La décision du gouvernement de fermer les bars dans la Métropole de Lyon à 22h au maximum dès lundi suscite incompréhension et désarroi chez les professionnels du secteur. Peu s'attendaient à une telle décision. Et beaucoup redoutent de devoir fermer tout court dans quelques jours, comme à Marseille.
Ils sont tombés de très haut. "J'étais en service. Mon patron a crié dans le bar "Mais c'est pas possible, mais c'est pas possible". On était tous estomaqués. On commençait à retrouver notre clientèle, on fait très attention depuis le déconfinement et là...", peste ce jeudi un serveur d'un bar de la rue de la Monnaie, à Lyon 2e.
"Au printemps, on s'y attendait, on comprenait. Là, j'ai échangé avec pas mal de mes collègues à Lyon. Personne ne comprend rien. Personne ne s'y attendait. Ce n'est pas possible !", ajoute le serveur. Tous les bars de la Métropole de Lyon (59 communes dont Lyon, Villeurbanne, Caluire, Vénissieux, Oullins) devront fermer au maximum à 22h à partir de lundi. Pour 15 jours minimum (lire les détails des nouvelles annonces à Lyon ici).
Lundi, les patrons de bar rassurés par le Préfet du Rhône
Mardi dernier, le 15 septembre, les propos du Professeur Bruno Lina, virologue lyonnais responsable du centre national de référence virus des infections et membre du très influent conseil scientifique, avaient plutôt rassuré les professionnels du secteur : "on n'est pas obligés de fermer des bars, de fermer des restaurants. Aujourd'hui, ce n'est pas du tout dans le calendrier (à Lyon). On est davantage sur le renforcement des stratégies de dépistage. Avec comme idée d'apporter le diagnostic à tous ceux qui sont infestés pour qu'ils s'isolent et que ça casse les chaînes de transmission".
A Lyon, c'est l'incompréhension. Personne ne s'attendait à une telle annonce. Personne ne s'attendait à cela aussi vite. Lundi, encore, le 21 septembre, les professionnels du secteur avaient encore été rassurés par le Préfet du Rhône, Pascal Mailhos.
Confiance réciproque entre patrons de bars et Préfecture
Lors d'une conférence de presse de présentation de nouvelles mesures pour lutter contre la propagation de l'épidémie, le Préfet du Rhône avait "épargné" les bars et les restaurants. Pas de fermeture plus tôt des bars. Au contraire, une large concertation avec les professionnels du secteur. De la confiance réciproque.
"On a fait le pari d'engager un véritable dispositif de discussion et de partenariat avec les professionnels, insistait alors le Préfet. Plus les établissements sont fermés tôt, plus les consommateurs sont sur la voie publique. C'est le pari que nous faisons". C'était lundi. Deux jours seulement avant les annonces détonantes du Ministre de la Santé.
En gros, la Préfecture estimait qu'il fallait mieux que la population consomme dans des bars ou dans des restaurants, avec des conditions sanitaires encore plus strictes, plutôt qu'elle soit disséminée aux quatre coins de la ville, dans les rues ou sur les Berges. Ou en nombre dans les appartement privés.
Le coup de massue mercredi soir
Le Préfet du Rhône avait aussi prévenu de la fermeture immédiate des établissements qui ne respecteraient pas strictement les conditions sanitaires. Mardi, d'ailleurs, un jour avant les annonces d'Olivier Véran, 30 établissements ont été contrôlés à Lyon et trois procédures ont été ouvertes contre trois d'entre eux pour non-respect des règles sanitaires liées à la lutte contre le Covid-19.
Les professionnels se sentaient "protégés". Ceux qui ne respectent pas les règles prennent leurs risques et responsabilités, tant pis pour eux, les autres peuvent continuer à travailler.
Et là, coup de massue mercredi soir. “On s'était déjà mis des restrictions pas possibles pour respecter les normes sanitaires. Bien sûr, parmi les patrons de bars, il y a quelques cons qui ne respectent pas les règles, mais on était sur la bonne ligne. On travaillait avec la préfecture qui commençait à mettre au pas ces gens-là” , explique Laurent Duc, le président de l'union des métiers et des industries de l'hôtellerie du Rhône (Umih).
Les patrons de bars craignent la fermeture totale, comme à Marseille
Laurent Duc “ne comprend pas que les professionnels n'aient pas été prévenus par le gouvernement” et regrette un manque de concertation de la part de l'État alors “qu'un dialogue important” avait été mis en place localement, notamment avec la Préfecture. “1000 établissements vont déposer le bilan parce qu'après le premier confinement, ils ne vont pas résister à cette nouvelle décision. Le chômage partiel marche un temps, mais à un moment donné, il faut bien payer nos charges", ajoute le président de l'Umih.
Même constat chez un patron de bar-restaurant de la Presqu'île de Lyon. "C'est la catastrophe. Nos clients viennent nous voir depuis ce (jeudi) matin. Personne ne comprend. Personne. Et puis bon, le gouvernement ferme les bars et les restaurants à Marseille dès lundi. On s'attend à la même décision à Lyon dans les jours à venir...". (A Marseille, tous les bars et restaurants doivent fermer à partir de lundi, toute la journée, et pour 15 jours minimum).
Beaucoup de gérants de bars et de restaurants avaient aussi ce sentiment, ce jeudi, à Lyon. Que Lyon va subir le même sort sous peu.
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Dommage que pendant des semaines on ait laissé une minorité de bars (notamment dans le vieux Lyon) faire n'importe quoi. Il aurait suffit de les sanctionner dès le départ plutôt que de pénaliser tous ceux qui ont fait de gros efforts pour sécuriser leur service.