La France a gagné, lundi 28 janvier 2013, la 13e Coupe du monde de pâtisserie, le "Saint-Gaal" de la profession, au Sirha, à Lyon. L'équipe se compose de Quentin Bailly, chef chocolatier chez Philippe Rigollot, à Annecy, de Joffrey Lafontaine, chef pâtissier chez François Gimenez, à Lyon et de Mathieu Blandin, chef pâtissier de la maison Pascal Caffet à Troyes. Interview du capitaine annécien Quentin Bailly.
Lyon Capitale : Que ressent-on quand on est Champion du monde de pâtisserie ?
Quentin Bailly : Je suis sur un petit nuage. Je suis en train de petit déjeuner avec mes compagnons (il est 10h30 lors de l'interview, ndlr). On réalise que c'est enfin fini. On est soulagé que ce soit bien passé, et très bien terminé. On avait beaucoup d'intérêt sur le fait de terminer ce qu'on avait prévu de faire. Le principal, pour nous trois, était de ne pas regretter. Quand le jury a annoncé les résultats, j'avoue que ça a été une très grosse surprise.
Vous décrochez la Coupe du monde de pâtisserie avec un dessert aux formes d'un bolide des 24 Heures du Mans. C'était un pari risqué pour un dessert sucre-chocolat qui évoque plutôt la féminité, non ?
C'est vrai. Notre dessert évoque la puissance avec le monde de la Formule 1, alors que le chocolat évoique traditionnellement la nature, la suavité, la douceur, la féminité. On a voulu cassé les codes habituels du chocolat.
Qu'est-ce qui voius a poussé à participer à la Coupe du monde de pâtisserie ?
La Coupe du monde, ça fait 10 ans que je veux la faire. C'est un rêve de gamin. Là, je ne réalise toujours pas. Je profite du moment présent. Ce n'ets pas mon premier concours, j'en ai déjà fait une dizaine d'autres, moins prestigieux. J'ai toujours aimé la compétition. J'ai joué au foot à haut niveau jusqu'à mes 15 ans. Dans un concours, on se remet en question, il y a une notion d'effort, de dépassement de soi que j'aime beaucoup. Il y a une sensation de se faire mal pour arriver à quelque chose de beau.
Comment vous-êtes vous préparez ?
La Coupe du monde de pâtisserie, c'est 1 an de préparation. Il y a d'abord eu une sélection nationale : l'équipe de France sélectionnait, sur dossier, 6 candidats par département, en chocolat, en glace et en pâtisserie. Ensuite, ils ont pris les 3 meilleurs dans chaque spécialité. C'est tombé sur nous. Tous les trois, on faisait déjà chacun de notre côté des concours. Je connaissais un peu Mathieu, le Lyonnais. On s'était croisé en compétition. Quant à Joffrey, je l'ai rencontré pour cette Coupe du monde. On a chacun notre caractère. On était 3 coqs dans une basse cour, et il fallait s'entendre. C'est déjà un gros boulot.
Pour la préparation en tant que telle, il a d'abord fallu trouver le thème du dessert, comment on allait le réaliser, la forme, le parfum. Ça a pris 3 mois environ. Ensuite, il a fallu trouver les techniques de textures, de parfum pour la dégustation, la manière dont on allait faire tenir le dessert. Pour l'occasion, on a inventé une technique de grillage en empreinte silicone inédite. Car le but de cette Coupe du monde de pâtisserie, c'est de faire un show et d'en mettre plein la vue au jury. Les jurés viennent des quatre coins de la planète, ce n'est pas pour voir ce qu'ils connaissent déjà.
Sur scène, comment ça se passe ?
Les supporters, je ne les ai vu qu'à la fin. On ne voit qu'une masse, silencieuse alors qu'il y a des klaxons, des trompettes, et que ça fait un boucan d'enfer. On est un peu dans une bulle. Il y a quelques années, quand j'ai participé à la coupe du monde junior, on avait été entraîné avec l'équipe de France d'escrime. Là, Mathieu et Joffrey n'étaient pas très chaud pour ce genre d'entraînement.
En tant que capitaine de l'équipe de France, je leur ai demandé de faire de la sophrologie pour se recentrer, se canaliser. Il faut croire que ça a payé... La Coupe du monde de pâtisserie, le jour J, c'est 90% de mental. La beauté de ce concours, c'est qu'on est champion du monde à 3. C'est collectif et c'est l'essentiel.
Qu'est-ce que ça apporte d'être champion du monde de pâtisserie ?
Là, tout de suite, pas grand chose car on traîne la fatigue. On s'est levé à 4 heures du matin hier (lundi 28 janvier, ndlr), on a débuté à 6h, on a fini à 16h. Ensuite, il a fallu tout ranger. Et on a alors été embarqué dans le protocole jusqu'à 1h du matin. On a pas eu le temps de prendre du recul.
Pour la suite, le fait d'être champion du monde ouvre de nouvelles portes, des départs à l'étranger, des formations en France et aux quatre coins de la planète chez les meilleurs. Car dans la profession, la Coupe du monde de pâtisserie a une énorme crédibilité.