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Corbas : la prison-modèle a le plus fort taux de suicide en France

Ces statistiques sont tirées du rapport 2012 de l'observatoire national de la délinquance. La "déshumanisation" de l'établissement, couplée à son faible taux d'encadrement, est une fois de plus pointée. Les personnels évoquent cependant des conditions de travail en cours d'amélioration.

Avec 8 disparitions volontaires, Corbas est l'établissement pénitentiaire qui a connu le plus de suicides en France en 2011, devant Fleury Mérogis (6), Fresnes, les Baumettes, Toulouse Seyses et Val-de-Reuil dans l'Eure (4). Ramenée au nombre de détenus, la comparaison est encore pire pour la prison rhodanienne. Elle accuse un taux de 89 suicides pour 10 000, très loin devant Val-de-Reuil (58) et Rennes-Vezin (54). Ces chiffres émanent du rapport 2012 "La criminalité en France" de l'observatoire national de la délinquance, communiqué la semaine dernière. Au total, 116 détenus ont mis fin à leurs jours en France au cours de l'année dernière.

Un sentiment de déshumanisation et de solitude

La direction de l'établissement n'a pas souhaité réagir à ces statistiques. Depuis son ouverture en 2009, Corbas n'a cessé d'être décriée. Et justement à cause de sa modernité. Les prisonniers y sont davantage isolés qu'ailleurs et le taux de surveillants y est moins nombreux, grâce à des caméras et autres dispositifs mécanisés. "A St-Paul St-Joseph, pour chaque porte franchie par un détenu, c'était un surveillant qui l'ouvrait. Aujourd'hui tout est automatisé", explique Emmanuel Chambaud, délégué syndical Unsa. S'en suit un sentiment de déshumanisation et de solitude. Certains drames se produisent lorsque le passage à l'acte est surtout vécu comme un appel au secours, par exemple avant une ronde. Mais le surveillant attendu ne vient pas et le geste irrémédiable est accompli. Bourg en Bresse ou Nancy, ouverts récemment, ont accusé 3 suicides l'an dernier.

Un lancement catastrophique

Fondateur de l'Observatoire international des prisons (OIP), Bernard Bolze juge plus sensible les maisons d'arrêt comme Corbas où sont retenus des personnes en attente de jugement, réputées plus fragiles. "Il existe aussi des états d'esprit propres à un établissement donné. On trouve des formes de maltraitantes pratiquées par des personnels, peut-être eux-mêmes en souffrance", poursuit-il. Ce fut justement le cas à Corbas, à son ouverture en 2009. "En un mois, on avait dépassé les capacités d'accueil", se rappelle le syndicaliste UNSA. Les personnels se plaignaient de violence au quotidien, provoquant des arrêts de travail à répétition.

C'est dans ce climat de tension que des suicides à répétition sont parfois à déplorer : Bernard Bolze constate des phénomènes de contagion. "Un suicide est un traumatisme pour les autres détenus qui affecte leur moral. Il y a aussi le passage à l'acte d'une personne qui peut pousser un autre détenu à faire de même. On voit certains prisonniers le faire parce qu'ils savent que ça va affecter l'équipe de surveillants", explique-t-il.

Emmanuel Chambaud est cependant optimiste. Il explique qu'avec le changement de direction survenu en septembre 2010, les conditions de travail se sont améliorées. Et des personnels supplémentaires ont été obtenus fin 2011. "On verra dans les prochaines statistiques que le nombre de suicides a bien baisé", assure-t-il.

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