Comment vit-on l'épidémie du coronavirus à l'étranger ? Quel regard porte-t-on sur la situation en France ? Le témoignage de Dilys Lelli , résidente à Singapour.
Comment vivez-vous la crise liée au coronavirus ?
Nous sommes une famille française de cinq personnes (avec 3 enfants) expatriées à Singapour depuis bientôt six ans. Nous vivons dans une maison spacieuse avec piscine sur la cote Est du pays, avec notre nounou Philippine (qui vit avec nous depuis presque six ans également). Nous sommes à un kilomètre de la plage et d'un immense parc qui longe la mer. C'est très agréable!
Les mesures prises par les autorités sont-elles globalement respectées ? Comment jugez-vous la stratégie sanitaire mise en place ?
Le coronavirus est officiellement arrivé à Singapour en janvier 2020. Quelques cas par jour seulement au début, puis ça s'est accéléré depuis mi-mars. Début avril, nous sommes à plus de 1 000 personnes infectées, malgré le traçage intensif depuis le début de l’épidémie et la fermeture (quasi totale) des frontières depuis le 24 mars (plus de transit ni visiteurs autorisés, et mis en quatorzaine des résidents de retour a Singapour, qui ne peuvent revenir qu'avec une autorisation du ministère du travail). Le gouvernement communique quotidiennement sur la situation à Singapour (Whatsapp) et sur les mesures prises et à respecter. Ces dernières se sont considérablement durcies depuis le 7 avril: restaurants fermés (encore ouverts pour le take-away), les bars sont fermés depuis quelques semaines déjà), plus de regroupement de personnes autorisés (chez soi ou à l’extérieur), bureaux fermés (télétravail pour tous, sauf pour les business juges essentiels), écoles fermées (homeschooling), et seules sorties autorisées pour faire ses courses de nourriture (avec masque et distance sociale de sécurité d'un mètre au moins), ainsi que pour faire un peu de sport ou sortir les enfants. Les aires de jeux pour enfants sont fermées mais pas les parcs, qui sont donc pris d'assaut.
Le gouvernement appelle à la collaboration de tous pour respecter ces mesures et en finir au plus vite (l'ensemble de la population ne semble pas encore respecter a 100% l'ensemble des mesures requises). Nos enfants sont à l'école canadienne internationale, qui a décidé de fermer avant l'annonce officielle du gouvernement, c'est-a-dire depuis 3 semaines déjà. Les enfants ont des meetings zoom (3 par jour) avec leur classe, et même si le rythme est très intense entre combiner nos deux boulots et le homeschooling de nos trois enfants, on ne peut pas se plaindre car nous avons des conditions privilégiées.
Que pensez-vous du système de santé de votre pays de résidence ?
Singapour dispose d'un bon système de santé, même s'il est onéreux, et le gouvernement nous dit s'être préparé a cette situation depuis le SRAS. Ils nous disent contrôler la situation. Le gouvernement a récemment donné un masque ré-utilisable à chaque résident. Je pense que le pays pourra en venir à bout dans les prochains mois si tout le monde collabore et respecte les mesures de "circuit breaker".
Les travailleurs étrangers (sous-entendu ceux qui sont venus à Singapour pour gagner de l'argent et faire vivre leur famille résidant en-dehors de Singapour) sont actuellement beaucoup touchés par l’épidémie (car ils logent dans des dortoirs) -- le gouvernement s'est engagé à prendre en charge le coût des traitements et à protéger ceux qui sont sains (ces derniers ont été relocalisés dans des logements à l’extérieur des dortoirs).
Vu de l’étranger, quel regard portez-vous sur la situation de la France et la gestion de la crise ?
La situation en France est préoccupante et troublante (référence à la pénurie de masques et au maintien du 1er tour des élections municipales en pleine épidémie, par exemple, et la récente crise hospitalière). Le gouvernement semble avoir tardé à réagir. Nous suivons quotidiennement l’évolution de la situation et prenons des nouvelles de nos familles tous les jours.