Famille 3 © Tim douet
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Baisse des allocations familiales : "Les familles ont un niveau de vie plus bas que les couples sans enfants"

Famille 3 © Tim douet ()

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Le rapport de Bertrand Fragonard, président délégué du Haut conseil de la famille doit être remis au gouvernement, jeudi 4 avril. Commandé au début de l’année 2013 par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault pour trouver des solutions au déficit de 2,6 milliards d’euros, prévu en 2013, pour la "branche famille" de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), ce rapport annonce plusieurs préconisations. Dont la baisse des allocations familiales pour les familles les plus aisées. Une erreur selon Henri Sterdyniak, directeur de département économie de la mondialisation à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), économiste plutôt classé à gauche et membre du collectif des Économistes atterrés (1).

Lyon Capitale : Le rapport de Bertrand Fragonard demandé par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, préconise une baisse des allocations familiales pour les ménages les plus aisés afin de combler le déficit de 2,6 milliards prévu en 2013 pour la Caisse nationale des allocations familiales. Qu’en pensez-vous ?

Henri Sterdyniak : On ne va pas régler la crise en s’attaquant aux allocations familiales. La “branche famille” de la Caisse nationale des allocations familiales est structurellement équilibrée. Si elle est aujourd’hui déficitaire c’est parce que les comptes de la CNAF souffrent, à cause de la récession, de la diminution des cotisations sociales et de la CSG et que l’on a pris 9 milliards d’euros à cette branche pour financer la branche vieillesse. Ce sont donc des raisons conjoncturelles. C’est une erreur de penser que les allocations familiales sont responsables de ce déficit, surtout qu’elles n’ont pas augmenté depuis 1983.

Selon vous, ce n’est donc pas à ces familles de payer pour le déficit ?

Aboslument. À salaire égal, les couples avec enfants ont en moyenne un niveau de vie inférieur aux couples sans enfants. Un couple avec trois enfants a un niveau de vie plus bas de 25% si elle gagne deux fois le Smic, et de 30% plus bas si elle gagne cinq fois le Smic. Le niveau de vie est de 30 % inférieur pour un couple avec trois enfants. Même si ces familles que l’on appelle “biactives” ont des salaires relativement confortables, il est suffisamment lourd d’élever deux ou trois enfants car le coût moyen d’un enfant est estimé à 500 euros par mois. Les allocations familiales ne sont pas excessives.

Dans le détail, le rapport Fragonard prévoit différents scénarios qui toucheraient de manière plus ou moins importante les allocataires. Il propose de baisser ces allocations à partir d’un seuil de 7 296 euros de salaire pour un couples avec deux enfants dans l’hypothèse la plus souple, jusqu’à la diviser par quatre pour un couple avec deux enfants qui gagne 10 215 euros par mois…

Aujourd’hui, l’allocation s’élève à 128 euros pour une famille avec deux enfants. C’est déjà très faible. Si on diminue encore l’allocation ou pire qu’on la divise par quatre, alors celle-ci s'élèvera à 32 euros pour deux enfants ! Sanctionner ces couples est injuste socialement. Du point de vue de la cohésion sociale, c’est même une faute morale car la France a besoin d’enfants. Baisser ces allocations revient à sanctionner des couples qui ont fait le choix d’être utile à la société. La politique familiale ne peut être une variable d'ajustement.En plus, faire une allocation dégressive en fonction des revenus va ajouter de la complexité administrative à un système qui l’est bien assez déjà. La CAF a déjà beaucoup à faire dans le calcul des allocations logement et du RSA. Si elle doit en plus éplucher les revenus des plus riches ou des classes moyennes…

La proposition de diminuer les allocations familiales pour les hauts revenus présage-t-elle d’une réforme plus dure, dans les mois à venir, sur le système social français ?

Le gouvernement s’est engagé à réduire les dépenses publiques de 70 milliards d’ici 2017. Cela signifie qu’il va forcément s’attaquer aux retraites, aux allocations chômage, aux services publics, à la santé. Si l’on veut gagner 70 milliards d’euros, il va bien falloir baisser l’ensemble des prestations sociales.

Henri Sterdyniak ()

Henri Sterdyniak

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(1) Collectif créé en 2010 contre les politiques mises en œuvre après la crise des subprimes aux États-Unis de 2008. Composé d'économistes, chercheurs, universitaires, le collectif prône une réflexion collective contre l'orthodoxie néo-libérale et la domination du système bancaire.

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