François-Noël Buffet © Antoine Merlet
François-Noël Buffet © Antoine Merlet

Anneau des sciences de Lyon : Buffet temporise, "le tracé est une erreur"

Candidat Les Républicains aux élections métropolitaines de Lyon, François-Noël Buffet se voit régulièrement reproché d’être ambigu sur la question de l’Anneau des sciences. Dans une interview donnée à Lyon Capitale, la tête de liste de la droite pose les choses à plat pour cette autoroute censée boucler le périphérique à l’ouest. Celui qui s’est toujours opposé à un tracé court évoque le risque de voir une situation proche de Notre-Dame-des-Landes arriver à Lyon, mais aussi celui d’un projet qui augmenterait la saturation à l’Est. 

Lyon Capitale : Certains vous reprochent d’entretenir le flou sur l’Anneau des Sciences (voir le plan de cette autoroute ici), quelle est votre position sur ce projet ?

François-Noël Buffet, tête de liste Les Républicains pour la métropole de Lyon : Je propose une voie intermédiaire qui pourrait être la voie de la raison, sans être présomptueux. La problématique du trafic est réelle, mais je ne suis pas de ceux qui veulent foncer tête baissée dans le projet actuel et je ne suis pas de ceux qui veulent renoncer sans se poser les bonnes questions. Je crois à l’intelligence des citoyens et à leur capacité à comprendre la situation. Si on dépassionne le projet et que l’on pose sur la table tous les éléments, que voyons-nous ?

C’est un ouvrage qui devait être réalisé à partir de 1990 / 1991 par le département du Rhône. Il a été repris par la communauté urbaine de Lyon en 2001. À partir de cette date, elle n’a rien fait. Lors du débat public, le tracé a été prédécidé sans que l’on regarde les alternatives. Je proposais déjà de le faire passer plus au sud, pour un parcours plus large, ça n'a pas été pris en compte. L'Anneau des Sciences, ou TOP pour Tronçon Ouest du périphérique de Lyon, est un vieux projet qui a 30 ans. Il est toujours conçu à partir des déplacements de cette époque-là, sans tenir compte des évolutions ou des changements dans l’agglomération.

Le tracé actuel de l'Anneau des sciences "version courte"

Dans ce contexte, que proposez-vous ?

Aujourd’hui sur les M6 / M7 déclassées, on a 115 000 véhicules par jour. Il y en a 15 000 en transit qui n’ont rien à faire là, il faut les sortir. Pour cela, il faut que la métropole pousse l’Etat à terminer le bouclage de l’A432 au sud de Vienne. Il nous reste ensuite 100 000 voitures. Le boulevard urbain sur M6/A7 a une capacité de 40 000 véhicules par jour. À la fin, il y a donc 60 000 véhicules à traiter qui ne vont pas s’évaporer comme cela. Il faut privilégier les transports en commun, prolonger la ligne B jusqu’à Brignais, ça a du sens, construire un réseau de trains express lyonnais aussi. Nous l’avons soutenu en premier avec Xavier Odo, maire de Grigny. Aujourd'hui, tout le monde veut faire un "RER" à la lyonnaise, mais rendons à Odo, ce qui est à Odo.

Et ensuite ?

Est-ce que tout cela suffirait pour gérer les 60 000 véhicules restants ? Si on faisait une enquête "origine destination", je ne suis pas sûr que tous les conducteurs iraient dans le train ou dans le métro. Ainsi, je pense que nous avons besoin d’un ouvrage pour protéger le cœur de la métropole dans sa forme large, j’intègre Saint-Genis-Laval à l’intérieur. Ce n'est pas l'Anneau des Sciences, mais un contournement routier avec un tracé long qui partirait plus au sud de l’agglomération. Il passerait par l’A450, là où l’on retrouverait une station du métro B. Ce n’est pas plus compliqué que le tracé court, probablement moins cher. Aujourd’hui, c’est une réflexion, pas une décision.

Quand trancheriez-vous dans ce cas-là ?

Il nous faudrait moins d’un an pour prendre le temps de regarder la question de la protection de l’environnement, des modes de transports, faire une consultation large pour aller vers une décision collective, tout en dépassionnant les choses. Huit mois après le début du mandat, nous pouvons avoir une vision claire et précise du projet. Si vous ne faites pas ça pour l'Anneau des Sciences, ça se terminera comme à Nantes.

Nantes, pensez-vous à Notre-Dame-des-Landes ?

Oui, quand Gérard Collomb dit que c'est un projet qui a toujours été enterré, c'est faux, il y a de l'emprise en extérieur, en aérien. Regardez à Saint-Genis-Laval, on va mettre un échangeur avec 23 000 voitures par jour au milieu de 2 000 logements. Un échangeur à côté d’un écoquartier, il faut m’expliquer en quoi cela est "écolo" !

L'actuel maire de Saint-Genis-Laval, Roland Crimier, veut prolonger l’avenue de Gadagne pour aller jusqu’à cet échangeur. Je me souviens que l’ancien maire Alain Porcher avait imaginé cette avenue pour contourner le cœur de Saint-Genis, l’alléger. Le projet de Crimier va transformer Gadagne en véritable périphérique à ciel ouvert. Cette route va capter toujours plus de voitures, encore plus avec l’échangeur de l’Anneau. La vision de Porcher sera totalement dévoyée. J’en suis convaincu, ils vont la flinguer, c’est une aberration totale. Je pense aussi à la situation à Oullins et la Mulatière. Aujourd’hui, c’est déjà l’enfer avec 15 000 véhicules par jour, que va-t-il se passer avec l’Anneau des Sciences ?

Certains vous reprochent de militer pour un tracé long pour éviter votre ville Oullins…

J’évite volontairement de parler d’Oullins, car on me dit "Buffet est pour le tracé long, car il n’en veut pas chez lui". Mais le perdant du tracé court, c’est aussi l’Est de l'agglomération. Dans le projet actuel de l'Anneau des Sciences, on va réinjecter 50 000 véhicules supplémentaires sur le périphérique Laurent Bonnevay. On va augmenter la saturation sur un secteur qui ne pourra pas l’absorber. On aura plus d’embouteillages sur le périphérique à l’Est et on sait que les voitures dans la congestion sont des usines à pollution incroyables. Le tracé court est une énorme erreur.

Un Anneau des Sciences tracé court est-il un casus belli qui empêcherait une alliance avec un autre candidat au deuxième ou troisième tour ?

Oui ! Ce n’est pas possible.

On prête pourtant des volontés d’alliance entre Les Républicains et Gérard Collomb, qu'en est-il ?

On nous prête beaucoup choses, beaucoup d’intentions que d’autres mettent en œuvre dans notre dos, c’est tout simplement scandaleux. Ce n’est pas ma vision de la démocratie, je ne fais pas plus de commentaires aujourd’hui, mais cela arrivera.

Que feriez-vous si l’idée d’un tracé long était rejetée à son tour ?

Je crois à l’intelligence des gens. Quand un sentiment ne s’accorde pas, que le rejet est puissant, que votre truc ne marche pas, c’est qu’il y a problème. Échangeons à nouveau, tenons compte de la situation actuelle. Séguin avait un laïus sur "l’acceptation". Si vous n’avez pas l’acceptation sociale pour votre projet, même si vous estimez que c’est le meilleur, il échouera. Nous sommes dans un système démocratique, il faut arriver à faire accepter votre idée. Il suffit de voir Macron avec la réforme des retraites, elle est nécessaire, mais il l’a tué lui-même.

Je suis convaincu que tous les sujets qui n’ont pas une dimension environnementale rencontreront des difficultés. J’entends ce que disent les gens. Nous devons être capables d’intégrer tout de suite dans nos têtes ces changements forts. Cela peut être vertueux et positif, être créateur de richesses et devenir une force dans le développement de notre métropole. Si le tracé long n’apporte rien, ce que je ne crois pas, on regardera les alternatives proposées. De toute manière, à vouloir aller trop vite, on est en train de se mettre dans un truc pas possible. Rien que le financement, j’entends maintenant 5,5 milliards d’euros, on n’a pas l’argent pour faire l'Anneau des Sciences.

Quelles seraient vos priorités si vous étiez élu président de la métropole ?

Le premier effort serait financier avec un plan de déplacement des transports en commun puissant. On est capable de sortir des financements pour aller dans ce sens, de faire appel à la région, l’Etat, l’Europe pour nous aider à construire des projets cohérents en matière de transports en commun. Dès le début du mandat, il faut mettre tout de suite 70 millions d’euros dans le tunnel ferroviaire des Deux Amants. Ne perdons plus de temps, nous pourrons ainsi améliorer les liaisons par trains de l’Ouest lyonnais. Cela fait tellement longtemps que ce projet est dans les cartons, on ne peut plus attendre.

La mobilité est un enjeu énorme, un outil incontournable. J’ai toujours pensé que le président de la métropole de Lyon devait aussi être celui du Sytral . Si les déplacements sont prioritaires, il doit maîtriser la boutique. Pour le reste, il délègue et met les personnes compétentes aux bons postes. Je pense aussi que le premier vice-président de la métropole doit être en charge de l’environnement. C’est une fonction socle, une thématique qui doit être respectée.

Allez-vous voter pour la rupture du contrat Rhônexpress au Sytral ce vendredi 21 février ?

Pour l’instant, je pense que oui. Vinci a une implication étroite dans cette agglomération. Il faut faire le ménage là-dedans, ouvrir les portes et les fenêtres du système. De manière plus large, il y a un vrai sujet sur la nécessité d’avoir plus de concurrence réelle dans les projets. Il faut ouvrir les débats, chercher les bonnes solutions que les autres peuvent avoir. Si dix bêtises sortent d’une réflexion et que la onzième idée est bonne, ça en vaut la peine. Je rêve d’un grand débat sur la métropole de Lyon, d’un grand concours d’architectes et d’urbanismes qu’on ferait plancher pendant six mois. Des choses loufoques en sortiraient peut-être, mais aussi de belles idées que personne n'aurait imaginées jusqu'à présent.

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