Dans cette ville située à 45 minutes de Lyon en Isère, une campagne de sensibilisation fait polémique. Maniant le second degré avec plus ou moins de finesse, trois affiches appellent les habitants à faire attention à leurs déchets. Au risque d'en stigmatiser certains ?
Sur l'affiche, des jeunes sont assis sur le dossier d'un banc, capuche sur la tête et jogging dans les chaussettes. Une inscription, en larges lettres blanches sur fond noir, déclare : "Ils n'ont aucun respect..." Les points de suspensions font tout le sel de l'affiche. Sous l'image, la phrase continue, en petits caractères : "...pour les pollueurs et sensibilisent leurs camarades afin que le parc des Lillates reste propre".
La municipalité de Bourgoin-Jallieu, ville située dans le Nord-Isère à une cinquantaine de kilomètres de Lyon, a décidé de s'attaquer au problème de la propreté urbaine. Dans une campagne de sensibilisation basée sur trois affiches différentes, elle joue la carte du second degré. Un sens de l'humour qui ne plaît pas à tout le monde.
Une campagne stigmatisante ?
Pour André Borne, élu (PS) d'opposition au conseil municipal, cette campagne de sensibilisation est du même acabit que l'affiche du "nouvel ami" de la police municipale de Bézier : "C'est malsain, on fait croire que la propreté et le développement durable, c'est du sécuritaire. On pointe les jeunes et les artisans." Pour lui et pour de nombreux Berjalliens qui se disent choqués sur les réseaux sociaux, le second degré n'est pas de bon ton et peut être difficile à percevoir. "Une campagne pour sensibiliser les gens à ne pas jeter leurs détritus n'importe comment doit être bienveillante, ludique. Là, on joue avec le climat anxiogène qui pèse en France avec les attentats. Ce n'est pas le moment !"
La campagne a été imaginée par le service communication de la mairie et validée par l'équipe municipale. Le maire de Bourgoin-Jallieu, Vincent Chriqui, défend le parti pris de la campagne d'affichage : "Le message est humoristique et décalé pour faire naître une prise de conscience. On joue sur les idées reçues et sur le choc que produit l'image". Quand on lui fait remarquer que le texte qui peut être vu comme stigmatisant est bien plus gros que celui qui retourne le préjugé, le maire Les Républicains assume la stratégie : "Le texte en petits caractères, c'est volontaire. L'en-tête attire l'attention, les personnes vont voir de plus près et cela induit une prise de conscience. On nous dit que la campagne stigmatise les jeunes, mais elle fait l'inverse !"
Les affiches sont en place depuis deux semaines dans la ville. Le maire déclare n'avoir eu que des retours positifs. Son opposant affirme pour sa part avoir le soutien de centaines d'habitants. Reste à savoir si la campagne portera ses fruits et poussera les Berjalliens, indignés, stigmatisés ou pas, à respecter un peu plus la propreté de leur ville.