas être rejetée sur lui, mais bien sur le gouvernement et sur le chef de l'Etat qui préfèrent construire des prisons plutôt que d'embaucher du personnel.
Ce licenciement n'est donc pas justifié selon vous ?
Absolument pas. Le gouvernement fait tomber une tête pour faire tomber une tête ! A aucun moment, il ne se penche sur le manque de moyens subi par les organisations pénitentiaires. Et je me demande déjà si le Président de la République va se satisfaire de cette mesure ou s'il va trouver d'autres boucs-émissaires. Il est incompréhensible que le gouvernement punisse les magistrats et les agents du service pénitentiaire alors que les enquêtes ont prouvé que les véritables difficultés venaient du manque de moyens. Il faut tout de même savoir que chacun des agents des SPIP de France doivent gérer en moyenne 130 suivis socio-judiciaires simultanément, alors qu'il ne peuvent humainement s'occuper que de 60 à 80 personnes. Je pense que cette mesure n'est donc pas justifiée, il s'agit d'une responsabilité collective.
A Lyon, quels sont les problèmes vécus par les services pénitentiaires ?
A Lyon, les problèmes sont identiques à ceux de Nantes ou des autres régions de France. Les agents ont une trop forte responsabilité de travail, chaque membre du service pénitentiaire d'insertion et de probation doit prendre individuellement en charge 127 dossiers. Comme l'ensemble des services pénitenciers de France, nous n'avons pas assez de moyens humains, d'outils pour faire baisser le taux de récidive, ce qui engendre des résultats comme celui de l'affaire Lætitia.
Pensez-vous mener une action suite à la décision du Garde des sceaux de ce mercredi ?
Notre mouvement n'est de toute façon pas terminé. Nous allons devoir nous réunir pour mettre en place un mot d'ordre et une action adaptée à cette mesure. Nous devons continuer à mener des actions afin d'obtenir des moyens satisfaisants et empêcher le gouvernement de continuer à faire tomber des têtes.