Jeudi 21 décembre s'est tenue à Lyon la conférence sur la planification de la transition écologique. L’objectif : engager une discussion à l’échelle de la région sur les leviers qui doivent permettre de réduire les émissions de carbone.
Le tour de France des COP territoriales s'est poursuivi à Lyon jeudi 21 décembre. Initié cet été par la Première ministre Elisabeth Borne, ce rassemblement réunissant plusieurs acteurs associatifs, élus locaux et représentants de l'État vise à limiter les émissions de carbone. Devant une assemblée pleine à craquer, en présence de Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, Laurent Wauquiez, président de la région et Fabienne Buccio, préfète de la région Auvergne-Rhône-Alpes, le ping-pong politique a duré plusieurs heures.
L'industrie et les transports, enjeux clés de la région
La Région et l’Etat trouveront-ils un accord au sujet de la réduction des émissions carbone ? La question mérite d'être posée, d'autant plus alors que leurs relations se sont distendues depuis plusieurs semaines sur cette question. Une partie d'échec semble se dessiner entre Christophe Béchu et Laurent Wauquiez. "L’idée de la COP, c’est de mesurer la responsabilité de chacun sur le territoire”, explique Christophe Béchu. A titre d'exemple, la région Auvergne Rhône-Alpes représente 12 % de l’objectif national de réduction des émissions, avec en ligne de mire l’industrie et le transport. Pour ce dernier volet, le ministre de la Transition incite au développement de la voiture électrique sur le territoire, en saluant le budget de la région qui s'élève à 5,7 milliards d'euros d'investissement dans les transports.
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Côté région, Laurent Wauquiez donne d'emblée le ton, ce dispositif, jugé “technocrate”, ne doit pas oublier l’action et les décisions des élus locaux.
Wauquiez et son “patriotisme environnemental”
En matière d’écologie, le président de la Région, Laurent Wauquiez ne tergiverse pas et pose en chevalier blanc des élus locaux. Pour lui, répondre aux objectifs de cette planification, c’est avant tout ramener les acteurs locaux sur la scène nationale. “Il faut une méthode”, lance le représentant Les Républicains (LR) devant une salle comble. “Il faut respecter les élus, travailler avec les territoires, écouter les parlementaires et exécutifs locaux. Et surtout, ne pas imposer la mise en place de la transition écologique des bureaux à Paris”. Pour répondre à ces objectifs, Wauquiez évoque un “patriotisme environnemental”. Il appelle notamment à la “renaissance industrielle”, c’est-à-dire, retrouver l'activité industrielle sur le territoire pour limiter l’importation.
“Nous ne réussirons pas l’écologie avec des normes imposées par le pouvoir public, déconnectées du reste de la société civile (…) Nous ne réussirons pas l’écologie si nous faisons contre nos entreprises, ou contre nos agriculteurs", plaide le président de région, qui a déjà dans le viseur la prochaine élection présidentielle, où il se verrait bien incarner la droite.
Le ZAN, point de friction entre la Région et l'État
La transition est presque parfaite. Inconcevable pour Laurent Wauquiez de ne pas marteler à nouveau son opposition à l’objectif du “Zéro artificialisation nette” (ZAN) issu de la loi Climat et Résilience du 22 août 2021. L’Auvergne Rhône Alpes, représentée par Laurent Wauquiez est la seule région de France à ne pas vouloir territorialiser les objectifs du ZAN imposés par l’Etat.
Ce torchon chaud entre la préfète Fabienne Buccio et le président de région a inévitablement atterri sur la table de cette COP territoriale. Soutenu par 2 000 édiles de la région, ce dernier, qui ne s’adresse d’ailleurs jamais directement à la préfète sur le sujet a récemment envoyé une lettre à Elisabeth Borne pour dénoncer "une loi technocratique qui ne répond pas aux enjeux fondamentaux du logement, de l’attractivité de nos territoires et de l’environnement".
Pour mémoire, pour tendre vers l’objectif zéro artificialisation nette en 2050, la loi impose une étape intermédiaire pour 2031 aux collectivités locales et groupements de communes. À savoir une réduction de 50% de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers par rapport à celle mesurée entre 2011 et 2021 et ainsi lutter contre le réchauffement climatique.
“Une idée à laquelle nous adhérons tous”, admet l'élu LR. Mais, tempère t-il, “au nom d’une belle idée, on peut commettre beaucoup de folies”. Laurent Wauquiez appelle donc l'État à remettre ce texte “compliqué” sur "l’établi", estimant que “notre démocratie va mal" et que "ne pas écouter les maires et les élus locaux dans une démocratie, c’est très dangereux.”
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Réunions régionales, COP départementales… les prochaines étapes
Le ministre de la transition écologique, Christophe Béchu, admet volontiers la complexité de ce texte. "J'ai même sorti un document ZAN pour les nuls", ironise l'ancien maire d'Angers, et de préciser, “On ne donne le pouvoir à l’Etat que si les élus régionaux refusent de s’en saisir”. Pour l’élu de la majorité, les objectifs ne seront pas atteints “si on n’embarque pas la population”. La préfète de la région, Fabienne Buccio, à quant à elle précisé la feuille de route et a annoncé des “réunions régionales sur différentes thématiques, comme l’agriculture ou l’industrie”. Des COP à l’échelle départementale seront aussi organisées prochainement.
Après plus de deux heures de présentation, certains représentants de la société civile semblaient pour le moins dubitatifs. “J’aurais préféré une conférence d’un seul parti, plutôt que de deux partis”, lâchait un élu local, illustrant bien la difficulté pour la Région et l'État d'accorder leurs violons sur la réduction des émissions de carbone.
Bal d'hypocrites car la croissance ne peut pas être décorrélée des consommations d'énergie, et la croissance est obligatoire en restant dans un système monétaire.