Alors que le festival de cinéma du Grand Lyon Lumières 2009 a été inauguré hier soir en grande pompe, avec plusieurs dizaines de stars, les employés des CNP se sont mis en grève mercredi.
Une grève en plein festival clinquant, et une lettre annonçant le licenciement du programmateur. Les deux évènements, bien que non liés, augurent du pire pour les cinémas art et essai de la presqu’île. Les employés des CNP avaient prévu depuis plusieurs jours de faire grève le premier jour du festival lancé par l’Institut Lumière, auxquels ils sont pourtant associés en diffusant une partie de la programmation. “Nous voulions informer un maximum de spectateurs de notre situation”, explique un représentant des employés, qui ajoute que la grève ne se poursuivra pas. Un grand drap noir recouvrait donc aujourd’hui l’entrée du cinéma Terreaux, affichant le numéro de téléphone portable de Galeshka Moravioff, le propriétaire des lieux, “afin que les gens puissent directement s’adresser à lui pour savoir ce qu’il se passe aux CNP”.
Après avoir fermé en toute discrétion l’une de ses trois salles, celle d’Odéon, au mois d’août, le patron parisien était venu jusqu’à Lyon il y a deux semaines, afin de procéder à neuf licenciements parmi ses vingt-six employés. A ce moment, il avait assuré à Lyon Capitale qu’il ne comptait pas fermer les deux salles encore ouvertes, promettant même d’y faire des travaux de réhabilitation (climatisation, chauffage et nettoyage) plus que nécessaires. Interrogé sur sa position quant au programmateur des lieux, Marc Artigau, avec lequel il a toujours entretenu des relations très chaotiques, Moravioff avait répondu : “pour le moment, je ne fais rien”. Mais mercredi matin, c’est une convocation à un entretien préalable au licenciement, envoyée par voie d’huissier, qu’a trouvée Marc Artigau dans sa boîte aux lettres.
Au revoir au programmateur culte des CNP
“Je reconnais que Marc Artigau est un excellent programmateur, nous avait déclaré Galeshka Moravioff, mais il n’est pas du tout gestionnaire. Et puis on ne peut pas dialoguer avec lui, il a quasiment des problèmes psychiatriques!” Ambiance. Marc Artigau, quant à lui, semble tout simplement usé. Cinéphile reconnu pour son travail de tête chercheuse, il travaille pour les CNP depuis leur création, avant même que le metteur en scène Roger Planchon n’en prenne la tête et finisse par les vendre à Galeshka Moravioff, en 1998. Très énervé, celui qui a permis au public lyonnais de découvrir des réalisateurs comme Almodovar, Lynch, Kitano ou encore Moretti à une époque où ils n’étaient pas encore connus, se dit “soulagé”. Tout en ne pouvant s’empêcher de pester sur la vente “abusive” des CNP par Planchon, entre autres propos très salés.
“Finalement, Moravioff n’est qu’un épiphénomène, cela fait longtemps que toute l’histoire des CNP est scandaleuse, s’exclame-t-il. Moi j’ai trainé tout ça comme un boulet, je vais m’en aller, c’est comme ça, tout finit par mourir de toutes façons.” Avec le licenciement de Marc Artigau, l’aspect art, essai mais surtout recherche qui faisait la singularité des CNP, économiquement difficile à assumer, disparaitra sans doute. Les distributeurs de films ont, de leur côté, reçu un courrier leur indiquant que Galeshka Moravioff se chargera désormais lui-même de la programmation des salles. Les employés des cinémas, quant à eux, comptent informer le public de leur situation avant chaque séance des films diffusés dans le cadre du festival Lumières.