Bertrand Soubelet © Objectif France

Bertrand Soubelet : "L'Etat doit faire preuve de plus de fermeté"

Ce mercredi 23 mai, Bertrand Soubelet, général ex-numéro 3 de la Gendarmerie Nationale et vice-président d'Objectif France, sera présent à Lyon à l'occasion d'une conférence-débat. Avant sa venue, le général a accordé un entretien à Lyon Capitale sur les thèmes liés à la sécurité et l’autorité de l’Etat.

Lyon Capitale : Pourquoi vous être engagé dans le mouvement Objectif France ? 

Bertrand Soubelet : C'est ma rencontre avec son président, Rafik Smati, qui a été déterminante. C'était au cours de l'été 2017, j'étais à l'époque candidat aux élections législatives et par le biais d'une amie commune il est venu me rencontrer pour discuter. Il m'a alors proposé de le rejoindre. Si j'ai accepté, c'est parce que c'est un mouvement qui s'occupe de la France sans calcul politicien comme les partis politique. J'ai exercé un métier de sécurité politique avec beaucoup de responsabilités, j'ai vu les hommes politiques faire un certain nombres de choses, et j'ai vu que leurs actes n'étaient jamais en cohérence avec ce qu'ils disent.

Quel est l'objectif de ce mouvement ? 

C'est un programme économique extrêmement puissant qui va puiser ses sources dans celui de Francois Fillon dans la primaire. Notre but est la restauration de l'ordre et de l'autorité bafoués dans notre pays, parce qu'on ne peut rien construire dans une société si l'ordre n'est pas garanti, c'est même la condition première. Nous défendons également l'écologie, qui n'est pas une valeur de gauche, la préservation de la planète sans négliger le progrès, ce qui est une valeur de droite et plutôt conservatrice. Nous évoquons aussi le problème de l'intelligence artificielle, négligé par la politique, qui va pourtant bientôt être le sujet de préoccupation numéro un. Il va y avoir un choix de société à faire.

Quel est le contexte de la conférence-débat de mercredi où vous serez présent ? 

Personnellement je viens pour parler de ce que je connais, ce sera un café politique, on va évoquer tous les sujets qui nous concernent. Les hommes politiques font semblant d'écouter les français, nous nous allons vraiment les rencontrer, c'est extrêmement important d'aller écouter la parole des français. Ils ont des choses à dire, sont lucides, et ne sont pas des idiots. Nous avons encore beaucoup de choses à apprendre, c'est important d'aller au contact des gens et de prendre en compte ce qu'ils disent. C'est de cette façon que l'on pourra faire quelque chose pour ceux qui souffrent et leur proposer une politique qui leur permette de moins souffrir.

Vous faites parler de vous en 2013, sur la lutte contre l'insécurité, selon vous il y a des difficultés dans le fonctionnement de la gendarmerie contre la délinquance ?

Il y a des problèmes dans toute la France, pas juste au niveau de la gendarmerie. La sécurité ce n'est pas que les forces de l'ordre, c'est une responsabilité individuelle. Quand chacun détourne les yeux devant une injustice, c'est un peu facile d'accuser ensuite la police ou la gendarmerie. Ils ont évidemment une part de responsabilité mais il y aussi de nombreux problèmes dans la justice, tout cela forme un ensemble qui ne fonctionne pas. J'ai décrit à l'époque devant l'Assemblée nationale l'ensemble des problèmes existants, on ne peut pas isoler les problèmes de la gendarmerie du reste, par exemple l'Etat a négligé la justice pendant de très nombreuses années. Très peu de moyens sont donnés à la justice, que ce soit la droite ou la gauche, depuis trente-cinq ans c'est la même politique : ne pas donner de moyens à la justice. La gauche considère que la répression n'est pas la priorité mais que la prévention l'est, et quand la droite était au pouvoir c'était en quelque sorte "pourquoi donner des moyens à ces gaucho de magistrats?", parce que la magistrature est marquée par une présence importante de la gauche. En somme, pendant 30-40 ans la justice n'a pas bénéficié des moyens nécessaires. Notre président actuel avait fait la promesse pendant sa campagne de construire 15 000 places de prison, aujourd'hui seulement 7000 ont été construites. Pourtant cela fait partie des devoirs de notre société de mettre nos concitoyens dans des conditions d'emprisonnement dignes. Sinon, cela pénalise forcément le pays et sa sécurité.

Suite à votre intervention à l'Assemblée nationale, vous avez été écarté de la scène publique sous la pression politique ? 

Oui, totalement. Je me suis exprimé fin 2013 et cela a fait le buzz pendant un mois. Suite à ça, la première décision faite au dernier conseil des ministres de l'année a été de me débarquer de mes fonctions de numéro 3. Aujourd'hui je porte un regard neutre et impartial sur le fonctionnement de la société, des hommes politiques, et sur mon intervention à l'Assemblée. C'était impressionnant certes, mais je n'ai pas remis en cause le gouvernement. J'ai toujours pris soin de rester dans la limite du raisonnable, dire la vérité. J'ai fait mon devoir de citoyen, surtout en tant que responsable d'une institution importante. J'ai eu énormément de retours des français, tous positifs, sauf de la part des politiques. Je pense que cela a permis de libérer un tout petit peu la parole, ça a commencé à interpeller les gens.

Quels seraient vos projets pour lutter contre les problèmes d'insécurité que subit actuellement la France ?

Pour commencer, être beaucoup plus ferme. Par exemple, pour Notre-Dame-des-Landes s'y prendre à deux fois pour parvenir à évacuer des gens qui jusqu'ici n'avait rien à faire, n'ont même pas d'objectifs,...  L'Etat recule devant des personnes qui ne respectent rien, pareil pour les universités, laisser des étudiants empêcher les autres de passer leurs examens, dans une démocratie, c'est insupportable. Le 1er mai aussi il n'y a eu aucune réaction de l'Etat. Il ne peut pas y avoir de liberté et de sûreté si l'autorité de l'Etat n'est plus respectée. Or elle n'est plus respectée de plusieurs façons, dans l'Education nationale, et beaucoup d'autres endroits. Les policiers sont critiqués mais ils n'ont jamais de directives pour faire le job. A l'heure actuelle je ne vois pas d'évolution dans le positif et pourtant à l'époque j'ai aidé Macron à mettre au point son programme de sécurité, pour aider mon pays avec mon expertise. Il devait y avoir une police de sécurité quotidienne mais elle n'a pas encore été mise en place et elle ne le sera pas avant six ou huit mois, alors que situation s'est déjà trop dégradée. Quand on voit que d'anciens ministres ont menti devant tout le monde, devant leur pays, c'est donc cela l'exemple que l'on donne aux Français ? Notre pays a besoin d'un changement politique radical, j'y ai cru avec Macron, mais j'ai vite été déçu.

Vous envisagez de participer aux prochaines présidentielles ? 

Nous, notre mouvement, nous n'avons pas besoin de la politique pour vivre, et ne sommes pas en recherche de mandat. Peut-être un jour, car nous en avons de toute façon l'intention et nous irons aux prochaines élections présidentielles, nous présenterons des candidats. Moi personnellement, j'ai déjà un beau parcours, j'ai fait des choses extraordinaires. Si toutefois dans l'intérêt de la France je dois y aller et que cela va dans le sens de l'intérêt général peut-être que j'y songerai, mais à ce stade non. Mon but initialement c'était les législatives, je considère que j'ai une certaine expertise en terme de sécurité, je trouvais donc intéressant qu'il y ai des gens qui puissent parler de la sécurité, mais je n'ai pas été élu.

Pensez-vous que le manque de fermeté que vous reprochez à l'État a des conséquences sur le terrorisme en France ? 

Bien sûr. Ce sont des jeunes qui, lors de leur arrivée en France n'ont pas assez été pris en compte, on ne leur a ni expliqué les règles de notre pays ni réservé un bon accueil. Cela a créé une espèce de marginalisation de toute une tranche de la population qui ne se sent pas faire partie de la communauté nationale. Ils n'ont pas de perspective d'avenir donc ils vont s'en trouver d'autres, et il y a toujours des gens malins qui pêchent tous ces jeunes. Nous on ne leur a rien promis, l'Etat ne leur offre pas de perspective d'avenir et n'a pas fait ce qui aurait dû être fait. Il en paie aujourd'hui la facture et va continuer à la payer. C'est le fruit d'une politique d'une dizaine d'années, en France il y a un certain nombre d'individus prêts à agir et le jour où ils agiront cela va être une catastrophe. Je suis très inquiet pour notre pays, il faut absolument réagir et il n'y a pourtant aucune réaction de l'Etat. Pour mener une politique efficace il faut du courage, or du courage je n'en ai pas beaucoup vu jusqu'ici.

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