Empreintes papillaires, profil ADN, vidéo-surveillance, bornage téléphonique... les fonctionnaires du renseignement et d'enquête placé sous le commandement de la SDAT et de la section anti-terrorisme du parquet de Paris, mettent tous les moyens techniques en oeuvre pour retrouver le principal suspect après l'explosion d'un colis piégé, ce vendredi, à Lyon.
Difficile d'évoquer la traque d'un suspect en cavale. La police craint en effet de diffuser des informations précieuses dans les investigations de leurs collègues. D'autant que les enquêteurs de la DIPJ de Lyon sont à pied d'oeuvre depuis hier soir pour retrouver la trace du principal suspect dans l'attentat survenu ce vendredi rue Victor Hugo (lire ici). Il s'agit d'un homme à vélo et bermuda clair (lire ici) qui a été identifié comme ayant déposé la valise contenant un engin explosif ainsi que des boulon, piles et vis à bois et autre projectiles destinés à "nuire au maximum aux personnes à proximité", analyse un policier.
La section anti-terroristes du parquet de Paris s'étant saisie de l'affaire, la police lyonnaise agit sous la direction de la Sdat (Sous-direction anti-terroriste), nous explique Sébastien Thillet, secrétaire départemental SGP Police FO du Rhône. "Cela témoigne d'un changement de niveau d'un fait qui n'est plus considéré comme seulement local, mais une problématique d'une autre importance, analyse Alain Bauer, Professeur en Criminologie au Conservatoire des Arts et métiers. Mais si on se rend compte par la suite qu'il s'agit d'une vengeance d'un employé d'une boutique licencié ou du petit ami jaloux d'une vendeuse, cela redescendra d'un cran vers une juridiction locale". Les renseignements territoriaux (RT, ex-RG) et les renseignements intérieurs (DGSI) apporteront également leur concours à l'enquête.
Préserver les indices
Le dispositif mis en place hier soir directement après l'explosion relève de la procédure classique en cas d'attentat. Avec en premier lieu la protection des personnes, la sécurisation des lieux puis la préservation des traces et indices. "Pour mettre a disposition de la police technique et scientifique un maximum d'indices et de traces", glisse Sébastien Thillet, qui évoque les stages ayant permis de former les fonctionnaire lyonnais à ce genre d'évènement. Des indices de nature très diverse. Les traces de poudre permettent de définir le type d'explosif. Les restes de l'engin ayant résisté à l'explosion peuvent donner une indication sur sa fabrication ou le type de détonateur (minuterie ou à distance). Un morceau de scotch peut révéler une empreinte papillaire ou un cheveu donner un profil ADN. "L'empreinte ADN peut avoir son charme, mais encore faut-il que le profil soit présent dans la base, sinon il faut attendre une autre trace pour le croiser, nuance Alain Bauer. S'il est dans la base en revanche, l'analyse de la concordance est ultra-rapide".
Définir un profil
"Il y a trois sujets à déterminer lors d'un attentat, poursuit Alain Bauer. Le type d'explosif utilisé, le type de détonateur qui l'actionne et la revendication". Le dernier élément peut notamment permettre d'envisager le caractère sérielle de l'attaque, redouté depuis les attentats de Paris notamment. "La crainte d'une série est évidente chez mes collègues", reconnait Sébastien Thillet. Pour créer l'effet de panique recherché, les évènements d'une série doivent être suffisamment rapprochés. Sur quelques jours.
Tous ces éléments doivent permettre de comprendre les motivations et le mode d'action de l'auteur d'un attentat. Et de dégager un profil type. Cela afin de retrouver le principal suspect. En l'occurrence, l'homme à vélo et bermuda clair identifié par les cameras de vidéo-surveillance comme ayant déposé le sac contenant la bombe quelques minutes avant l'explosion. Caméras qui ont déjà permis de retracer une partie du parcours du suspect, arrivé par le pont de la Guillotière et la rue de la Barre avant de traverser Bellecour vers le sud. Il aurait emprunté le même chemin en sens inverse au retour.
Traque et témoins
Mais se pose la question du moment où sa trace est perdue (lire ici), et des hypothèses qui découlent de ce moment, comme le moyen de transport utilisé par la suite, par exemple. Les bandes des caméras publiques mais aussi privées (banques, boutiques etc...) vont être exploitées. Le bornage téléphonique est aussi un des leviers à activer, couplé à des écoutes, si le suspect se trouvait en possession d'un téléphone au moment où il a été repéré.
Sébastien Thilliet rappelle enfin que dans plusieurs enquêtes les remontées des appels à témoins ont été précieuses. Toute personnes pensant avoir croisé le suspect est priée de se signaler au 197, la ligne dédié (le 17 étant déjà largement sollicité).