Caravanes à Miribel : les autorités se renvoient la balle

Les 110 caravanes installées depuis le 30 juillet au Grand Parc de Miribel-Jonage sont sur le départ ce mardi. Les responsables du site s’inquiètent toutefois de voir se multiplier les grands passages. En cause, l'absence de zone d'accueil dédiée dans l'aire de la communauté de communes de Miribel. La préfecture de l'Ain pourrait bientôt prendre des mesures radicales.

Ce mardi, les gens du voyages qui s'étaient installés au cœur du parc de Miribel-Jonage commençaient à atteler les 110 caravanes qu'ils avaient stationnées à proximité du lac. Arrivés le 30 juillet dernier, le groupe se présentant comme des évangélistes, avait obtenu de la préfecture de l'Ain un accord exceptionnel pour rester 4 jours sur le site. Une petite rallonge avait été finalement accordée "en échange de leur parole qu'ils partiraient le 6 août". Lundi encore, la direction du Grand Parc de Miribel-Jonage assurait que, passé ce délai, elle engagerait une procédure administrative pour occupation illicite du domaine public. Car un point l'inquiétait : l'installation du groupe "avec des activité polluantes (lavage de voiture , douche, sanitaire, )" à proximité immédiate de la zone de captage d'eau potable pour la réserve du grand Lyon.

Mais finalement, aucune procédure n'est pour l'instant lancée, le groupe affirmant avoir trouvé un autre terrain.

Un problème récurrent

Pour autant, du côté de la direction du Grand-Parc, le soulagement n'est que partiel. Et pour cause, un autre groupe de 150 caravanes pourrait venir s'installer dimanche prochain. Information confirmée par une source proche de la préfecture. Ce serait alors le 7e passage d'un grand groupe depuis le début de la saison estivale au parc; avec à chaque fois, ou presque, le déclenchement d'une procédure administrative. Démarche coûteuse et longue.

Car le Grand-Parc ne peut pas bénéficier par la Préfecture d'une procédure accélérée d'expulsion. En effet, la communauté de communes de Miribel et du plateau (CCMP) sur le territoire de laquelle se trouve l'aire où se trouvent les caravanes, n'est pas en règle avec le schéma d'accueil départemental des gens du voyage.

Un problème connu de longue date qui agace autant à la préfecture de l'Ain qu'à la direction du grand-Parc. "Nous travaillons au corps les élus de la communauté de commune depuis plus de 3 ans. Nous nous sommes rendus sur place, nous les avons rencontrés, mais rien n'a pour l'instant abouti", précise Lamine Sadoudi, chef de cabinet du préfet de l'Ain. Les obligations du schéma territorial datent de bien plus que trois ans et le problème de Miribel est identifié. Difficile alors d'engager des procédures lorsque des caravanes s'installent sur le parc.

Un schéma départemental "inadapté"

Du côté de la CCMP, on se défend de toute mauvaise volonté. "Il y a tout un tas de raisons qui expliquent que nous ne pouvons pas être aujourd'hui en conformité avec le schéma départemental d'accueil des gens du voyage", explique le porte-parole de la communauté de commune en cause. "Ce schéma ne prend pas en compte nos spécificités territoriales et foncières. Nous avons une très forte densité de population le long de la route nationale et sur l'ensemble de notre territoire, relativement réduit de 64 km2", explique-t-il.

Selon lui, la CCMP ne disposerait pas d'un terrain de 4ha lui appartenant, nécessaire à la création d'une aire d'accueil de grands passages. Pourtant, du côté de la préfecture, le chef de cabinet précise que ses services ont déjà fait 4 propositions de terrain, toutes refusées par les élus locaux. Un propos qui ferait presque sourire à la CCMP : "Dans les propositions, on retrouvait des terrains qui ne respectaient même pas les directives du schéma territorial : trop petits, en zone inondables, où des endroits où on savait bien que les gens du voyage n'iraient pas".

Le Parc "arrange bien"

Joint par Lyon Capitale, un élu de la CCMP avoue que la présence du parc de Miribel-Jonage "arrange bien". "Les caravanes ne sont pas en plein centre-ville et cela évite d'avoir à se lancer dans des installations coûteuses sans certitude que cela règle le problème", glisse-t-il.

Le porte-parole de la CCMP confirme d'ailleurs cette crainte d'un investissement inutile : "La préfécture pousse à ce que les aires de grands passages se fassent, mais il nous faut trouver un terrain viable dans le temps. Investir sur un terrain où l'on sait que les gens du voyage n'iront pas, c'est un non sens. Il faut que nous puissions les accueillir dans des condidtions décentes. Et nous aimerions avoir également la certitude que si la collectivité respecte les prescriptions, les autorités prendront leurs responsabilités pour évacuer les campements sauvages", appuie-t-il en citant le cas récent de Colombier-Saugnieu. "Alors que la zone disposait des installations en règles, l'expulsion n'a pas eu lieu puisqu'il n'y avait pas de trouble à l'ordre public. Les élus ne sont forcément pas enclins à faire des investissements si les autorités ne font respecter la loi derrière".

La préfecture pourrait faire valoir son pouvoir de substitution

Mais le problème des installations de gens du voyage au parc de Miribel-Jonage se répète inlassablement et crispe de tous les côtés. Alors l'annonce d'un éventuel passage de 250 caravanes en septembre n'arrange rien.

A la préfecture de l'Ain, on réfléchit même sérieusement à faire jouer le pouvoir de substitution du préfet sur ce domaine. En clair, c'est lui qui pourrait prendre la main sur ce dossier en lieu et place de la CCMP et décider la construction de la zone d'accueil sur un terrain qu'il aura choisi. "Il va falloir que nous fassions le constat d'échec des politiques locaux sur cette question. C'est toujours délicat, mais là, clairement, il faut faire évoluer la situation", prévient Lamine Sadoudi. Une décision qui irait dans le sens des dernières directives de Manuel Valls.

À la CCMP, cette perspective ne réjouit pas vraiment : "Nous savons qu'il y a cette épée de Damoclès au dessus de notre tête et je sais que les élus regretteront cette décision si elle était prise", confie le porte-parole qui ne peut s'empêcher de s'interroger : "Je serais néanmoins curieux de savoir sur quel terrain appartenant à la CCMP la préfecture pourrait créer cette aire, sauf à la construire sur un terrain privé, au quel cas, il faudrait exproprier".

Pour le moment c'est donc le statu quo à Miribel-Jonage, la préfecture aboie, mais les caravanes passent.

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