Compétitivité et réformes structurelles : ce que prépare Bruxelles

Un projet de contractualisation des politiques budgétaires est préparé tant par la Commission que par le président du conseil européen, Herman Van Rompuy. Objectif : soutenir les réformes structurelles par des financements spécifiques, sur une base volontaire. En vue, une plus grande convergence économique. Faut-il y voir un moyen d'accroître la pression sur les Etats ou une volonté d'atténuer l'austérité actuelle ?

De notre envoyé spécial à Bruxelles.

En 2000, les pays de l'Union Européenne signaient l'agenda de Lisbonne : l'UE serait "l'économie de la connaissance la plus dynamique et la plus compétitive du monde d'ici à 2010". Rien de moins. Dix ans plus tard, l'Europe s'enfonçait dans la crise des dettes souveraines, plongée dans une tenace récession.

Compléter la discipline budgétaire

Echaudée par l'ampleur des déficits et des dettes des Etats, la Commission européenne a d'abord renforcé le contrôle budgétaire. 24 pays sur 27 étaient l'an dernier sous le coup d'une procédure de surveillance pour déficit excessif. Théoriquement des sanctions peuvent tomber, qui prennent la forme de dépôts auprès de la Banque centrale européenne voire d'amendes pour tout pays qui laisserait filer ses comptes malgré les recommandations de Bruxelles. Selon la règle dite du Six-pack adoptée en 2011, c'est la Commission européenne qui lance les hostilités, validée par le Conseil à moins qu'une majorité qualifiées de pays ne s'y oppose. Il est à noter que la logique est inversée par rapport au pacte de stabilité et de croissance signé en 1997 à Amsterdam où il fallait qu'une majorité de pays soutiennent la sanction pour qu'elle s'applique. En somme, avant la punition était l'exception, elle est désormais la règle.

Le volet compétitivité pourrait faire l'objet de nouvelles règles cette année. Dans les cartons d'Herman Von Rompuy et de la Commission, figure un "instrument de convergence et de compétitivité". Officiellement, il viserait "à aider les Etats membres à mettre en œuvre des réformes structurelles qui auraient un impact négatif à court terme et un coût politique et économique élevé". Il s'agit d'une contractualisation, avec la Commission, des politiques budgétaires des Etats : recevraient des financements - par exemple pour la formation professionnelle - ceux qui appliqueraient la feuille de route préalablement édictée par Bruxelles. La Commission y voit une étape intermédiaire avant la mise en place d'Eurobonds. Cet instrument pourrait conduire à un budget pour la zone euro. Ses recettes ne sont pas arrêtées : une contribution de chaque Etat membre, l'émission d'emprunts européens ou une taxe sur les transactions financières sont évoquées.

Convergence fiscale et sociale pour Paris

"Ce changement ne nécessite pas un traité car il s'agit d'une contrat entre la Commission et les pays de l'euro-zone volontaires", explique Simona Amati, directrice du cabinet Kreab & Gavin Anderson. D'après elle, le Royaume-Uni et la Suède sont très réticents à ce nouveau dispositif, y voyant des dépenses supplémentaires – s'il s'applique uniquement aux pays de la zone euro, ils ne seront toutefois pas concernés. La France pousse ce mécanisme, qui pourrait renforcer la solidarité européenne. "Ca peut être un bon instrument de convergence, pas seulement budgétaire, mais aussi fiscale et sociale", nous a confié un diplomate français.

L'Allemagne, elle, insiste sur la conditionnalité des aides, percevant un outil supplémentaire pour pousser l'adoption de réformes structurelles. "La commission, sous la pression de l'Allemagne, est en train d'imposer une Europe à l'Allemande, avec une flexibilité du marché du travail, l'allongement de la durée de cotisation pour les retraites et le raccourcissement de la durée d'indemnisation du chômage", s'inquiète le collaborateur d'un député européen socialiste.

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